Antisémitisme : Charles Kushner, ambassadeur des États-Unis en France, dénonce « l’absence d’action suffisante » d’Emmanuel Macron

Charles Kushner, ambassadeur des États-Unis en France.
Photo: photo LUDOVIC MARIN/AFP via Getty Images
Relativement discret depuis son arrivée à Paris en juillet, le nouvel ambassadeur des États-Unis en France, Charles Kushner, est sorti de sa réserve. Dans une lettre au vitriol adressée à Emmanuel Macron et consultée par Epoch Times, le diplomate américain interpelle directement le chef de l’État dans un contexte où la France connaît une recrudescence des actes antisémites et s’apprête à reconnaitre un État palestinien.
Ce 25 août « marque le 81ᵉ anniversaire de la libération de Paris par les Alliés, mettant fin à la déportation des Juifs en France, date qui me paraît pertinente pour vous exprimer ma profonde inquiétude face à la flambée de l’antisémitisme et à l’absence d’action suffisante de votre gouvernement pour le combattre », écrit Charles Kushner. Avant d’ajouter, d’un ton alarmant : « Il ne se passe pas un jour en France sans que des Juifs soient agressés dans les rues, des synagogues et des écoles dégradées, et des entreprises appartenant à des Juifs vandalisées. »
Dimanche soir, le ministère des Affaires étrangères a réagi en évoquant des « allégations inacceptables » allant « à l’encontre du droit international, en particulier du devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures des États », et en annonçant la convocation de l’ambassadeur américain ce lundi au Quai d’Orsay.
Un écho aux critiques israéliennes
Cette missive s’inscrit dans le sillage du courrier envoyé quelques jours plus tôt par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, exhortant Emmanuel Macron à renoncer à son projet d’annoncer à l’ONU, en septembre, la reconnaissance d’un État de Palestine. Le dirigeant israélien dénonçait alors une décision qui « alimente le feu antisémite » en France, « renforce le refus du Hamas de libérer les otages » et « encourage ceux qui menacent les Juifs français ».
L’ambassadeur d’Israël à Paris, Joshua Zarka, avait lui aussi confié à Epoch Times le 1er août qu’« il existe une différence fondamentale entre reconnaître un État palestinien avant et après le 7 octobre ». Un signal envoyé par la France qui, selon lui, « revient à donner un prix à la barbarie, en disant implicitement que la violence et la terreur perpétrées par les terroristes du Hamas ont fonctionné ».
Charles Kushner reprend à son compte cette analyse, voyant dans la reconnaissance d’un État palestinien un geste qui « encourage les extrémistes ». « Des déclarations qui vilipendent Israël et des gestes de reconnaissance d’un État palestinien encouragent les extrémistes, fomentent la violence et mettent en péril la judéité en France », écrit-il. Et d’asséner : « Aujourd’hui, ce n’est plus possible de tergiverser : l’antisionisme, c’est l’antisémitisme, point. »
Les mesures de l’administration Trump contre l’antisémitisme
L’ancien grand donateur du Parti démocrate fait aussi référence à sa proximité familiale avec le beau-père d’Ivanka Trump pour appuyer son propos : « Le président Trump et moi avons des enfants juifs et partageons des petits-enfants juifs. Le peuple américain et moi-même savons très bien ce qu’il pense de l’antisémitisme. »
Dans sa lettre, il déroule ensuite les mesures mises en place par l’administration Trump contre l’antisémitisme aux États-Unis : renforcement de la protection des étudiants juifs sur les campus, moyens supplémentaires pour le FBI et le Département de la Sécurité intérieure afin de sécuriser synagogues et écoles, restrictions migratoires pour interdire l’entrée du territoire aux étrangers « adhérant à la haine antisémite », et expulsions de résidents soutenant le Hamas. « Nous savons donc combattre l’antisémitisme, tant que nos dirigeants ont la volonté d’agir », martèle-t-il.
Le diplomate exhorte donc Emmanuel Macron à « agir avec résolution » : « faire appliquer les lois relatives aux crimes de haine, et ce sans exception ; garantir la sécurité des écoles, des synagogues et des entreprises juives ; poursuivre en justice les malfaiteurs avec toute la rigueur du droit ; et abandonner les initiatives qui servent à légitimer le Hamas et ses alliés ».
Car son constat sur la France est sombre. Charles Kushner rapporte que « les Juifs de France sont bien trop nombreux à craindre que l’histoire se répète en Europe » et que « des parents poussent leurs enfants à émigrer », soulignant que « selon des sondages, une majorité de Français estime que la Shoah pourrait se reproduire ».
Un fossé grandissant entre Paris, Washington et Jérusalem
Cette missive illustre la fracture entre la ligne prônée par Washington sous Trump et celle défendue par Paris, qui, selon l’ambassadeur d’Israël en France, « a déployé d’intenses efforts diplomatiques » pour entraîner d’autres pays occidentaux dans la reconnaissance d’un État palestinien. Ce n’est pas la première fois que les politiques françaises et américaines s’entrechoquent sur le dossier israélo-palestinien.
Selon des documents saisis par Tsahal à Gaza, la France aurait même pris l’initiative, avec l’aval d’Emmanuel Macron, d’une rencontre avec le Hamas à l’automne 2020 au Qatar, au moment même où l’administration Trump œuvrait, de son côté, à normaliser les relations diplomatiques entre Israël et plusieurs États arabes dans le cadre des accords d’Abraham.
Selon ces documents, au cours de cet échange, le numéro trois du renseignement français aurait déclaré que « la France est historiquement proche du combat palestinien », critiqué la politique américaine dans la région et exprimé sa volonté de dialoguer à la fois avec l’Autorité palestinienne et avec le Hamas, sans réagir lorsque ce dernier aurait affirmé vouloir lutter jusqu’à « la défaite de l’entité sioniste ».
Si le Quai d’Orsay a aussitôt dénoncé des « accusations sans fondement » visant à discréditer les efforts diplomatiques français, l’ambassadeur d’Israël en France a déclaré à Epoch Times que « ces documents, rédigés par le Hamas lui-même à destination de sa direction à Gaza, constituent une réalité factuelle ».

Etienne Fauchaire est un journaliste d'Epoch Times basé à Paris, spécialisé dans la politique française et les relations franco-américaines.
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