Entraver la flotte fantôme russe : Emmanuel Macron mobilise l’Europe et s’apprête à réunir les chefs militaires

Le 1er octobre 2025 au large des côtes de Saint-Nazaire, le pétrolier Boracay, appartenant à la « flotte fantôme » russe, soupçonné d'être impliqué dans des vols de drones au-dessus du Danemark.
Photo: DAMIEN MEYER/AFP via Getty Images
Emmanuel Macron a exhorté jeudi les Européens à franchir « un pas » dans « la politique d’entrave » visant la flotte fantôme russe. Selon lui, ces navires permettent à Moscou de contourner les sanctions occidentales et d’exporter son pétrole pour financer la guerre en Ukraine.
Le président français, en déplacement à Copenhague lors d’un sommet européen, a insisté : « Il est extrêmement important d’accroître la pression sur la flotte fantôme parce que ça réduit clairement la capacité de la Russie à financer son effort de guerre ». Il a estimé que le commerce pétrolier de ces navires contribue à « 30 à 40% » du financement de l’offensive russe.
Emmanuel Macron a annoncé une coordination accrue : « Dans les prochains jours, nos chefs d’état-major, en coordination avec l’OTAN, dans le cadre de la Coalition des volontaires, se réuniront pour bâtir des actions communes ».
Arraisonnement du pétrolier « Boracay » par la France
Les commandos marine français ont intercepté samedi le « Boracay », un navire transportant « une importante cargaison de pétrole » en provenance de Russie et à destination de l’Inde. Les autorités françaises précisent qu’il était sous sanctions européennes. Selon le procureur de Brest, l’opération s’appuyait sur « l’article 110 de la convention ONU de Montego Bay » et était motivée par « les incohérences présentées par le pétrolier quant à sa nationalité ». L’enquête de la Marine nationale a conclu « à une absence de pavillon ».
Le capitaine du navire, de nationalité chinoise, sera jugé en février pour « refus d’obtempérer ». Aucune indication n’a été donnée sur sa liberté de mouvement ou sur la reprise de route du navire.
Emmanuel Macron a évoqué à propos de cette opération des « comportements inappropriés et extrêmement agressifs à l’égard de notre frégate et des hélicoptères qui avaient été déployés ».
« C’est de la piraterie »
Jeudi soir, Vladimir Poutine a dénoncé cette interception, qualifiant les faits de « piraterie ». Il a affirmé : « C’est de la piraterie. Car (…) le pétrolier a été arraisonné dans les eaux neutres, sans aucun fondement. Visiblement, ils cherchaient quelque chose, des marchandises militaires, des drones, ou des choses comme ça. Mais il n’y a rien de ça là-bas ». Il a ajouté : « Le pétrolier était sous le pavillon d’un pays tiers, en effet, avec un équipage international. Honnêtement, je ne sais pas dans quelle mesure il est lié à la Russie ».
Une flotte difficile à tracer
Le « Boracay » est décrit comme un navire de 244 mètres de long, connu sous plusieurs noms, dont « Pushpa », et ayant déjà été immatriculé sous sept pavillons différents : Djibouti, Gabon, Hong Kong, Saint-Kitts-et-Nevis, Liberia, îles Marshall et Mongolie. Une source militaire indique : « Chaque jour, entre dix et quinze bateaux de la flotte fantôme passent au large de Brest. »
Ces navires adoptent des modes opératoires opaques : changements fréquents de pavillons, propriétaires installés dans des paradis fiscaux, transpondeurs souvent éteints, ce qui rend leur identification et leurs liens avec Moscou difficiles à établir.
Liens supposés avec des survols de drones au Danemark
Des soupçons entourent le « Boracay » concernant des survols de drones qui ont perturbé le trafic aérien fin septembre au Danemark, près duquel il se trouvait alors. Selon le site The Maritime Executive, il aurait pu servir de « plateforme de lancement » ou de « leurre ». Cependant, l’enquête ouverte en France ne concerne pas ces faits.
L’origine des drones reste inconnue, mais les autorités danoises ont mis en cause la Russie, déjà accusée d’être derrière l’incursion d’une vingtaine de drones dans le ciel polonais début septembre. Le 22 septembre, un premier survol avait entraîné la fermeture de l’aéroport de Copenhague. Un responsable de la police danoise avait évoqué l’hypothèse d’un décollage depuis un navire. De nouveaux survols ont eu lieu le 25 septembre, visant plusieurs aéroports et une base militaire.
Selon une analyse des données de VesselFinder, le pétrolier a quitté le port russe de Primorsk, près de Saint-Pétersbourg, le 20 septembre, pour Vadinar, dans le nord-ouest de l’Inde. Il se trouvait au large des côtes danoises entre le 22 et le 25 septembre. Emmanuel Macron a toutefois appelé à rester « très prudent » sur une possible implication du navire dans ces survols.
Avec AFP
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