BlackRock fait l’objet d’une enquête pour ses placements en Chine, où ses employés sont contraints d’étudier la pensée de Xi Jinping

Par Michel Pham
13 août 2023 23:50 Mis à jour: 14 août 2023 21:45

BlackRock investit massivement en Chine, même durant la période la plus critique de la crise du Covid-19. Ses placements dans les entreprises chinoises contrôlées par le Parti communiste chinois (PCC) font l’objet d’une enquête aux États-Unis, tandis que ses employés en Chine sont convoqués pour étudier la « pensée de Xi Jinping ».   

Le mardi 8 août, une commission bipartisane de la Chambre des représentants a annoncé que des parlementaires américains enquêtent sur les investissements de la société BlackRock et de la firme de services financiers Morgan Stanley Capital International (MSCI). Effectués avec des fonds d’épargnants américains, ces investissements sont réalisés dans des entreprises chinoises sanctionnées par les États-Unis. L’enquête a été ouverte suite à la découverte que BlackRock – le plus important gestionnaire d’actifs au monde – et MSCI « investissent ou permettent le placement d’économies d’Américains dans des dizaines de sociétés chinoises inscrites sur la liste noire » des États-Unis, a indiqué la Commission sur son site internet.

Les entreprises chinoises ciblées sont considérées par Washington comme présentant une menace pour la sécurité nationale des États-Unis ou comme des soutiens aux violations des droits humains perpétrées par le PCC au pouvoir.

BlackRock et MSCI « sapent les valeurs américaines » 

Le président de la commission, le républicain du Wisconsin Mike Gallagher, et son membre de haut rang, le démocrate de l’Illinois Raja Krishnamoorthi, ont écrit à BlackRock et à MSCI pour réclamer des explications sur les travaux exploratoires effectués en amont d’investissements potentiels. Ils demandent également des informations détaillées pour assurer la transparence de ces placements auprès des investisseurs et du grand public. Les deux représentants espèrent une « prompte réponse » de la part des deux sociétés américaines afin de leur permettre de comprendre « les progrès économiques, technologiques et sécuritaires (du PCC) et la concurrence qu’il représente pour les États-Unis », comme le précisent les missives.

« Notre examen a montré qu’à la suite de décisions prises par MSCI [et BlackRock], [d]es américains financent en ce moment involontairement des entreprises de la République populaire de Chine (RPC) qui développent et construisent des armes pour l’Armée populaire de libération (APL) – l’armée de la RPC – et font progresser la mission déclarée de suprématie technologique du PCC », accusent les deux membres du Capitole.

A lui seul, le fond BlackRock « a investi plus de 429 millions de dollars dans des sociétés de la RPC » blacklistées par les États-Unis, d’après la commission. En envoyant des quantités massives d’argent de millions d’américains à des entreprises liées à l’APL et aux violations des droits de l’homme, BlackRock et MSCI « exacerbent une menace déjà importante pour la sécurité nationale et sapent les valeurs américaines », peut-on lire dans les lettres.

Concernant les problématiques soulevées, le plus important gestionnaire d’actifs au monde « continuera d’échanger » avec la commission, a indiqué un porte-parole. « A l’instar de nombreux gestionnaires d’actifs dans le monde, BlackRock offre à ses clients un certain nombre de dispositifs pour investir en Chine ou pour l’exclure de leur portefeuille », a-t-il poursuivi, assurant que la société respectait « dans le monde entier la totalité des législations américaines en vigueur ».

BlackRock n’est pas seulement le gérant des placements de millions d’américains sur les marchés financiers, mais il est également « le plus important actionnaire du CAC 40 » – le groupe des 40 entreprises les plus importantes cotées à la Bourse de Paris – « en dehors des groupes familiaux », selon BFM Bourse. En effet, le plus grand gestionnaire d’actifs au monde représente 2,1% de la capitalisation totale de l’indice CAC 40, dépassant l’État français qui ne détient que 1,9%.

Endoctrinement forcé à la « pensée de Xi Jinping »

De plus, l’agence de notation Bloomberg a rapporté que des employés d’entreprises internationales présentes en Chine, dont ceux de BlackRock, avaient été convoqués pour assister à des conférences diffusant l’idéologie de Xi Jinping.

Le secrétaire général du PCC, Xi Jinping a réussi à faire inscrire son nom dans la charte du parti à l’issue du 19e Congrès, en Octobre 2017. Celle-ci évoque la « pensée de Xi Jinping » comme le nouveau paradigme du PCC, plaçant « Oncle Xi » au même rang qu’« Oncle Mao ». En 2018, la « pensée de Xi Jinping » a été inscrite dans la Constitution de la PRC et le secrétaire général du PCC a obtenu l’abolition de la limitation du nombre de mandats présidentiels. A partir de la rentrée scolaire 2021, tous les écoliers chinois devaient apprendre son idéologie. En avril 2023, le PCC a lancé une « campagne d’éducation » pour que « ses 96 millions de membres » puissent « étudier et mettre en œuvre la pensée de Xi Jinping », selon les termes du China Daily.

La propagation sans précédent de l’idéologie de l’« Oncle Xi » se poursuit et devient désormais « incontournable » pour les banquiers et les hommes d’affaires de toute la Chine. « Certains cadres bancaires et chefs d’entreprise doivent consacrer environ un tiers de leur temps de travail à l’étude de la pensée de Xi, en participant à des activités et à des cours, ou en lisant quatre livres de Xi par mois. Cette année, la participation est obligatoire et ils doivent également présenter des documents sur ce qu’ils ont appris », raconte Bloomberg.

D’après l’agence de notation, des représentants des opérations « onshore » de gestionnaires d’actifs étrangers, dont ceux de BlackRock, et des employés d’une entreprise détenue minoritairement par le new-yorkais Franklin Templeton, ont rejoint plus de 3000 employés d’environ 70 sociétés de gestion de fonds, pour assister à une conférence sur « le maintien du leadership du PCC dans l’industrie », lors d’un événement organisé fin juin.

Xi Jinping est « la plus grande menace à laquelle les pays libres sont confrontés »

En août 2021, BlackRock a appelé ses clients à augmenter leurs allocations sur les marchés chinois, alors que « les investisseurs internationaux fuient la Chine communiste » gravement touchée par la crise Covid-19 et qui est « redevenue un empire étatiste et antilibéral ». Peu de temps après, le plus grand gestionnaire d’actifs au monde a lancé une série de fonds communs de placement et d’autres produits d’investissement auprès des consommateurs chinois. Cette décision lui a permis de devenir la première société étrangère à exercer une activité à part entière dans le secteur des fonds communs de placement en Chine.

Mais BlackRock a ensuite été sévèrement critiqué par George Soros dans sa tribune au Wall Street Journal, pour son « erreur tragique » qui « nuirait aux intérêts de sécurité nationale des États-Unis et d’autres démocraties ».

Quelques mois plus tard, lors d’une conférence, le milliardaire a qualifié Xi Jinping comme étant « la plus grande menace à laquelle les pays libres sont confrontés aujourd’hui », avant de marteler : « Xi Jinping a de nombreux ennemis (…) Il gouverne par l’intimidation et personne n’ose lui dire ce qu’il ne veut pas entendre. [Il est] difficile d’ébranler ses convictions, alors même que le fossé entre ses convictions et la réalité n’a cessé de se creuser. »

Tandis que George Soros souhaite que Xi Jinping soit « remplacé par quelqu’un de moins répressif », les « vieux amis » du PCC tels que Bill Gates et Henry Kissinger ont pu accéder aux plus hautes sphères du pouvoir communiste lors de visites largement médiatisées cette année. Il en va tout autrement pour les banquiers, les économistes et les hommes d’affaires étrangers qui rentrent au pays après trois années de fermeture des frontières, comme le rapporte BNN Bloomberg.

« Le nombre de citations de Xi Jinping que j’ai reçues était bien plus élevées que lors de n’importe quel voyage précédent », déclare Cliff Kupchan, président de la société de conseils en risque politique Eurasia Group.

L’AFP a contribué à cet article.

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