Mansour Kamardine : « Les associations ont tout intérêt à faire venir le plus de migrants possibles en vue de percevoir le plus d’argent possible »

Par Etienne Fauchaire
13 février 2024 18:08 Mis à jour: 15 avril 2024 12:53

Depuis fin janvier, le département de Mayotte est paralysé par des blocages et des barrages routiers installés par des citoyens bien décidés à faire entendre leur colère face à l’immigration incontrôlée et l’insécurité rampante sur l’île, où des gangs de jeunes mafieux font régner la terreur jusque dans les écoles. Pour apaiser leur exaspération, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et la ministre déléguée aux Outre-mer Marie Guévenoux ont annoncé leur volonté de supprimer le droit du sol, mais aussi d’abandonner le visa territorialisé. Député Les Républicains mahorais, Mansour Kamardine revient sur ces déclarations et sur le rôle des associations d’aide aux migrants dans l’anarchie migratoire qui règne sur l’archipel.

Epoch Times : Quel est à vos yeux le bilan de l’opération Wuambushu et pouvez-vous nous dresser l’état de la situation dans votre département ?

Mansour Kamardine : Organisée à notre demande, la première opération Wuambushu avait vocation à endiguer le phénomène de bidonvillisation sur l’île, à inciter les populations étrangères en situation illégale à rentrer dans leur pays d’origine, et, enfin, à lutter contre les réseaux mafieux qui sévissent sur le territoire. Au départ, elle a été confrontée à quelques difficultés, puisque se sont dressés sur sa route des magistrats et des associations d’aide aux migrants financées par le contribuable. Toutefois, la détermination du ministre de l’intérieur Gérald Darmanin a fini par vaincre ces obstacles, permettant à cette opération de produire des résultats élogieux.

Mayotte a commencé à retrouver le sourire : ses habitants pouvaient à nouveau retrouver une activité sociale à la nuit tombée et la présence policière aux abords des établissements scolaires a même pu être allégée. Malheureusement, à la suite du déclenchement des émeutes urbaines au mois de juin dernier, l’opération a été interrompue car les forces de l’ordre déployées à Mayotte ont dû revenir sur le territoire hexagonal afin de renforcer les effectifs policiers. La nature ayant horreur du vide, les réseaux mafieux, qui n’avaient pas été complètement éradiqués, se sont pleinement reconstitués. Si bien qu’aujourd’hui nous connaissons un chaos encore plus important qu’à la période précédant le lancement de l’opération Wuambushu en avril dernier.

Pour répondre à la colère de la population, Gérald Darmanin a annoncé une révision constitutionnelle destinée à supprimer le droit du sol sur l’archipel. Réclamée depuis longtemps pour endiguer le flux migratoire sur l’île, cette mesure a tardé à être annoncée. Comment l’expliquez-vous ?

Le drame français, c’est le nombre d’années qui sépare le moment où une solution est imaginée pour résoudre un problème donné du moment où celle-ci est finalement mise en œuvre. En 2005, l’ancien ministre de l’Outre-Mer François Baroin et moi-même avions posé sur la table la question d’une remise en cause du droit du sol pour l’accessibilité à la nationalité française. En 2024, il est reconnu que cette solution se révèle nécessaire.

Cette proposition, je l’avais déjà formulée en 2018 au moment des débats parlementaires sur la loi Collomb. Le ministre de l’Intérieur de l’époque, Gérard Collomb, m’avait alors signifié que « j’avais raison, mais peut-être un peu tôt » et qu’il fallait donc « laisser mûrir le sujet ». Six ans plus tard, le gouvernement d’Emmanuel Macron reconnaît enfin que j’avais bel et bien raison. Si l’annonce de cette mesure de suppression du droit du sol pour Mayotte arrive tardivement, il n’est cependant jamais trop tard pour bien faire. Donc je m’en félicite.

Dans un éditorial, Yves Thréard, directeur adjoint de la rédaction du Figaro, demandait « pourquoi l’attribution de la nationalité serait un dû » aussi bien à Mayotte qu’en France. Estimez-vous nécessaire de supprimer le droit du sol sur l’ensemble du territoire français ?

Sur les bancs de la fac, on nous enseigne que la loi est l’expression de l’intérêt général et qu’elle s’applique à un territoire donné pour une population donnée à un moment donné. Au regard de cette définition et compte tenu de la situation migratoire sur l’ensemble du territoire national, on se rend bien compte que la situation de Mayotte n’est pas celle de Paris ou de Nantes par exemple. À Mayotte, 66% de la population est d’origine immigrée. Dans l’Hexagone, ce chiffre se situe aux alentours de 18%. Prenons d’abord en urgence les mesures adaptées à la situation mahoraise en examinant leur impact, et voyons ensuite quelles solutions adopter s’agissant du reste du territoire national.

En annonçant la fin du visa territorialisé, qui interdisait aux détenteurs d’un titre de séjour dans l’archipel de se déplacer sur le reste des territoires français, Gérald Darmanin a été accusé de vouloir transférer l’immigration à Mayotte vers la métropole. Comment analysez-vous ce risque ?

Plus des deux tiers de la population à Mayotte se compose de personnes d’origine étrangère, dont la moitié est ici en situation irrégulière. Et le flux d’arrivées ne tarit pas. La proposition que nous faisons part donc d’un bon sentiment en ce sens que la préfecture de Mayotte délivre des titres de séjour sans véritablement contrôler l’authenticité des documents.

Mayotte, c’est le territoire de la République qui brasse le plus de faux papiers. Les attestations fournies à l’appui des titres de séjour sont des faux dans 90% des cas. Aujourd’hui à la préfecture, aucun organisme n’assure la vérification de leur validité. Lorsque les maires demandent à être associés à l’instruction des dossiers, l’État leur rétorque qu’il s’agit d’une compétence régalienne et que les élus locaux ne peuvent donc y participer.

Si cette disposition est adoptée, je suis persuadé que le préfet détiendra plus de moyens pour contrôler la fausseté des documents, une procédure qu’il devrait être contraint de suivre pour éviter la délivrance ou le renouvellement de titres de séjours frauduleux, puisqu’il y aura un risque que le migrant puisse se rendre en métropole. En conséquence, bien des personnes officiellement en situation régulière ne le seront plus et pourront donc être reconduits dans leur pays d’origine, limitant par la même occasion le risque de migration vers la métropole.

Le 6 février, des manifestants se sont rassemblés devant les locaux de Solidarité Mayotte pour exiger sa fermeture, l’accusant de favoriser l’immigration clandestine. De quelle façon cette association contribue-t-elle à l’asphyxie migratoire de l’île ?

Il s’agit là d’une de ces belles fausses idées imaginées dans les bureaux feutrés des ministères. Avant 2018, le nombre d’immigrés en provenance des Grands Lacs africains était dérisoire. Quelques dizaines, tout au plus. Cependant, à partir de 2018, l’État a décidé d’organiser l’accueil des migrants à Mayotte, comme il le fait à Paris ou à Lyon, soutenant en ce sens la création d’associations comme solidarité Mayotte. Conséquence, de 2018 à aujourd’hui, le flux d’arrivées a été démultiplié.

Pourquoi ? La raison tient à ce que ces associations sont subventionnées à hauteur du nombre de migrants accueillis, donc elles ont tout intérêt à faire venir le plus de de migrants possibles en vue de percevoir le plus d’argent possible. C’est pourquoi aujourd’hui, dans l’Afrique des Grands Lacs, tout le monde connait Solidarité Mayotte. On a ainsi vu plusieurs réseaux de migrants se constituer en vue d’acheminer des migrants à Mayotte.

Par exemple, en Tanzanie, il en existe trois tenus par des Comoriens, dont l’un d’entre eux se trouve au sein même de l’ambassade des Comores du pays ! Depuis la Tanzanie, des migrants sont transportés à bord d’un grand paquebot jusqu’au large des Comores, à 70 km de Mayotte, avant d’être transférés sur des kwassa-kwassa pour débarquer sur l’île. À peine ont-ils touché terre que ces migrants, qui ont tous le numéro de Solidarité Mayotte, crient « asile, asile, asile » sans qu’ils ne comprennent nécessairement ce que cette notion signifie, puisque beaucoup d’entre eux ne connaissent pas le français. Si l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) étudie leur demande, ils deviennent ensuite inexpulsables du fait de la législation en vigueur. En plus des 200.000 Comoriens, nous recensons aujourd’hui plus de 2000 migrants venus d’Afrique continentale.

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.