«L’extrême droite n’a plus de limite» : la sortie de Jean-Luc Mélenchon contre le président du Crif fait scandale

Par Etienne Fauchaire
18 juillet 2023 06:00 Mis à jour: 18 juillet 2023 06:05

Lors de l’hommage aux Justes de France, le président du Crif s’est attaqué à Jean-Luc Mélenchon et son mouvement, qu’il accuse d’être «prêt à sacrifier la République sur l’autel du communautarisme». En réaction, l’ancien candidat à l’élection présidentielle a accusé le Crif d’être «d’extrême droite», déclenchant alors une virulente polémique à gauche, qui vient à nouveau semer la zizanie dans les rangs de la Nupes.

L’arroseur arrosé ? Régulièrement critiqué par les Français juifs de faire le jeu de l’islamo-gauchisme, le CRIF – Conseil représentatif des institutions juives de France – a été lui-même taxé d’être d’extrême droite par Jean-Luc Mélenchon dans un tweet publié dimanche 16 juillet : «Le président du CRIF utilise la cérémonie à la mémoire des victimes de la rafle des juifs par la police française pour me prendre à partie. Abject. L’extrême droite n’a plus de limite.»

Une charge qui se veut une réponse au discours prononcé par Yonathan Arfi à l’occasion de la Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites, hommage aux Justes, dans lequel le président de l’organisation juive a accusé le chef de file des Insoumis de se «compromettre loin du pacte républicain».

En effet, à ses yeux, les Insoumis seraient «prêts à sacrifier la République sur l’autel du communautarisme» : «Les porte-voix de La France insoumise font davantage partie du problème que de la solution», a-t-il asséné. Et d’enchainer : «En se nommant insoumis, ils prétendent incarner une forme de résistance mais de quelle résistance parle-t-on lorsque les insoumis sont incapables de s’affranchir des ordres de leur chef lorsqu’il se compromet loin du pacte républicain ?».

L’occasion pour le président du Crif de condamner par la même l’utilisation du mot «déportation» par la députée LFI Ersilia Soudais pour qualifier l’expulsion d’Israël vers la France de l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri.

«Pervers»

En réaction au tweet de Jean-Luc Mélenchon, la réponse de Yonathan Arfi ne s’est pas faite attendre : accuser le CRIF d’être d’extrême droite, alors qu’il a été «fondé dans la Résistance» et qu’il a inscrit la lutte contre l’extrême droite dans son «ADN profond», est «particulièrement pervers» et «grotesque», s’est-il indigné dans une déclaration à l’AFP.

«Un jour viendra, je l’espère, où les membres de LFI, au lieu de suivre Jean-Luc Mélenchon dans ses égarements en dehors du cadre républicain, sauront s’en émanciper et s’en affranchir. Ce serait le signe d’un parti républicain, mais aujourd’hui manifestement ce n’est pas le cas», a poursuivi Yonathan Arfi, qui a ensuite enfoncé le clou sur Twitter, en affirmant à propos de Jean-Luc Mélenchon : «en sortant du cadre républicain, qu’il le veuille ou non, il est l’allié objectif du RN».

Les propos de l’homme politique suscitent particulièrement l’émoi à gauche, le Crif étant par ses positions considéré à gauche et régulièrement accusé à droite d’aveuglement voire d’attentisme par des Français juifs sur les liens entre gauchisme et islamisme. Au premier chef, Me Gilles-William Goldnadel : «L’immense majorité des juifs français ne pardonnent pas aux notables du CRIF d’avoir favorisé cette immigration invasive, dont ils sont les premières victimes. Obsédés par le FN, ils ont laissé faire l’extrême gauche et les islamistes», écrivait par exemple sur Twitter l’avocat en octobre 2021 en réaction à l’hostilité du président du Crif d’alors, Francis Kalifat, à l’endroit d’Eric Zemmour.

La Nupes se divise

C’est pourquoi la critique de Jean-Luc Mélenchon vient à nouveau élargir les failles au sein de l’alliance de gauche, une partie de la Nupes choisissant de se désolidariser de l’ancien candidat à l’élection présidentielle. Devant la polémique, la présidente socialiste de la région Occitanie, Carole Delga, a aussitôt apporté son «soutien» à Yonathan Arfi : «Honteux, encore un peu plus en ce jour (de commémoration du) Vel d’Hiv. Qui connaît l’antiracisme sait que l’histoire du Crif et de l’UEJF est consubstantielle au combat contre le fascisme.» Pour la députée socialiste Valérie Rabault, Yonathan Arfi a «le droit d’exprimer, librement, ses opinions et de critiquer des responsables politiques sur leurs positions», jugeant «indécent» et «contraire à l’essence de la démocratie» que ces critiques conduisent Jean-Luc Mélenchon «à le taxer d’extrême droite».

Brièvement interrogée à ce sujet sur BFMTV ce lundi matin, la députée écologiste Sandrine Rousseau a tenu elle aussi à affirmer qu’elle «n’assimile pas le Crif à l’extrême droite, d’aucune manière».

Mais de son côté, le président du Parti socialiste, Olivier Faure, a, lui, souhaité calmer, et même condamner, la polémique : «Pendant que les français s’inquiètent de leur avenir, que l’extrême-droite s’approche dangereusement du pouvoir, toute polémique qui fracture le camp historique de la République est condamnable. Jean-Luc Mélenchon est un républicain. Yonathan Arfi n’est pas d’extrême droite», a-t-il temporisé.

Pas sûr que son message ait été entendu. Hors classe politique, l’écrivain Jacques Attali, figure historique du PS, a accusé Jean-Luc Mélenchon d’avoir «l’extrême droite en lui» : «En effet. Jean-Luc Mélenchon a raison : à le lire, on comprend que l’extrême droite n’a plus de limite. Elle est même, tristement, en lui.»

Au sein de la majorité présidentielle, sans surprise, les critiques vont aussi bon train. «Honte à vous», a lancé la présidente des députés Renaissance à l’Assemblée nationale Aurore Bergé à Jean-Luc Mélenchon. La députée des Yvelines a par ailleurs adressé «tout [son] soutien» au Crif et à son président «pour leur travail de mémoire et leur lutte acharnée contre l’antisémitisme». Le député macroniste David Amiel s’est quant à lui adressé directement à l’ancien candidat sur son compte Twitter : «Vous avez perdu tous vos repères, à commencer par l’élémentaire dignité.»

Les Insoumis restent fidèles

A contrario, les Insoumis épaulent en nombre l’instigateur de la Nupes. Aussi, interrogé sur LCI ce matin, le coordinateur de LFI Manuel Bompard n’a pas caché son agacement : «Voir que le président du Crif préfère adresser ses coups à La France insoumise… Nous n’avons pas de leçons à recevoir dans la lutte contre le racisme, contre l’antisémitisme». Le ton est plus virulent chez Alexis Corbière, député de Seine-Saint-Denis, qui juge «irresponsable» les accusations du président du Crif en direction de son mouvement. Même son de cloche du côté du député du Rhône Gabriel Amard : «Tout mon soutien à Jean-Luc Mélenchon. Les propos du président du CRIF sont totalement déplacés et honteux».

À droite, cette nouvelle sortie du leader d’extrême gauche a soulevé une condamnation unanime. «Un dérapage répugnant», a ainsi tonné la députée du Rassemblement nationale Laure Lavalette, déplorant que «même le 16 juillet, jour des commémorations de la rafle du Vel d’Hiv, Mélenchon ne peut pas s’en empêcher».

Si le terme «dérapage» est régulièrement employé pour qualifier les propos de Jean-Luc Mélenchon, le président de Reconquête Éric Zemmour a quant à lui assuré qu’il ne s’agissait pas d’un «dérapage», mais bien d’une «stratégie». À savoir : «devenir le candidat des musulmans coûte que coûte, quitte à flatter sans cesse l’antisémitisme des banlieues, quitte à justifier sans réserve les émeutes, quitte à qualifier d’extrême droite tout ce qui n’est pas d’extrême gauche.»

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