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La « gestapo » chinoise et ses nouvelles victimes

décembre 30, 2015 8:40, Last Updated: janvier 18, 2016 15:24
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Li Xifu a poursuivi en justice son bureau de poste dans la province du Shanxi, au nord de la Chine parce qu’il lui avait confisqué et falsifié son courrier. Sa plainte a été entendue le 9 novembre devant un tribunal du district. Pourtant, neuf jours plus tard, la police a fait irruption dans la maison de l’ouvrier retraité, l’envoyant directement en centre de détention, sans autre procès.

Qu’un retraité de 74 ans fasse appel à la justice pour rétablir l’exercice de ses droits, cela en était trop pour le Bureau 610 de Heilongjiang, une province du nord-est de la Chine.

Le 16 novembre, cette agence semblable à la Gestapo, que le Parti communiste chinois n’a jamais officialisée, a adressé une note de service aux différentes entités étatiques ainsi qu’au Comité du Parti d’Heilongjiang. Cette note de quatre pages porte les inscriptions « Urgent » et « Confidentiel », soit le deuxième plus haut niveau de sécurité de l’information en Chine.

Le document souligne le cas de « Li Xifu, membre obstiné du Falun Gong » et sa tentative « fourbe » de « faire usage des canaux légaux pour atteindre des objectifs illégaux  », en faisant référence à l’enregistrement de sa plainte contre l’ancien dirigeant Jiang Zemin. Ceux qui ont déposé de telles plaintes, stipule la note de service, sont « entrés en guerre légale » avec le Parti. Le Parti devrait « résolument se prémunir contre ce développement » et même de manière proactive « le tuer dans l’œuf ».

Mais les avocats en Chine avancent que la branche du Bureau 610 d’Heilongjiang n’a aucune autorité légale pour envoyer de tels ordres à d’autres entités du Parti, tandis que Li Xifu a agi en respectant les lois du régime chinois.

Cette note de service est un récent exemple des tentatives du Bureau 610 pour arrêter le nombre croissant de pratiquants de Falun Gong qui utilisent les canaux légaux du régime pour poursuivre en justice l’ancien dirigeant.

Zhang Zanning, avocat et conférencier en droit à l’université du Sud-Est de Nanjing (ou Nankin), s’est confié à Epoch Times à propos du Bureau 610. Selon lui, cette agence se limite à émettre des ordres aux membres du Parti. Mais ses ordres ne devraient pas être exécutés s’ils sont non-constitutionnels.

« Donc, n’importe lequel de ses ordres ou instructions à l’attention des entités gouvernementales n’a aucun statut légal. Ils sont tous non-constitutionnels ou illégaux », argumente Zhang.

Des plaintes pour crime contre l’humanité et génocide

Les pratiquants de Falun Gong s’exercent à des mouvements lents et méditatifs, associés à un enseignement basé sur les principes de vérité, de compassion et de tolérance. En juillet 1999, le numéro un du Parti de l’époque, Jiang Zemin, a lancé une persécution dans le but d’éradiquer la pratique.

Plus de 3 900 pratiquants de Falun Gong torturés à mort

Minghui.org, un site d’information sur la persécution, a eu la confirmation du décès de plus de 3 900 pratiquants, morts sous la torture. Mais il est plus vraisemblable que le nombre de victimes soit bien plus élevé, du fait de la difficulté de révéler les informations à l’extérieur de Chine. Des centaines de milliers d’autres sont toujours incarcérés, selon le site Minghui.

Des investigateurs affirment, preuves à l’appui, que depuis le début des années 2000, le régime est responsable d’un trafic d’organes à grande échelle. Les prélèvements ont lieu sur des dizaines de milliers de pratiquants de Falun Gong, afin d’alimenter un marché de la transplantation, qui sert de nouvelle manne financière au régime.

Cette année, plus de 200 000 plaintes ont été déposées par des pratiquants de Falun Gong, appelant le régime à poursuivre Jiang Zemin en justice pour crime contre l’humanité et génocide. La plus haute instance judiciaire du régime a pu recevoir les plaintes grâce à une réforme judiciaire intervenue en mai qui assouplit les conditions de recevabilité des plaintes et exige des autorités qu’elles enregistrent toutes les plaintes et délivrent un accusé de réception au plaignant.

La réponse de Pékin à ces plaintes contre des crimes marque un tournant significatif. En août 1999, deux pratiquants dénommés Zhu Keming et Wang Jie avaient été arrêtés après leur déposition de plainte contre Jiang. Zhu est resté cinq ans en détention et a eu presque toutes les dents arrachées sous la torture. Wang n’a pas survécu à la prison.

Différentes réactions selon les provinces

Les autorités provinciales du Parti semblent avoir adopté différentes attitudes envers la vague actuelle de poursuites. Certaines provinces laissent les plaignants tranquilles, tandis que dans d’autres – en particulier Gansu, Harbin, Shanxi et Heilongjiang – les pratiquants, même accompagnés d’avocats, n’ont pas pu déposer de plainte et ont même été inquiétés.

Les autorités d’Heilongjiang se montrent particulièrement hostiles aux pratiquants qui ont déposé des plaintes. Dernièrement, Sheng Xiaoyun, la belle-mère de Ben Hedges, journaliste et présentateur tv apprécié aux États-Unis, en a fait les frais. Le journaliste a alors demandé à ses spectateurs de téléphoner aux officiers de police responsables de l’arrestation de sa belle-mère. Elle a finalement été relâchée au bout de 10 jours.

Cette rude sentence à Heilongjiang n’est pas une surprise. Davantage de pratiquants de Falun Gong ont été tués dans cette province plus que dans toute autre, d’après Minghui. Seules les provinces Hebei et Shandong ont dépassé à elles deux Heilongjiang, totalisant 10 502 cas de persécution.

La branche du Bureau 610 à Heilongjiang tente de pousser les autres entités du Parti à participer à la persécution contre le Falun Gong. Dans ce cas, il ne serait alors pas le seul à être pointé du doigt le jour où la persécution prendra fin, déclare à Epoch Times Yu Wensheng, avocat de défense des droits de l’homme en activité à Pékin.

« En fait, poursuivre Jiang, ou n’importe quelle organisation, est légal et fait partie des droits des citoyens chinois », affirme-t-il.

Le Bureau 610 de Tianjin a récemment émis un ordre similaire à celui d’Heilongjiang, qu’Epoch Times s’est procuré. Dans le même registre, ce document demande de renforcer le combat contre les plaintes « mensongères » et « excessives » déposées par les pratiquants de la méthode bouddhiste.

Il est difficile de savoir si ces notes de service indiquent que les branches locales du Bureau 610 tentent de manière proactive d’étouffer les poursuites, ou si elles reçoivent des consignes du Bureau 610 du Parti central.

Version anglaise : In Northern Province, China’s ‘Gestapo’ Seeks to Implicate Others in Persecution

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