Le FBI en première ligne dans la lutte contre la guerre secrète du PCC

DÉCRYPTAGE

Par Eva Fu
2 septembre 2023 06:27 Mis à jour: 4 septembre 2023 10:26

Quarante officiers chinois, un sergent de la police de New York à la retraite, deux marines américains devenus espions, deux gardiens d’un poste de police chinois secret à New York… Les enquêtes du FBI sur l’ingérence chinoise aux États-Unis alimentent une liste qui ne cesse de s’allonger. L’agence américaine a en effet décidé de centrer ses efforts sur la lutte contre les opérations d’espionnage chinoises, qu’elle qualifie de « priorité absolue en matière de contre-espionnage ».

« Les cibles que nos adversaires visent en priorité sont nos actifs économiques : les informations que nous possédons, nos idées, là où nous innovons, notre recherche et développement, notre technologie », a déclaré un porte-parole du FBI à Epoch Times.

« Aucun pays ne représente une menace plus étendue et plus grave pour ces actifs que la Chine ».

Pour donner un ordre de grandeur, Christopher Wray, directeur du FBI, a déclaré en 2020 que la capacité « profonde, étendue et persistante » du Parti communiste chinois (PCC) à influencer les secteurs américains est telle que l’agence ouvre une nouvelle enquête en lien avec la Chine toutes les dix heures environ.

Selon Casey Fleming, PDG de BlackOps Partners Corporation, le PCC fera « tout pour affaiblir nos sociétés ».

L’objectif de la Chine, selon lui, est de « gagner la guerre sans avoir à livrer de bataille ».

La société de M. Fleming conseille les entreprises en matière de cybersécurité et de stratégies de contre-espionnage.

Casey Fleming, Chairman and CEO of the intelligence consulting firm, BlackOps Partners. (Samira Bouaou/The Epoch Times)
Casey Fleming, président-directeur général de la société de conseil en renseignement BlackOps Partners. (Samira Bouaou/Epoch Times)

« Le niveau d’espionnage, d’influence et de subversion du Parti communiste chinois dépasse l’entendement de la plupart des gens », a-t-il déclaré à Epoch Times.

Une « ligne rouge »

Pour M. Fleming, l’attention que le FBI porte aux menaces chinoises est un virage dans la politique américaine qui ne s’est accélérée qu’au cours des cinq dernières années environ.

Fin 2018, dans le cadre de ses nouvelles priorités en matière de lutte contre les menaces chinoises à l’encontre de la sécurité nationale des États-Unis, le Département américain de la justice, l’équivalent de notre Ministère de la justice, a lancé un nouveau plan stratégique appelé « China Initiative ». Sous la houlette du ministère, ces efforts ont permis de multiplier les poursuites touchant au vol de secrets commerciaux, que Pékin encourage et soutient, et de cibler les pirates informatiques, les espions chinois, ou toute autre personne s’étant rendu coupable d’avoir volé la propriété intellectuelle de ses employeurs américains pour le compte de la Chine.

En février 2018, lors d’une audition de la commission sénatoriale sur l’espionnage chinois, M. Wray, qui n’avait pris ses fonctions que six mois auparavant, a déclaré que Pékin représentait une menace « pour l’ensemble de la société ».

Christopher Wray, directeur du FBI. (Chip Somodevilla/Getty Images)

« Lorsque nous ouvrons des enquêtes sur l’espionnage économique, elles nous ramènent sans cesse à la Chine », avait-il déclaré aux législateurs.

Plusieurs mois plus tard, il qualifiait le régime chinois de « menace la plus étendue, la plus difficile et la plus importante à laquelle nous sommes confrontés en tant que pays ».

Selon M. Fleming, c’est à cette époque que le FBI a semblé tracer « une ligne rouge » avec la Chine.

« Par le passé, nos gouvernements se voilaient la face et se disaient qu’il ne s’agissait que de cas isolés », explique-t-il. Aujourd’hui, pourtant, les cas d’agents chinois opérant sur le sol américain sont devenus fréquents.

A Chinese military policeman stands guard in front of the U.S. embassy in Beijing on April 3, 2001. (Stephen Shaver/AFP via Getty Images)
Un policier militaire chinois monte la garde devant l’ambassade des États-Unis à Pékin, le 3 avril 2001. (Stephen Shaver/AFP via Getty Images)

Infiltration militaire

Wei Jinchao, quartier-maître de la marine, était conscient de la gravité de ses actes lorsqu’il s’est laissé approché par un agent des services de renseignement chinois, trois mois avant d’être naturalisé américain.

Le même mois, en février 2022, il avait confié à un autre marine qu’on lui avait « demandé d’espionner pour la RPC [République populaire de Chine] », selon des documents judiciaires.

Depuis lors et jusqu’à son arrestation début août, M. Wei, 22 ans, a transmis au régime chinois plus de 50 manuels techniques, ainsi que des photos et des vidéos contenant des détails sur les navires et les armes militaires de la marine américaine, selon l’acte d’accusation. Certains de ces documents révèlent les systèmes d’exploitation et les structures d’alimentation des navires d’assaut amphibies de la marine, les réparations effectuées sur les navires et leurs points faibles.

Au moins 10 des manuels qu’il a remis à son contact n’avaient jamais été vus auparavant par les services secrets chinois, selon les documents du tribunal. L’intermédiaire de Pékin a effectué au moins neuf paiements à destination de M. Wei et l’a même félicité d’avoir obtenu la nationalité américaine en mai dernier.

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Le porte-avions USS Enterprise (CVN 65) navigue dans l’océan Atlantique le 22 mars 2012. (Photo de l’U.S. Navy par le matelot Harry Andrew D. Gordon, spécialiste en communication)

Un autre marine de Californie, Zhao Wenheng, aurait empoché près de 15.000 dollars en échange de la vente de données militaires américaines sur une période encore plus longue.

John Jordan, ancien officier supérieur des services de renseignement de la marine américaine, explique que le PCC « veut vider les États-Unis » de l’intérieur. »

L’existence même de sociétés libres constitue une menace pour le régime du PCC, dit-il. Par conséquent, lutter contre son influence « va dans le sens de la survie même de notre système politique ».

M. Fleming estime qu’il est « totalement inadmissible » que des ressortissants étrangers tels que M. Wei fassent partie de l’armée américaine.

« Il n’aurait jamais dû être autorisé à faire partie de l’armée américaine, jamais », dit-il.

« Et surtout pas à un niveau qui lui permette de recueillir des renseignements et de les transmettre au Parti communiste chinois. C’est un autre exemple qui montre que notre gouvernement et notre armée doivent prendre conscience de la gravité de l’espionnage et de la guerre sans restriction menée par le PCC ».

Le Pentagone n’a pas répondu aux questions d’Epoch Times concernant sa politique de recrutement de ressortissants étrangers à des postes militaires sensibles.

Operators conduct bridge operations on the Wasp-class amphibious assault ship USS Bataan (LHD 5) in the Atlantic Ocean on Aug. 30, 2022. (U.S. Navy photo by Mass Communication Specialist 3rd Class Bradley Rickard)
Des opérateurs effectuent des opérations de pont sur le navire d’assaut amphibie de classe Wasp USS Bataan (LHD 5) dans l’océan Atlantique le 30 août 2022. (Photo de l’U.S. Navy par le spécialiste en communication de masse de 3e classe Bradley Rickard)

« Travail en coulisses »

L’affaire du marine sino-américain n’est l’un que des plus récents cas d’hostilité de la part de Pékin que les services de contre-espionnage du FBI aient eu à traiter.

Au cours des quatre derniers mois, le FBI a également engagé des poursuites contre deux hommes ayant cherché à corrompre un fonctionnaire du fisc. Ils espéraient convaincre cet agent infiltré d’aider le régime chinois à « renverser » le Falun Gong. Deux autres personnes ont été accusées de gérer une installation illégale de la police chinoise à Manhattan. Un homme de Boston est accusé d’espionner des militants américains pro-démocratie pour le compte de Pékin. Et enfin, 40 policiers chinois basés aux États-Unis ont été accusés d’avoir harcelé des résidents américains.

En juin, un tribunal de Brooklyn a condamné trois hommes, dont un sergent retraité de la police de New York, pour avoir harcelé une famille du New Jersey et fait pression sur elle pour qu’elle retourne en Chine. Ce procès a été le premier du genre à s’attaquer au programme de rapatriement forcé de la part des autorités communistes, connu en Chine sous le nom d’Opération « chasse au renards ».

(L–R) Zhu Yong, Zheng Congying, and former New York Police Department officer Michael McMahon were convicted in a case related to Operation Fox Hunt. (Cai Rong, Getty Images/The Epoch Times)
(De gauche à droite) Zhu Yong, Zheng Congying et Michael McMahon, ancien agent de la police de New York, ont été condamnés dans une affaire liée à l’opération Fox Hunt. (Cai Rong, Getty Images/Epoch Times)

Selon Marc Ruskin, qui a travaillé au FBI pendant 20 ans sur un certain nombre d’affaires de contre-espionnage, il se passe beaucoup de choses en coulisses avant qu’une affaire puisse être lancée.

Pour ouvrir une enquête préliminaire, le FBI doit fournir des motifs suffisants et désigner un agent chargé de l’affaire.

Faire appel à un agent infiltré est souvent la technique la plus efficace, mais c’est aussi la plus laborieuse et la plus coûteuse, explique M. Ruskin à Epoch Times.

« Vous avez besoin de toute une équipe et vous devez obtenir différents niveaux d’autorisation en fonction de la nature de l’affaire », dit-il.

Marc Ruskin, retired FBI Special Agent and author of "The Pretender." (Samira Bouaou/The Epoch Times)
Marc Ruskin, agent spécial du FBI à la retraite et auteur de « The Pretender ». (Samira Bouaou/Epoch Times)

Une proposition détaillant différents scénarios d’enquête et d’infiltration ainsi qu’une ventilation du budget doivent être approuvées avant l’ajout d’effectifs supplémentaires. L’autorisation est généralement renouvelée tous les six mois jusqu’à ce que l’opération soit terminée, jusqu’à ce que les procureurs disposent de suffisamment de preuves pour procéder à une arrestation.

Un exemple classique, selon M. Ruskin, est la récente affaire de tentative de corruption du fisc impliquant un agent du FBI s’étant fait passer pour un fonctionnaire des impôts.

Des documents judiciaires révèlent qu’un informateur a travaillé avec l’agent infiltré et l’a aidé à rentrer en contact avec deux suspects et a enregistré les conversations. Les deux hommes voulaient payer le faux agent du fisc pour qu’il ouvre une enquête contre une entité gérée par des pratiquants du Falun Gong, un groupe religieux violemment persécuté en Chine depuis 1999.

Les agents infiltrés essaient de « faire autant de rencontres que possible » avec les suspects, a déclaré M. Ruskin.

L’agent s’est vu remettre un acompte de 1000 dollars lors de la première rencontre, puis 4000 dollars la deuxième fois.

« De cette façon, il a deux rendez-vous au lieu d’un. Et vous pouvez obtenir deux fois plus de conversations et faire en sorte qu’il n’y ait plus aucun doute quant à l’objectif du pot-de-vin », explique M. Ruskin.

« Si vous ajoutez cela à l’appel téléphonique entre les deux accusés, intercepté par le FBI, et à l’apport de preuves complémentaires concernant le fonctionnaire de la RPC, vous avez un dossier solide. »

M. Ruskin y voit une affaire « très embarrassante » pour le régime chinois.

« Il n’y a aucun doute quant à la nature de l’attaque contre le Falun Gong », dit-il. Les agents chinois tentent d’entraver l’exercice des droits constitutionnels et la liberté de religion sur le sol américain, et en même temps ils essayent de « corrompre des fonctionnaires américains, ce qui est franchement scandaleux ».

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Le dirigeant chinois Xi Jinping passe devant des pratiquants du Falun Gong qui protestent contre la persécution des pratiquants du Falun Gong par le Parti communiste chinois, à New York, le 27 septembre 2015. (Larry Dye/Epoch Times)

M. Ruskin estime que les agents infiltrés font « les meilleurs témoins ».

« C’est le travail le plus précieux que le FBI puisse faire, car les témoins sont des agents du FBI », explique-t-il. « Ce n’est pas comme si on prenait quelqu’un dans la rue et qu’on en faisait un témoin, ou comme si on utilisait un informateur. »

La fiabilité d’un agent qualifié devant un tribunal est « incontestable », ajoute-il, et cela « ne laisse aucune marge de manœuvre à la RPC pour essayer de fournir une autre explication à ce qui s’est passé ».

« Cette affaire va être un succès retentissant pour celui qui en sera instruit. »

Le mode d’emploi de Pékin

Les tactiques du régime Chinois ne se limitent pas à un seul angle d’attaque, et ses cibles sont multiples.

Personne n’est à l’abri de l’influence du régime, qu’il s’agisse des législateurs, des entreprises, des universités ou du grand public. Le parti menace et harcèle régulièrement ceux qui le critique depuis l’étranger et exerce des pressions sur les hommes politiques des pays occidentaux dans le but de les amener à adopter des politiques qui conviennent davantage à la Chine. En outre, le PCC s’efforce d’obtenir des secrets commerciaux et des renseignements par le biais de généreux paiements ou de piratages informatiques.

Selon les estimations de la Commission sur le vol de la propriété intellectuelle aux États-Unis, le vol commercial parrainé par l’État chinois coûte aux États-Unis entre 225 et 600 milliards de dollars par an.

La Chine possède également l’une des plus grandes armées de pirates informatiques au monde. Selon les estimations de M. Wray, son programme de piratage informatique est « plus important que celui de tous les autres pays réunis », et les cyber-spécialistes chinois sont au moins 50 fois plus nombreux que leurs homologues américains.

L’opération « China Initiative » du ministère américain de la justice a conduit à l’inculpation d’une série de chercheurs accusés d’avoir dissimulé leurs liens avec des programmes de recrutement chinois parrainés par l’État communiste, connus sous le nom de « plans de talents », le plus connu d’entre eux étant Charles Lieber, ancien titulaire de la chaire de chimie de l’université Harvard.

Charles Lieber (C) takes part in a group photo in front of the WUT-Harvard Joint Nano Key Laboratory, in Wuhan, China, in 2012. (Department of Justice)
Charles Lieber (C) participe à une photo de groupe devant le WUT-Harvard Joint Nano Key Laboratory, à Wuhan, en Chine, en 2012. (Ministère de la justice)

M. Lieber a été condamné en avril à deux jours de prison et à deux ans de liberté surveillée pour six délits liés aux dizaines de milliers de dollars qu’il a reçus de la Chine alors qu’il travaillait sur des projets de recherche américains confidentiels.

Il avait également ouvert et codirigé un laboratoire commun de nanotechnologie à l’université technologique de Wuhan au nom de Harvard.

La répression par le FBI de la fraude aux visas – utilisée par des militaires chinois déguisés en étudiants aux États-Unis – associée à la fermeture du consulat chinois de Houston pour activités d’espionnage a poussé plus de 1000 chercheurs chinois liés à l’armée à quitter le pays, a déclaré en décembre 2020 John Charles Demers, qui était alors procureur général adjoint chargé de la sécurité nationale.

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Des personnes visitent le consulat chinois à Houston le 22 juillet 2020. (MARK FELIX/AFP /AFP via Getty Images)

Mais la « China Initiative » a été la cible de vives critiques de la part de ceux qui lui ont reproché son excès de zèle. L’opération était également considérée comme incitant à la discrimination anti-asiatique, une raison invoquée par le ministère de la justice pour mettre fin à l’initiative en février 2022. Matthew Olsen, le nouveau procureur général adjoint chargé de la sécurité nationale, a déclaré que le paysage des menaces du PCC exigeait une approche plus large.

Pour M. Fleming, la fermeture du programme a fait le jeu du régime chinois, qui alimente le récit de la haine asiatique.

En exagérant les méfaits de la discrimination via les médias sociaux et les médias grand public – avec l’aide de ses subordonnés ou de ceux qui sont induits en erreur par sa propagande – Pékin détourne les responsabilités et détourne l’attention de ses activités néfastes.

« Nous prenons lentement conscience de la véritable nature de cette menace », dit M. Fleming. « Il s’agit d’une guerre que nous n’avons jamais connue par le passé et dans laquelle nous devons devenir experts du jour au lendemain. »

Le porte-parole du FBI a déclaré que la Chine ciblait les entreprises, les institutions universitaires, les chercheurs, les législateurs et le grand public américains.

« Le gouvernement et le secteur privé doivent s’engager à travailler ensemble pour mieux comprendre et contrer la menace.

Le FBI a diffusé des annonces ciblées demandant aux Américains d’origine chinoise de se manifester s’ils ont été victimes du régime communiste.

« La violence serait acceptable »

Récemment, des chercheurs ont découvert plus de 100 postes de police chinois extralégaux dans 53 pays, dont au moins quatre aux États-Unis.

La révélation de l’existence d’une telle station à New York a conduit à l’arrestation de deux agents chinois présumés, l’un d’eux ayant, selon les procureurs, payé des personnes d’origine chinoise pour se déplacer par bus entiers et venir accueillir le dirigeant du régime chinois Xi Jinping en 2015 et pour contrer les manifestations de Falun Gong. L’homme a également été impliqué dans les efforts visant à forcer un présumé fugitif chinois à retourner en Chine, selon les documents déposés par le ministère de la justice.

« Le gouvernement chinois cherche à manipuler les systèmes politiques et économiques des États-Unis. En même temps, il essaye de faire appliquer son propre programme par les communautés locales du pays, faire avancer ses propres objectifs et faire valoir son autorité à l’intérieur de nos frontières », a déclaré le FBI dans un communiqué de presse.

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Lors de la visite du dirigeant chinois Xi Jinping aux États-Unis en 2015, des partisans du Parti communiste chinois ont harcelé ceux qui protestaient contre le Parti pour ses actions de confiscation de terres en obstruant leurs messages avec des drapeaux chinois, à New York le 26 septembre 2015. (Samira Bouaou/Epoch Times)

Xiong Yan, officier de l’armée américaine, a goûté de près à la campagne de répression du régime lors de sa candidature à un siège au Congrès américain à Long Island, dans l’État de New York, lors des élections de mi-mandat de 2022. Leader étudiant lors des manifestations de la place Tiananmen en 1989, M. Xiong a servi dans l’armée américaine pendant 27 ans et a été naturalisé américain.

« Battez-le. Battez-le jusqu’à ce qu’il ne puisse plus se présenter aux élections », avait déclaré un agent chinois présumé à un détective privé qu’il avait engagé pour faire échouer sa campagne.

Le complot a débuté en septembre 2021, peu après que M. Xiong a annoncé sa candidature, selon les documents des procureurs fédéraux. « Ce que nous voulons pour l’instant, c’est qu’il ne soit pas élu », avait lancé Lin Qiming, l’agent chinois présumé. « Quel que soit le prix à payer. Du moment que c’est faisable ».

M. Lin avait demandé au détective privé d’impliquer M. Xiong dans des affaires de prostitution, d’évasion fiscale et de pédopornographie. Il a suggéré d’engager une femme séduisante comme bénévole de campagne pour M. Xiong afin « [qu’elle ait] une relation avec lui ».

Lorsque le détective privé a demandé à être payé 40.000 dollars, M. Lin lui a répondu qu’il n’y avait « pas de problème » et que « l’argent n'[était] pas un problème. »

« Si vous ne trouvez rien sur lui après quelques semaines, est-il possible de fabriquer quelque chose ? », avait-il demandé lors d’un appel enregistré.

« En dernier ressort, la violence serait acceptable », avait-il dit plus tard dans un message vocal, et d’ajouter qu’ils pourraient utiliser des coups ou d’autres moyens pour infliger des dommages physiques, selon des documents du dossier.

« Réfléchissez-y. Un accident de voiture, [il] serait complètement détruit [petits rires], n’est-ce pas ? Je ne sais pas, hein, de toutes les façons possibles et sous tous les angles. Ou bien, le jour de l’élection, il ne peut pas s’y rendre lui-même, n’est-ce pas ? »

Xiong Yan (C), one of the 21 "most-wanted" Tiananmen Square protesters from 1989, speaks with local pro-democracy leaders in Hong Kong on May 31, 2009. (Samantha Sin/AFP via Getty Images)
Xiong Yan (C), l’un des 21 manifestants de la place Tiananmen les plus recherchés en 1989, s’entretient avec des dirigeants locaux pro-démocratie à Hong Kong le 31 mai 2009. (Samantha Sin/AFP via Getty Images)

Pendant des mois, M. Xiong n’a pas eu conscience de la machination qui se tramait autour de lui et il a été surpris de se retrouver à la une des journaux en mars dernier, alors qu’il rentrait aux États-Unis après un voyage à l’étranger.

Bien que furieux, il a trouvé ces efforts risibles.

« Je n’ai rien fait de mal pour me déshonorer et je n’ai donc aucune raison d’avoir peur », a-t-il déclaré à Epoch Times.

Mais avec le recul ces révélations lui ont permis de donner un sens à des choses qu’il n’avait pas comprises à l’époque. En novembre 2021, par exemple, il se souvient d’être parti tôt de sa maison de Long Island pour rejoindre un ami. Il était environ 3 heures du matin, mais alors qu’il s’apprêtait à partir, il a remarqué une voiture qui arrivait. Le conducteur semblait être une femme d’une quarantaine d’années et elle gardait la tête baissée.

« Ils me suivaient depuis tout ce temps », pense-t-il.

Quelques jours après que le ministère de la justice a porté plainte contre les auteurs présumés, M. Xiong a organisé une grande collecte de fonds pour sa campagne. Seul un tiers des plus de 500 invités attendus s’est présenté. L’un des invités qui ne s’est pas présenté a par la suite appelé la campagne de M. Xiong et a expliqué que le consulat chinois l’avait averti, ainsi que d’autres personnes, de ne pas faire de dons à sa campagne, de ne pas assister à ses événements et de ne pas voter pour lui, en leur disant que cela compromettrait leur capacité à faire des affaires en Chine.

« Ils ont eu peur », a déclaré M. Xiong. « Pas de moi – ce n’est pas qu’ils ne m’aimaient pas. Ce qu’ils craignaient, c’était que le PCC puisse les persécuter ».

Un climat de peur

Une des tactiques utilisées par le régime chinois pour contrôler la diaspora chinoise basée aux États-Unis et faire taire les voix défavorables est de prendre en otage les membres de sa famille, comme l’a expérimenté Rushan Abbas, une militante ouïghoure basée aux États-Unis.

Mme Abbas a beaucoup d’estime pour sa sœur basée à Urumqi, médecin à la retraite, qu’elle considère comme une figure maternelle depuis que leurs parents sont décédés. Mais elle a cessé de communiquer avec sa sœur en 2017, année où elle a fondé l’organisation à but non lucratif Campaign for Uyghurs, dans l’espoir de protéger sa plus proche parente des représailles des autorités chinoises.

Cela n’a pas servi à grand-chose. En septembre 2018, six jours après que Mme Abbas a parlé des mauvais traitements infligés aux Ouïghours à l’Institut Hudson, sa sœur a disparu, tout comme de nombreux membres de la belle-famille de Mme Abbas en Chine.

Ce n’est que deux ans plus tard que Mme Abbas a appris la condamnation de sa sœur à 20 ans de prison. Alors qu’elle faisait campagne pour la libération de sa sœur aux États-Unis, les médias d’État chinois l’ont attaquée, affirmant qu’elle avait volé des images d’Ouïghours pour fabriquer des histoires à dormir debout.

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La fondatrice et directrice exécutive de Campaign for Uyghurs, Rushan Abbas, tient une photo de sa sœur, Gulshan Abbas, qui est emprisonnée en Chine, lors d’une manifestation pour la liberté des Ouïghours, à New York, le 22 mars 2021. (TIMOTHY A. CLARY/AFP via Getty Images)

Selon Mme Abbas, le régime a sous-estimé sa force et sa volonté.

« Le PCC pensait pouvoir me réduire au silence. Mais ils ont échoué, et cela ne fait que me rendre plus forte, parce que je me bats plus fort », a-t-elle déclaré à Epoch Times, alors que l’emprisonnement de sa sœur approche de sa cinquième année.

Quelques jours après le premier témoignage de Mme Abbas au Congrès sur le sort de sa sœur en 2019, le site Internet de son organisation a été bloqué, un incident qu’elle a lié à des cyberattaques parrainées par l’État chinois.

Le Parti essaie de créer « un climat de peur, d’autocensure et d’hésitation au sein des groupes dissidents », a déclaré Mme Abbas.

Elle se félicite de l’attention croissante des États-Unis à l’égard des agents du PCC, mais estime qu’il faut faire davantage pour protéger les dissidents qui doivent faire face à « cette puissance géante ».

« Si on ne peut rien faire pour les personnes qui subissent un génocide à l’intérieur des frontières chinoises, ou pour les pratiquants de Falun Gong qui sont persécutés à l’intérieur des frontières chinoises, ou pour les Tibétains, ou pour les Hongkongais, au moins les gouvernements [occidentaux] peuvent-ils protéger les personnes qui, à l’extérieur de la Chine, sont toujours confrontées à la répression transnationale du PCC », a déclaré Mme Abbas.

People hold signs during a protest against the 2022 Beijing Winter Olympics over the Chinese regime's human rights crisis in Xinjiang, in Sausalito, Calif., on Feb. 3, 2022. (Justin Sullivan/Getty Images)
Des personnes brandissent des pancartes lors d’une manifestation contre les Jeux olympiques d’hiver de Pékin 2022, en raison de la crise des droits de l’homme du régime chinois au Xinjiang, à Sausalito (Californie), le 3 février 2022. (Justin Sullivan/Getty Images)

« Imposer des coûts réels »

Levi Browde, directeur exécutif du Falun Dafa Information Center (Centre d’information sur le Falun Dafa), basé à New York, estime que la multiplication des poursuites engagées par le ministère américain de la justice est de nature à faire réfléchir ceux qui soutiennent le régime.

« Toute arrestation par le FBI a un effet dissuasif », a-t-il déclaré à Epoch Times.

Tous ceux qui s’en prennent au Falun Gong et à d’autres dissidents à l’étranger « le font parce qu’ils seront mieux payés s’ils obtiennent des ‘victoires’ et qu’ils obtiendront des promotions s’ils obtiennent des ‘victoires' », a déclaré M. Browde.

Levi Browde, directeur exécutif du Centre d’information sur le Falun Dafa. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

En voyant d’autres personnes se faire arrêter par le FBI, les autres devraient se demander si l’argent et l’avancement de leur carrière valent la peine de se retrouver dans une prison américaine, dit-il.

M. Jordan, cité plus haut, estime que les États-Unis devraient commencer à mettre des « sanctions sur la table » et à « imposer des coûts réels au parti communiste chinois ».

« Cela ne s’arrêtera pas tant qu’il ne sera pas plus coûteux pour Pékin de continuer que d’arrêter », dit-il. « Parce qu’ils feront une analyse coût-bénéfice, c’est aussi simple que cela. »

M. Xiong a observé que les efforts des États-Unis ont permis de faire reculer de manière significative « l’arrogance » des agents pro-Pékin.

Dans le passé, les événements et les manifestations de la communauté chinoise pour protester contre les abus du régime attiraient de nombreux perturbateurs qui « accrochaient des drapeaux rouges tout autour ». Aujourd’hui, a-t-il ajouté, « ils n’osent plus être aussi voyants ».

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Des personnes marchent dans le quartier chinois de Washington le 16 novembre 2015. (Mark Wilson/Getty Images)

M. Fleming souhaite que le gouvernement américain consacre au moins dix fois plus de ressources à la lutte contre le PCC.

« Le niveau d’espionnage, d’influence et de subversion du Parti communiste chinois dépasse l’entendement de la plupart des gens », dit-il.

« C’est une lutte entre le communisme et la liberté. C’est cela qui est en jeu. »

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