L’infiltration du PCC à l’étranger, un cauchemar pour la diaspora chinoise

Par Mary Hong
27 mars 2024 16:08 Mis à jour: 27 mars 2024 16:08

Le vol systématique de technologies occidentales par Pékin suscite une méfiance croissante à l’égard des ressortissants chinois au sein de la communauté internationale. Ces derniers sont de plus en plus considérés comme des alliés ou des agents potentiels du Parti communiste chinois (PCC) à l’étranger. La vigilance croissante des pays occidentaux à l’égard de l’influence du PCC sur leur territoire isole de plus en plus la communauté chinoise, amplifiant, à son tour, la méfiance des institutions occidentales à son égard.

L’un des facteurs explicatifs de cette méfiance est la coercition exercée par le PCC sur les Chinois, même après qu’ils ont quitté la Chine, à la recherche d’une nouvelle vie en Occident. Pour éviter les tactiques de manipulation du PCC et s’intégrer à la société occidentale, des analystes conseillent à la diaspora chinoise d’établir clairement leurs limites envers le PCC.

Une suspicion croissante

Il y a plus d’une décennie, de nombreux étudiants taïwanais étaient attirés par des études en Chine, qui leur permettaient d’être plus facilement admis dans les prestigieuses universités américaines, a déclaré Shen Jung-Chin, professeur associé à l’université York de Toronto, à l’édition chinoise d’Epoch Times.

À l’époque, le quota d’étudiants chinois [admis dans les universités américaines] était beaucoup plus élevé que celui des étudiants taïwanais, a expliqué M. Shen. « Cependant, la dynamique a changé depuis », déclare-t-il.

Depuis 2018, les étudiants chinois cherchant à étudier aux États-Unis rencontrent des niveaux de refus élevés pour obtenir un visa, en particulier lorsqu’ils étudient des domaines sensibles et de haute technologie. Cela leur pose de plus grands défis, explique M. Shen. « La suspicion croissante envers les étudiants et les universitaires chinois au service du PCC reflète des inquiétudes [de taille] quant au préjudice potentiel [qu’ils pourraient causer] aux intérêts américains », a-t-il déclaré.

Entre juin et septembre 2020, les États-Unis ont retiré le visa à plus de 1000 ressortissants chinois, dans le cadre d’une démarche visant les étudiants diplômés et les chercheurs soupçonnés d’avoir des liens avec l’armée chinoise, selon un rapport de Reuters.

Zhong Shan, ingénieur principal pour un réseau de communication dans la Silicon Valley, a déclaré à Epoch Times qu’il avait vécu une situation similaire lors de sa recherche d’emploi.

« Bien que j’aie reçu une offre d’une grande entreprise et que j’aie passé l’entretien initial avec succès, je n’ai pas pu commencer à travailler en raison de mes origines chinoises, qui m’ont empêché d’entrer sur le lieu de travail », a-t-il expliqué.

M. Zhong croit qu’il existe une discrimination déguisée selon laquelle les Chinois seraient autorisés à exercer des fonctions non essentielles, mais ne seraient pas autorisés à occuper des postes critiques, en raison de craintes quant à leur loyauté.

« Cette situation est sans aucun doute désavantageuse pour les Chinois. Le régime du PCC incite le monde occidental à rejeter totalement [ce qui vient de la Chine]. Si le PCC devait cesser d’exister, [la situation de la diaspora chinoise] serait sans doute bien meilleure », a-t-il déclaré.

M. Shen a également observé que les employés d’origine chinoise travaillant pour des entreprises occidentales se heurtent de plus en plus à un plafond de verre : une fois un certain niveau professionnel atteint, ils ont du mal à progresser.

« L’influence du PCC sur la diaspora chinoise a exacerbé la méfiance des pays d’accueil à leur égard », a-t-il déclaré.

Le vol dans le viseur

Au cours des dernières décennies, le PCC s’est engagé dans le vol systématique de technologies occidentales par le biais de trois grandes méthodes. L’une est par l’acquisition d’entreprises étrangères ou par la formation de coentreprises en échange d’un accès au marché contre de la technologie. L’autre est par le piratage informatique ou par l’espionnage économique. Et enfin, la troisième méthode – qui est la plus répandue – est l’exploitation de « zones grises » visant l’obtention de technologies par le biais de canaux tels que les établissements d’enseignement, les centres de recherche, les universitaires et les transactions commerciales, le tout exécuté main dans la main avec le gouvernement chinois.

Selon un rapport publié en 2020 par le Chinese Talent Program Tracker (Programme de recrutement des talents chinois, ndlt) du Center for Security and Emerging Technology (CSET, ou Centre pour la sécurité et la technologie émergente, ndlt) de Georgetown, au niveau national, la Chine gère environ 40 programmes de recrutement de talents visant à attirer des [ressortissants chinois accomplis] à l’étranger. Si l’on inclut les programmes régionaux, le nombre total est estimé à près de 300.

Le programme de recrutement des « Mille talents » (Thousand Talents Program), lancé en 2008, est le plus important, et cible les chercheurs et les universitaires d’universités américaines. Ce programme est chapeauté par un groupe de travail du PCC dédié au recrutement de talents de haut niveau à l’étranger.

Un rapport de l’Australian Strategic Policy Institute publié en août 2020 a révélé l’existence de 600 postes de recrutement de talents du PCC à l’étranger.

« J’ai vu trop de cas de ce genre, je ne veux pas donner d’exemples, cela offenserait les gens. Certains des cas rapportés publiquement sont déjà très effrayants », a déclaré M. Zhong à propos de la dynamique dans la Silicon Valley.

Selon M. Zhong, la Silicon Valley est une cible privilégiée. Les agents du PCC établissent spécifiquement des cabinets de chasseurs de têtes et de capital de risque ciblant les ingénieurs chinois dans la Silicon Valley. Cela permet à la fois le vol [de propriété intellectuelle] et le développement de ces technologies en Chine.

« Vous ne pouvez pas imaginer à quel point [ce système] est sophistiqué. En Chine, il existe des associations d’anciens étudiants de certaines universités américaines, telles que l’association d’anciens étudiants chinois de l’université de Californie à Berkeley (California Berkeley Chinese Alumni Association), mais qui n’est pas affiliée au programme officiel d’anciens étudiants de l’Université de Californie à Berkeley. De même, l’association d’anciens étudiants [de l’Institut] Cross-Strait de [l’université] Tsinghua (Cross-Strait Alumni Association) n’est pas affiliée à l’université Tsinghua de Taïwan. En fait, l’université Tsinghua de Taïwan a publié une déclaration précisant qu’elle n’avait aucun lien avec les associations d’anciens élèves du « Cross-Strait » (détroit entre la Chine continentale et Taïwan, ndlt) portant le nom du PCC », a-t-il déclaré.

M. Zhong a indiqué que le PCC avait également créé des sociétés de chasseurs de têtes dans le domaine de la technologie visant la communauté chinoise. Sur LinkedIn, il existe de nombreux comptes de chasseurs de têtes en langue chinoise ciblant spécifiquement la diaspora chinoise.

« Si vous ne voulez pas avoir affaire au PCC, n’écrivez pas en chinois simplifié sur LinkedIn », a-t-il déclaré. Les idéogrammes simplifiés sont généralement utilisés en Chine, alors que les caractères traditionnels sont employés à Taïwan et dans de nombreuses communautés d’outre-mer. Une fois ciblé, le PCC analysera de manière systématique tout potentiel d’exploitation des comptes ciblés et leurs détenteurs seront « invités à retourner en Chine pour étudier diverses opportunités », a-t-il averti.

Il a cité en exemple l’Association chinoise pour la science et la technologie (Chinese Association for Science and Technology), qui compte environ 20.000 membres. « Le PCC investit des sommes considérables pour offrir des prix de reconnaissance aux ressortissants chinois à l’étranger, par le biais de cette association. Une fois les prix décernés, ceux qui acceptent de retourner en Chine se voient offrir diverses opportunités. Il s’agit également d’une stratégie de vol de technologies à l’étranger », a-t-il déclaré.

Les nouvelles technologies introduites en Chine ont souvent besoin d’un financement par le biais de capital de risque afin de soutenir leurs premières phases de développement. Un grand nombre d’investisseurs chinois sont présents dans la Silicon Valley. M. Zhong qualifie ces investissements de « capitaux rouges », c’est-à-dire de fonds provenant de la Chine, dont une grande partie provient de « princes » du PCC, (c’est-à-dire de hauts-dignitaires et de leurs proches, ndlt). Une fois les « capitaux rouges » blanchis à l’étranger, ils reviennent [en Chine] sous forme d’investissements pour les start-ups technologiques, a-t-il déclaré.

Une grande partie de ces technologies ont déjà été certifiées à l’étranger et des dispositions ont été prises en Chine. « Si vous revenez en Chine pour créer une entreprise, tout – les fonds, les bureaux, l’environnement [financier et commercial], les diverses politiques de soutien – est déjà clairement défini. En outre, les opérations de chaque étape sont clairement définies », a-t-il déclaré, ajoutant que cette stratégie explique pourquoi la Chine produit tant d’innovations techniques.

Il a précisé que le vol [technologique] a cours depuis plus de 30 ans, sans avoir fléchi. « Il n’y a pratiquement pas de technologie d’intelligence artificielle authentique en Chine, tout est volé. Les scientifiques chinois s’approprient jusqu’à 40% des talents dans ce domaine », a-t-il déclaré.

Pendant longtemps, les gouvernements occidentaux ont espéré que la diaspora chinoise formée à l’étranger deviennent un moteur de changement en Chine. Au lieu de cela, le contrôle systématique exercé par le PCC [sur les Chinois à l’étranger] entrave leurs possibilités de développement en Occident.

À propos de ce phénomène, un internaute a fait remarquer que, tant qu’ils ont de la famille en Chine, les Chinois d’outre-mer deviennent des espions potentiels susceptibles de divulguer des informations à tout moment. Avec cette vulnérabilité à exploiter, une dose de nationalisme et des gains financiers miroités, peu d’individus demeurent indifférents à la coercition du PCC.

Selon M. Zhong, dès l’arrivée en sol étranger, il faut éviter de traiter avec le PCC et s’abstenir d’utiliser les médias sociaux en chinois simplifié – l’usage des caractères simplifiés peut être révélateur de liens avec le PCC.

Faire profil bas

« Il est préférable de demeurer discret. Vous pouvez discuter, mais évitez de trop vous investir dans les conversations et évitez de partager vos opinions personnelles. Une fois ciblé, vous aurez inévitablement à gérer de nombreuses relations complexes impliquant le département de Front Uni et les Affaires chinoises à l’étranger qui essaieront de vous séduire ou de vous manipuler », a-t-il conseillé.

De nombreux Chinois de haut niveau souhaitent vivre à l’étranger et jouir d’une vie meilleure, a-t-il ajouté. Toutefois, pour créer des entreprises et multiplier par 50 leur chiffre d’affaires en Chine, ils doivent lier leur destin au PCC, un chemin sans retour, a-t-il ajouté.

« Le positionnement d’une personne [à l’égard du PCC] détermine ses futures possibilités de développement », a-t-il déclaré.

À titre d’exemple, M. Zhong a cité le physicien Sir Charles Kao Kuen, lauréat du prix Nobel et personnalité très respectée, considéré comme un père fondateur dans le domaine de la fibre optique. « Kao Kuen n’a jamais négocié avec le PCC », a-t-il déclaré.

M. Shen reconnaît que toute forme d’implication devient une pente glissante. « Je connais des étudiants étrangers qui, au départ, ne voulaient pas participer aux activités politiques organisées par l’ambassade de Chine, mais ils ont fini par s’y rendre parce que des amis les y avaient invités. Si vous êtes sur la liste, ils vous inviteront à toutes les activités », a-t-il dit.

M. Shen cite également le cas d’un étudiant qui s’est lié involontairement au PCC, sous la menace d’une surveillance financière et autres représailles visant l’entreprise de ses parents en Chine.

Le moyen le plus efficace d’éradiquer le problème est de fixer des limites claires dès le départ, en refusant de se laisser entraîner par la PCC, affirme M. Shen.

« Une fois que vous êtes attiré, l’ambassade aura votre nom, votre dossier et vous contactera chaque fois que l’occasion se présentera. Peu à peu, ils vous considéreront comme l’un des leurs et, au fur et à mesure que vous vous enfoncez, votre lien avec le PCC se renforcera tandis que celui avec l’Occident s’affaiblira », a-t-il déclaré.

M. Shen invite les étudiants chinois à s’efforcer de s’intégrer davantage dans la société occidentale et d’éviter de s’engager excessivement dans les cercles chinois, car cela peut « limiter votre promotion et éveiller les soupçons ».

Song Tang et Yi Ru ont contribué à ce rapport.

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