Brain Invaders : « l’intelligence artificielle » pour éliminer des aliens par la pensée

24 novembre 2017 10:36 Mis à jour: 24 novembre 2017 10:37

Touché ! Face à un écran, un joueur élimine des aliens sans utiliser ni manette ni souris, uniquement par la pensée: le jeu vidéo « Brain Invaders », développé par des chercheurs, laisse entrevoir de nouvelles compétences pour notre cerveau.

Si aujourd’hui les scientifiques s’amusent à faire exploser des créatures pixelisées, la technologie mise au point pourrait dans le futur permettre de commander des membres artificiels, de communiquer avec des personnes paralysées ou incapables de parler, voire de piloter un fauteuil roulant. Le tout par la pensée.

« L’intelligence artificielle permet de décoder l’intention du sujet à partir de données encéphalographiques et les traduit en commandes », explique Marco Congelo, chercheur au laboratoire images parole signal automatique (GIPSA-lab), à Grenoble (centre-est), où a été conçu « Brain Invaders ».

Concept du jeu vidéo: les aliens, inspirés de l’iconique « Space Invaders », clignotent. Le joueur, en se concentrant sur l’alien qu’il veut éliminer, perçoit ce clignotement. Son cerveau, sous l’effet de ce flash émet automatiquement une onde cérébrale, appelée P300, connue pour se propager dans le cortex après toute stimulation qu’elle soit visuelle, auditive ou tactile.

En analysant les données encéphalographiques du joueur, les algorithmes définissent quel alien a clignoté juste avant que le cerveau ne produise cette onde et peuvent alors ordonner sa destruction.

Ce jeu s’inscrit dans la lignée de travaux menés depuis déjà des années sur les « interfaces cerveau-ordinateur » (ICM), des systèmes informatiques permettant d’interagir avec une machine par le biais de la pensée, sans utiliser de muscle ou de nerf.

Les premiers essais chez l’homme datent des années 1980, mais les ICM sont toujours en cours de développement, compte tenu notamment des difficultés du traitement du signal électrique émis par le cerveau.

« Le signal (P300, ndlr) est très faible et noyé dans tous les autres bruits produits par le cerveau, les yeux, la mâchoire …« , explique Marco Congelo.

Facebook avait annoncé en avril se donner deux ans pour créer un système capable de « lire » dans le cerveau les mots qu’une personne veut prononcer pour ensuite les transcrire simultanément sur un ordinateur à la vitesse de 100 mots par minute.

De son côté, le milliardaire Elon Musk, fondateur de l’entreprise spatiale SpaceX et du constructeur de voitures électriques Tesla, a annoncé se lancer dans un projet d’interface prévoyant l’implantation dans le cerveau de minuscules électrodes capables de transmettre ou d’importer des pensées, le tout visant à amplifier le pouvoir du cerveau.

En février, des scientifiques d’un centre de recherche en Suisse ont réussi à communiquer avec des patients totalement paralysés via une interface ordinateur-cerveau mesurant les niveaux d’oxygène dans le cerveau. Cette méthode, non invasive, leur a permis de savoir si les patients répondaient « oui » ou « non » à une série de questions.

Pour décrypter les messages du cerveau, les créateurs de « Brain Invaders » ont également opté pour une technique non invasive en utilisant un casque d’électroencéphalographie (EEG).

À l’aide d’électrodes placés sur le cuir chevelu, le casque détecte l’activité électrique du cerveau et l’émission d’ondes P300.

Les casques médicaux sont les plus performants mais restent contraignants et surtout très chers. L’arrivée aujourd’hui sur le marché de casques EEG à bas coût ouvre la porte à un plus large développement des « interfaces cerveau-ordinateur ».  Outre un prix plus abordable (quelques centaines d’euros), ces casques « low cost » ont l’avantage de fonctionner sans fils et sur batterie et ne nécessite pas l’utilisation de gel conducteur.

Autre particularité, selon les chercheurs, « Brain Invaders » s’affranchit d’une limitation majeurs des ICM existantes: le besoin d’un étalonnage avant chaque utilisation ». L’algorithme d’apprentissage automatique permet à la machine de s’adapter aux utilisateurs au fur et à mesure qu’ils jouent.

S’il est encore difficile de dire quand arriveront de réelles applications pratiques, celles-ci sont déjà imaginables et devraient concerner deux grands secteurs, selon Marco Congelo: « la santé », par exemple pour suppléer l’absence de mobilité, et le divertissement plus « grand public », comme les jeux vidéo.

R.B AVEC AFP

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