La Suède va commencer à constituer des stocks alimentaires en prévision de circonstances extrêmes et de la guerre

Un homme achète de la nourriture à Stockholm, en Suède, le 14 mars 2023.
Photo: JONATHAN NACKSTRAND/AFP via Getty Images
L’Agence suédoise de l’agriculture va mettre en place des stocks d’urgence de céréales et d’intrants agricoles afin de garantir aux citoyens « l’accès à une nourriture sûre et suffisante en cas de crise grave et, dans l’extrême, de guerre », a indiqué l’organisme dans un communiqué du 14 octobre.
« Le gouvernement a alloué des fonds à l’Agence suédoise de l’agriculture pour établir des stocks d’urgence de céréales destinées à la consommation alimentaire dans tout le pays pour la période 2026–2028, ainsi que des biens d’intrants critiques qui sont essentiels pour permettre à la Suède de maintenir sa production alimentaire domestique », précise l’agence.
Les premiers achats cibleront le nord du pays, en particulier les quatre comtés de Norrbotten, Västerbotten, Jämtland et Västernorrland, qui dépendent de l’acheminement depuis le sud pour leurs approvisionnements alimentaires.
« Dans le même temps, cette zone revêt une importance stratégique pour la défense de la Suède et de l’OTAN. L’Agence suédoise de l’agriculture commencera donc à y constituer des stocks d’urgence de céréales », indique le conseil.
L’appel d’offres pour la constitution de ces réserves a été publié le 15 octobre.
L’objectif des achats est de permettre à l’État d’assurer 3000 calories par personne et par jour — un seuil fixé par l’Agence nationale suédoise de l’alimentation comme nécessaire en période d’alerte renforcée.
Des stocks d’urgence seront répartis sur l’ensemble du territoire afin que des denrées puissent être mobilisées depuis n’importe quelle région si des infrastructures clés venaient à être mises hors service dans certaines zones en cas de guerre ou d’autres crises, selon l’agence.
Cette stratégie suédoise s’inscrit dans un contexte d’inquiétudes croissantes face aux provocations russes dans la région au sens large.
Lors d’un discours le 8 octobre, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a affirmé que la Russie cherchait à « semer la division » sur le continent.
La cheffe de l’exécutif européen a évoqué un « schéma préoccupant de menaces croissantes » pesant sur la sécurité du continent en dehors du cadre d’une guerre conventionnelle, citant des incursions de drones en Europe, le sabotage de câbles sous-marins et des cyberattaques.
« Il est temps de l’appeler par son nom : il s’agit d’une guerre hybride, et nous devons la prendre très [au sérieux] », a-t-elle déclaré.
« Combattre la guerre hybride de la Russie ne relève pas seulement de la défense traditionnelle : il s’agit de logiciels pour drones, de pièces de rechange pour les pipelines, d’équipes de réponse cyber rapide. »
Mme von der Leyen a proposé une « muraille de drones » pour détecter, suivre et intercepter les aéronefs sans pilote qui pénétreraient l’espace aérien européen.
Fin septembre, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a balayé ces préoccupations, affirmant que Moscou ne prévoyait pas d’attaquer des pays européens ou membres de l’OTAN.
« Toutefois, toute agression contre mon pays recevra une réponse décisive. Les membres de l’OTAN et de l’UE ne doivent en douter sous aucun prétexte », a déclaré M. Lavrov.
Le 15 octobre, le secrétaire américain à la Guerre, Pete Hegseth, a prévenu Moscou que les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN « imposeraient des coûts à la Russie pour son agression persistante » si le Kremlin ne mettait pas fin à son offensive en Ukraine.
Dans une note publiée le 13 octobre, l’Institut pour l’étude de la guerre a averti que la Russie pourrait bientôt commencer à mobiliser ses réserves militaires actives de manière continue afin de soutenir la poursuite des opérations offensives en Ukraine.
Toutefois, à ce stade, la Russie n’est pas susceptible d’engager une mobilisation involontaire de réservistes à grande échelle pour « augmenter de manière spectaculaire » la taille de ses forces armées, précise le think tank.
Dans son communiqué du 14 octobre, l’Agence suédoise de l’agriculture a également évoqué les effets économiques potentiels de sa décision de constituer des réserves alimentaires.
« Le fait que des stocks existent amène les acteurs de marché à tenir compte des prix auxquels les achats sont effectués. Même lors de retraits ponctuels des stocks d’urgence, un impact négatif peut survenir si ces opérations ne sont pas conduites selon des mécanismes de marché », souligne l’agence.
S’agissant de l’impact concret sur le marché, l’organisme n’anticipe cependant pas d’effet notable dans le nord de la Suède.
« Notre modèle de stockage de contingence repose sur un impact minimal sur le marché, y compris à l’échelle régionale. Le marché céréalier du nord de la Suède est de petite taille, et nous exercerons une vigilance accrue sur l’état de la concurrence », ajoute l’agence.

Naveen Athrappully est un journaliste qui couvre l'actualité économique et internationale
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