Le Mile End : rencontre avec ses amoureux fous

septembre 21, 2016 19:21, Last Updated: octobre 4, 2016 4:10
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Le Mile End est un quartier bien particulier, où les habitants forment « une communauté pas juste tricotée serrée mais crochetée serrée », remarque la fée Patsy Van Roost. Hé oui, le Mile End n’est pas un quartier comme les autres : il a même une fée ! Dès qu’Epoch Times l’a contactée, elle a organisé tout spécialement une petite rencontre à laquelle une quinzaine d’amoureux fous du Mile End se sont joints.

C’est Montréal en miniature, avec tout ce qu’il y a de meilleur.

– Ousmane Fall

Tous ces amoureux, qu’ils y habitent depuis quelques mois ou depuis des dizaines d’années, s’entendent pour dire que le Mile End est comme un village dans Montréal. « C’est Montréal en miniature, avec tout ce qu’il y a de meilleur », reconnaît Ousmane Fall, arrivé en 1990 avec ses trois enfants qui ne sont, selon ses dires, jamais sortis du quartier. « Je n’ai pas choisi le Mile End. C’est le Mile End qui m’a absorbé », ajoute-t-il, faisant rire toute l’assemblée. « Le Mile End, c’est mon cœur, c’est là que je suis devenue mère », ajoute Patsy Van Roost.

L’un des secrets du Mile End ? Les cafés ! Par exemple, l’organisatrice de la soirée a demandé au patron du Dépanneur Café si c’était possible d’emprunter son café pour cette rencontre avec les journalistes d’Epoch Times. La réponse a été oui tout de suite, et le patron a accepté de fermer le Dépanneur Café quelques heures plus tard que d’habitude spécialement pour le groupe, sans qu’il soit même question d’argent.

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Des institutions comme le Café Olimpico ou le Café Club Social, qui existent depuis des décennies, sont les organes du quartier. « Beaucoup de gens vont dire du Café Olimpico : c’est mon salon, c’est l’annexe à la maison. On peut même aller au café en pyjama », soutient Mirabelle Ricard. Par exemple, au lieu d’écouter le hockey chacun chez soi, les habitants du Mile End se réunissent dans les cafés pour voir les parties. Au Club Social, il y a même des tables où l’usage des ordinateurs est interdit pour faciliter les rencontres humaines.

Le Mile End est un quartier où il est possible de s’habiller comme vous en avez envie, souligne Guillaume Salmon, aussitôt approuvé par des rires qui en disent long sur la question. Selon ce père de famille célibataire, l’inconvénient majeur du quartier est que de moins en moins de jeunes femmes célibataires y habitent, résultat de l’embourgeoisement.

Pandore Hobby, qui participe à la soirée tout en crochetant, travaille au centre-ville. Si elle y croise quelqu’un du Mile End, même si elle ne le connaît pas beaucoup et qu’il est de l’autre côté de la rue, ils vont se saluer « joyeusement, intensément », raconte-t-elle avec de grands gestes expressifs qui suscitent l’approbation de l’assemblée.

Le Club Social est une des « institutions » du Mile End. (Nathalie Dieul/Epoch Times)

Design urbain

En matière d’urbanisme, plusieurs remarquent que le Mile End correspond encore exactement au modèle de design urbain à échelle humaine que les urbanistes essaient de reproduire. Tout est organisé pour être à proximité, avec des magasins en bas et des appartements au-dessus. Cette structure, avec ses ruelles et ses balcons, permet à la communauté de bien vivre, de rencontrer facilement ses voisins.

D’ailleurs, parmi les amoureux du quartier présents, presque tous se déplacent principalement à pied ou à vélo et seulement deux personnes ont leur permis de conduire, dont l’une est apprentie depuis 12 ans.

Il est par contre parfois difficile pour un Milendois d’aller d’un point A à un point B rapidement, même si la distance est courte, remarque Patrick Saad : il y rencontre à chaque coin de rue des gens qu’il connaît et avec qui discuter !

Sécurité et entraide

L’un des aspects qui ressort à plusieurs reprises lors de la soirée, c’est le sentiment de sécurité que le Mile End inspire. « Comme mère, aucune inquiétude. Avant, je vivais à Westmount, j’avais peur de sortir le soir. Il n’y a personne dans les rues », remarque Kate Herzberg, arrivée il y a cinq ans dans le quartier avec ses trois filles. Celles-ci veulent déjà y rester toute leur vie.

« Je remercie beaucoup les bagels shops, les cafés et restaurants ouverts très tard, parfois 24 h. Ça crée une circulation constante, avec de la lumière », ajoute Marilyn Berzan-Montblanch, qui habite dans le Mile End depuis 40 ans. Quant à la fée Patsy, elle s’interroge : « Je fais des projets d’art où je suis amenée à entrer chez des gens que je ne connais pas. J’entre dans la chambre à coucher des gens. Où est-ce que je pourrais faire ça à Montréal ? »

La sécurité passe aussi par l’entraide : la communauté aide les vieilles dames portugaises, italiennes, chinoises, même si celles-ci ne parlent ni français ni anglais. Ainsi, Mirabelle Ricard pellette parfois l’entrée de sa voisine chinoise qui a 90 ans, ou bien elle aide la dame portugaise en faisant ses commissions quand ce n’est pas d’autres voisins qui le font. Lorsqu’elle passe à vélo, elle dit bonjour à l’une ou l’autre de ses voisines âgées : « Je dis trois mots d’italien, elle dit trois mots de français. On s’envoie la main comme ça depuis des années et des années. Elle est sur son balcon, elle est contente et c’est sympathique. »

(Lilia Luna/Epoch Times)

Les Milendois s’entraident aussi en ne jetant pas les choses : ils les donnent. Il y a les boîtes à livres, d’autres pour les objets divers à donner. Ou encore, ils mettent une boîte de carton en bas de leur escalier avec une note : à donner, fonctionne encore, pas de puces.

Un paradis en péril ?

Ici, comme dans les autres quartiers centraux de Montréal, l’embourgeoisement met en péril toute cette belle mixité sociale qui fait du Mile End ce qu’il est. Le côté un peu bohème de ce coin de Montréal risque de se faire évincer par cet embourgeoisement si les artistes ne peuvent plus se permettre de payer les loyers en constante augmentation.

« Moi, le quartier, sans Mira, sans Patsy, ça ne m’intéresse pas ! », souligne Marie Sterlin, qui travaille sur un documentaire au sujet de l’embourgeoisement depuis deux ans. Le Mile End fait même maintenant partie du circuit touristique, avec des autobus entiers de touristes qui y débarquent, ce qui dérange les habitants.

Quoi qu’il en soit, les Milendois qui habitent depuis longtemps dans le quartier et qui en sont amoureux fous sont attachés à leur vie de village. « Aussitôt qu’on revient au Mile End après en être sorti pour un moment, c’est un soulagement », résume Marilyn Berzan-Montblanch.

 

 

 

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