Inscription de l’IVG dans la Constitution : un vote crucial au Sénat où les débats s’annoncent tendus

Par Epoch Times avec AFP
28 février 2024 11:30 Mis à jour: 28 février 2024 12:18

Suspense à la chambre haute : l’inscription de l’IVG dans la Constitution se heurte mercredi aux réticences de la droite lors d’un vote indécis au Sénat, où certains vont tenter de freiner la réforme à défaut d’être suffisamment nombreux pour la rejeter.

Les débats s’annoncent tendus à partir de 16h30 au Palais du Luxembourg. D’un côté, le gouvernement soutenu par la gauche en faveur de cette révision promise par le président de la République, Emmanuel Macron. De l’autre, une partie de la droite et des centristes encore sceptiques devant la formulation retenue par l’exécutif.

Trois amendements déposés

Les sénateurs avaient jusqu’à mardi midi pour proposer des modifications au projet de loi constitutionnelle. Trois amendements ont été déposés. Le premier, porté par le LR Alain Millon, ne touche pas au projet de loi constitutionnelle en tant que tel mais vient le compléter, en inscrivant dans la loi le « respect de la clause de conscience des médecins, ou professionnels de santé, appelés à pratiquer l’intervention ».

Le deuxième amendement, déposé par le sénateur LR de la Manche Philippe Bas, veut faire disparaître le mot « garantie » du texte. « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse », indique le projet de loi. Cette formulation ne convient pas à la droite sénatoriale, qui estime qu’elle ouvre la voie à la création d’un droit opposable, ce qui permettrait aux femmes n’ayant pu avoir recours à une IVG de se tourner vers la justice.

Rejet de tous les amendements de modification rédactionnelle

Le texte soumis au vote des 348 sénateurs peine à convaincre les rangs de la majorité sénatoriale, une alliance entre Les Républicains (LR) et le groupe centriste. Le camp du « pour » a remporté une première victoire mercredi matin : la Commission des Lois du Sénat a en effet rejeté tous les amendements de modification rédactionnelle déposés par la droite, selon plusieurs parlementaires. Une tendance qui doit encore être confirmée en séance publique dans l’après-midi.

Ces débats sémantiques sont essentiels car un vote sans modification de la chambre haute est un préalable à cette révision constitutionnelle soutenue par 86% des Français, selon un sondage Ifop de novembre 2022.

La réforme sera ensuite soumise au Congrès réunissant les deux chambres du Parlement à Versailles, où une majorité des trois cinquièmes sera requise pour l’adopter définitivement.

Le vote du Sénat reste incertain

Mais le vote du Sénat reste incertain : les trois chefs de la majorité sénatoriale — le président du Sénat Gérard Larcher, le président du groupe LR Bruno Retailleau et celui du groupe centriste Hervé Marseille — sont en effet opposés à la réforme.

« Il n’y a pas de menace qui pèse sur l’avortement en France », insiste M. Retailleau. « Le gouvernement ne peut pas nous imposer un calendrier au mépris du débat parlementaire », reprend-il auprès de l’AFP, encore échaudé par l’agenda avancé fin 2023 par M. Macron.

Le chef de l’État avait envisagé de réunir le Congrès le 4 mars, ce qui impliquait un vote du Sénat sans modification… Rien de pire pour froisser la droite sénatoriale. Depuis, l’exécutif reste muet sur l’agenda, même si la ministre des Relations avec le Parlement Marie Lebec a reconnu mercredi sur franceinfo qu’il pourrait être organisé « dans les prochains jours » en cas de « vote conforme ».

Remise en cause aux États-Unis ou dans certains pays d’Europe

« Nous prendrons le temps qu’il faut », répète toutefois à l’envi le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, assurant que la France deviendrait « le premier pays au monde à protéger (constitutionnellement) la liberté des femmes à disposer de leur corps », alors que celle-ci est remise en cause aux États-Unis ou dans certains pays d’Europe.

Les associations de défense des droits des femmes comme les collectifs d’opposition à l’IVG ont multiplié les initiatives ces derniers jours pour convaincre les sénateurs. Plusieurs rassemblements pro et anti-constitutionnalisation sont annoncés aux alentours du Sénat dans l’après-midi.

Plusieurs sénateurs ont changé d’avis

Dans les rangs de la droite, la pression sociale ou familiale a fait basculer certains votes : en privé, plusieurs sénateurs reconnaissent qu’ils ont changé d’avis et ne s’opposeront pas à la réforme, laissant entrevoir une nette majorité en faveur de l’inscription de l’IVG dans la Constitution.

La question est surtout de savoir si le texte sera modifié, ce qui obligerait l’Assemblée nationale à s’en saisir à nouveau et repousserait le calendrier de la réforme.

« Liberté » plutôt que « garantie »

« Il n’y a pas d’opposition pour la constitutionnalisation, à condition que ce soit fait proprement », résume la rapporteure Agnès Canayer, désignée par le groupe LR. Cette dernière défend un amendement de suppression du mot « garantie », au profit d’une simple « liberté »… Cette rédaction avait déjà été approuvée par le Sénat en février 2023.

« Le seul objectif : faire échouer le texte », s’est insurgée l’écologiste Mélanie Vogel, déterminée comme toute la gauche à obtenir une adoption sans modification.

Clause de conscience pour les médecins

Une trentaine de sénateurs LR portent, par ailleurs, un autre amendement pour inscrire dans la Constitution la clause de conscience des médecins, non tenus de pratiquer l’IVG s’ils ne le souhaitent pas.

Parviendront-ils à réunir une majorité de sénateurs ? Au stade de la commission des Lois, cela n’a pas été le cas. Une tendance confirmée dans l’hémicycle ?

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.