Le changement d’heure: préserver ou voler la lumière du jour?

Par Gabriël Moens
25 juillet 2022 22:06 Mis à jour: 25 juillet 2022 22:06

Le 26 mars 2019, le Parlement européen a voté en faveur de la suppression progressive du rituel semestriel du changement d’heure dans l’Union européenne (UE). Le vote, s’il est appliqué, annulerait la directive sur les dispositions relatives à l’heure d’été.

Daniel Boffey, qui a commenté ce vote dans The Guardian, a indiqué que les États membres pourront « choisir de rester à l’heure d’été permanente ou à l’heure d’hiver permanente en vertu du projet de directive qui a été adopté par 410 voix contre 192 ».

L’heure d’été, ou « Daylight Saving Time – DST » (l’heure préservant la lumière du jour), reste une question controversée, non seulement dans l’UE, mais dans le monde entier. DST est utilisé dans 70 pays, mais la plupart d’entre eux remettent en question le bien-fondé de cette disposition.

Pourquoi cela a commencé

L’argument en faveur du passage à l’heure d’été est basé sur le fait que cela permet de bénéficier de plus de lumière du jour pendant les mois d’été.

DST est une aubaine pour l’industrie du tourisme, car les visiteurs disposent d’une journée plus longue en plein jour pour visiter leurs destinations préférées. Cela permet également aux enfants de jouer dehors plus longtemps, leur offrant ainsi un mode de vie plus sain.

Toutefois, les habitants des campagnes, en particulier les agriculteurs, pourraient ne pas apprécier l’heure d’été, car ils devraient commencer leurs travaux agricoles plus tard et éventuellement terminer plus tard de s’occuper de leurs animaux et de leurs cultures.

Les moutons se nourrissent d’herbe près de la ville de Tamworth en Nouvelle-Galles du Sud, en Australie, le 4 mai 2020. (Peter Parks/AFP via Getty Images)

DST est une invention de la Première Guerre mondiale, lorsque le Royaume-Uni et l’Allemagne ont adopté l’heure d’été pour économiser sur le coût du charbon. Après la guerre, cette pratique a été abandonnée pour être ressuscitée dans les années 1980 afin d’économiser sur la flambée des prix du pétrole.

Le vote du Parlement européen visant à mettre fin au rituel du changement d’heure deux fois par année permet aux États membres de l’UE de choisir de manière permanente l’heure d’été ou l’heure « normale » (heure d’hiver). Ce choix peut encore diviser l’UE, car la responsabilité de la mise en œuvre du vote est constamment transférée du Conseil européen, composé des chefs d’État et de gouvernement, à la Commission européenne – son organe exécutif.

En effet, les querelles bureaucratiques liées à l’abolition du changement d’heure déçoivent ceux qui veulent mettre en œuvre les changements proposés.

L’incapacité, ou le manque de volonté, de traiter cette question peut également être une conséquence des priorités de l’UE qui, depuis le vote du Parlement en 2019, ont été la lutte contre la pandémie du Covid-19 et la gestion des problèmes liés au Brexit.

Les effets secondaires

Plus important encore, le vote du Parlement européen ne met fin qu’au changement semestriel de l’horloge, mais il n’impose ni l’heure d’été (DST) ni l’heure normale (heure d’hiver) aux États membres.

Si l’heure d’été est choisie comme solution permanente, les objections actuelles existeront toujours et pourraient être amplifiées. Si, au contraire, l’heure normale est choisie, l’effet sur l’industrie du tourisme pourrait être dévastateur et les effets sur la consommation d’énergie seraient inévitablement réévalués.

L’abolition de ce rituel semestriel s’appuie sur des études scientifiques qui ont révélé les effets secondaires physiques et psychologiques du passage du DST à l’heure d’hiver.

Parmi ceux-ci figurent une baisse de la productivité des travailleurs, une augmentation de l’occurrence des maladies cardiovasculaires et des accidents vasculaires cérébraux causés par l’irrégularité des cycles biologiques, et même une augmentation du nombre d’incidents de la circulation causés par la dépression saisonnière.

Les données indiquent également que l’heure normale entraîne une augmentation des niveaux de dépression, sans parler de son impact sur la consommation d’énergie.

Bien que certains de ces résultats semblent farfelus, contradictoires et même contre-intuitifs, DST peut représenter un inconvénient pour certaines personnes. Toutefois, l’opinion selon laquelle DST crée des problèmes physiques et psychologiques importants semble exagérée.

La perturbation de l’horloge biologique des gens peut avoir des conséquences inattendues. (Pormezz/Adobe Stock)

En même temps, le changement d’heure a créé un cauchemar administratif dans des pays comme l’Australie, où certains États observent l’heure d’été et d’autres l’heure normale. Par exemple, les compagnies aériennes qui doivent planifier les transports entre les États sont confrontées à de graves difficultés en raison des différents fuseaux horaires et du chaos potentiel provoqué par le passage du DST à l’heure normale.

De même, les voyageurs et les hommes d’affaires doivent faire constamment attention aux changements d’heure pour ne pas manquer leurs rendez-vous.

Pour ou contre

Ceux qui sont en faveur du DST comme moyen de profiter de plus longues heures de clarté pourraient bien considérer le vote du Parlement européen comme une menace potentielle. Pour eux, l’installation permanente de l’heure normale (d’hiver) les priverait de la lumière du jour.

Dans ce contexte, on pourrait se rappeler l’ancienne expression « vol à la lumière du jour ». Aujourd’hui, elle indique que quelque chose est excessivement et injustement cher sans raison valable. Cependant, les origines de cette expression proviennent du fait de priver les gens de la lumière du jour.

« Voler la lumière du jour » de quelqu’un a été une phrase apparue dans les années 1690, lorsque le gouvernement du roi anglais Guillaume III qui, ayant un besoin urgent d’argent, avait imposé un « impôt sur les fenêtres ». Les maisons ont été taxées en fonction du nombre de leurs fenêtres. Les gens ont donc condamné leurs fenêtres pour éviter de payer cet impôt progressif – un exemple d’évasion fiscale. La possession de fenêtres était considérée par les riches comme un symbole de statut social, et le nombre de fenêtres dans leur habitation était affiché comme un signe de richesse et d’importance sociale.

L’histoire du passage à l’heure d’été montre sans aucun doute que les manipulations humaines sur l’horloge biologique peuvent créer des problèmes difficiles à résoudre. S’il a été facile d’introduire le DST, le rendre permanent pourrait bien causer de gros problèmes.

Gabriël A. Moens AM est professeur émérite de droit à l’Université du Queensland, en Australie, et a été vice-chancelier et doyen de l’Université Murdoch. En 2003, il a reçu l’Australian Centenary Medal pour services rendus à l’éducation. Il a enseigné en Australie, en Asie, en Europe et aux États-Unis. M. Moens a récemment publié deux romans : A Twisted Choice (Un choix déformé) et The Coincidence (La coïncidence).
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Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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