L’ancien patron de la DGSE évalue entre 100.000 et 200.000 le nombre d’émeutiers: «Rien de comparable ne s’est produit dans les villes françaises depuis la Révolution de 1789»

Par Etienne Fauchaire
13 juillet 2023 12:47 Mis à jour: 13 juillet 2023 18:55

Selon le ministère de l’Intérieur, le nombre d’émeutiers qui ont ravagé plusieurs villes de France suite à la mort de Nahel, s’élèverait entre 8000 et 12.000 personnes, parmi lesquelles 3500 suspects au total ont été interpellés depuis le 27 juin. Une évaluation bien en-deçà de celle donnée par Pierre Brochand, ex-directeur général de la DGSE, dans un entretien remarqué au Figaro Magazine. D’après le haut fonctionnaire, le nombre de protagonistes s’établirait plutôt entre 100.000 et 200.000 personnes, en « appliquant le ratio optimiste de 1% aux effectifs appréhendés chaque nuit ». Résumé.

Ancien directeur général de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) de 2002 à 2008, ainsi qu’ambassadeur de France, notamment en Hongrie et en Israël, Pierre Brochand a estimé dans une interview au Figaro magazine le 6 juillet que les émeutes ayant secoué l’hexagone pendant plusieurs jours sont l’aboutissement de décennies d’aveuglement et de propagande en faveur d’une immigration de peuplement. « Si nous en sommes arrivés là, c’est aussi, et peut-être surtout, en raison de l’idéologie dominante, qui a justifié et même glorifié, l’immigration de peuplement massive, subie depuis un demi-siècle. On ne saurait, en effet, expliquer les développements actuels, sans en revenir au changement de modèle de société, survenu dans les années 1970. À mon sens, tout part de là. »

Des émeutes dans les banlieues depuis 40 ans

Ce bouleversement sociétal s’est caractérisé par l’abandon de l’assimilation par idéologie, mais aussi par contrainte face à des flux migratoires devenus trop massifs. Cette société des individus, qui part du postulat que les êtres sont interchangeables et sans racines, a ainsi fait entrer par la fenêtre des identités collectives. Le choix de la politique d’« intégration » conduisant in fine à la « séparation », se sont constituées des diasporas d’individus « ni assimilés, ni intégrés, à tendance non coopérative, véritables poches du tiers-monde, où se développe une double dynamique de dissidence », dénonce l’ancien ambassadeur. En gonflant par le nombre et en constatant nos « compromissions et concessions », « autant d’aveux de faiblesse appelant à la transgression », les banlieues ont été le lieu pendant 40 ans d’émeutes isolées, avant de devenir collectives, comme le fut l’embrasement de 2005.

Loin de servir d’avertissement, la réponse politique s’est alors traduite par la « politique de la ville ». Près de vingt ans plus tard, les cités se sont à nouveau enflammées, laissant place à une « violence polymorphe à trois finalités » : « “métapolitique“ (contre tout ce qui représente la France et son État), utilitaire (pillages d’envergure), gratuite (vandalisme nihiliste). Mêmes auteurs quasi-exclusifs : les jeunes hommes de banlieue, où ils font régner la loi du plus fort. Même ressemblance apparente avec les flambées racialisées des “ghettos’’ américains. Même prédilection pour la nuit, à l’instar de toutes les guérillas du monde. Même cadre exclusivement urbain. »

Entre 100.000 et 200.000 émeutiers

Pierre Brochand tient à tordre le cou au « cliché rassurant de “l’infime minorité’’ » : « En terme d’amplitude, les statistiques officielles donnent à penser – aux historiens de le vérifier – que rien de comparable ne s’est produit dans les villes françaises depuis la Révolution de 1789 (…) Ces informations taisent le nombre de protagonistes, que l’on peut évaluer très approximativement entre 100.000 et 200.000 personnes (en appliquant le ratio optimiste de 1% aux effectifs appréhendés chaque nuit). »

Un fait nouveau à noter dans les violences urbaines de 2023 : leur propagation dans les très petites villes de province, « reflet inquiétant de la dissémination de l’immigration sur l’ensemble du territoire, parfois à l’instigation des pouvoirs publics », et également dans le centre des métropoles.

En revanche, l’ancien directeur de la DGSE écarte l’expression de guerre civile, employée ici et là, notamment en raison de l’adjectif « civile », qui lui paraît inapproprié : « D’une part, parce que les étrangers sont sans doute nombreux à s’activer, d’autre part, parce qu’au risque de choquer, je tiens les binationaux et ressortissants qui s’attaquent aux représentations de la France comme s’excluant de la communauté nationale. Sans compter que la grande majorité de la population, silencieuse et attentiste, reste absente, en position de simple spectateur. » Aussi, les termes les plus justes, selon lui, sont les suivants : « soulèvement ou révolte contre l’État national français, d’une partie significative de la jeunesse d’origine extra-européenne présente sur son territoire ».

« On ne dénoncera jamais assez ceux qui ont laissé s’installer la machine infernale »

Une catastrophe qui était prévisible, dont l’échéance a été repoussée pendant des décennies par les politiques, juges et journalistes au moyen d’incantations creuses et d’accusations de racisme, instrument de peur et de culpabilisation pour mettre au ban social quiconque se montre réfractaire à la xénophilie. « Le logos a fait long feu, à force d’incohérences : l’immigration n’existe pas ; elle a toujours existé ; elle n’a pas commencé ; c’est une fatalité, non pardon un devoir moral, non encore pardon un impératif économique ; il suffit d’y mettre les moyens ; de toute façon, ils sont déjà là ; on n’y peut plus rien ; ils sont français comme vous et moi, etc. L’ethos s’est pareillement ridiculisé au contact du réel : les injonctions au “vivre ensemble“ et à la “mixité sociale“, le refrain de la “riche diversité“, le “principe de fraternité“, cher au Conseil constitutionnel, sont devenus autant de vaines incantations ou même d’oxymores, motifs à ricanements. »

Est-il possible de récupérer les territoires perdus de la République ? Pour Pierre Brochand, non : « Il est vraiment très tard pour revenir sur des décennies d’abdications cumulées. C’est pourquoi on ne dénoncera jamais assez ceux qui ont laissé s’installer la machine infernale, en ont vu venir les conséquences potentielles, mais n’ont rien fait pour les éviter. » Pour autant, pas question de baisser les bras. En terme de solutions, rappelant la nécessité de sortir du carcan de « l’approche centriste », il propose de restreindre les flux migratoires, limiter l’accès à la nationalité et renforcer la politique pénale pour mettre fin au sentiment d’impunité : « Mais, par pitié, que l’on ne ressorte surtout pas du magasin des accessoires une relance de la politique de la ville », une réponse qui reviendrait à « récompenser la révolte ».

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