SCIENCE

Nos os sont plus fragiles que ceux de nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, voici comment y remédier

décembre 8, 2018 14:46, Last Updated: avril 13, 2019 12:36
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La technologie ne cesse d’évoluer pour nous rendre la vie toujours « plus facile », plus efficace et, souvent, plus sédentaire. Tout cela a un impact sur notre corps et, en particulier, sur nos os.

La perte de solidité osseuse est l’un des risques liés à la sédentarité les moins évoqués. Pourtant, c’est sans doute l’un des plus importants. En effet, une femme sur trois et un homme sur cinq risque d’être un jour victime de fractures liées à l’ostéoporose. Il existe notamment une relation directe entre le manque d’œstrogènes après la ménopause et le développement de l’ostéoporose.

Nos sociétés sont plus sédentaires que jamais. L’utilisation de moyens de transport motorisés, de vélos à assistance électrique, ou le fait de commander notre épicerie hebdomadaire en ligne et de se la faire confortablement livrer à domicile sont autant d’obstacles au maintien d’une activité physique. Les enfants, en particulier, sont moins actifs – les jeux vidéo remplacent les jeux en plein air à un moment crucial de leur développement, alors que l’exercice (surtout les sauts) peut, en six mois, optimiser les gains de solidité osseuse jusqu’à 5,5 %.

La recherche démontre que ce que l’on appelle les « souvenirs épigénétiques » pourraient peut-être se transmettre de génération en génération. Ce qui signifie que notre mode de vie actuel pourrait influencer l’expression des gènes des générations futures. Si ces tendances sédentaires se poursuivent, les humains risquent de devenir plus fragiles et plus dépendants. Ils auraient de ce fait besoin d’un soutien accru de la part de services de santé déjà surchargés.

Que dit la science ?

Notre squelette joue plusieurs rôles : il soutient notre corps, fournit des points d’attache pour les muscles, les tendons et les ligaments qui lui permettent de bouger, et stocke des minéraux comme le calcium et le phosphore. Cependant, lorsque les forces et les exigences externes qui s’exercent sur notre corps disparaissent, nos muscles se dégradent, et nos os deviennent plus légers, moins denses et moins « utiles », ce qui augmente le risque d’ostéoporose et de fracture.

Passer un mois au lit peut par exemple se traduire par une perte d’environ 3 % de l’os cortical de la jambe. Lors d’une mission typique de 120 à 180 jours dans l’espace, les os des astronautes peuvent perdre plus de 10 % de leur solidité. Ceci est dû à l’absence de charge sur leur squelette dans un environnement en microgravité.

Les recherches que nous menons révèlent que, chez les adultes d’âge mûr, la sédentarité est impliquée dans le risque de réduction de la solidité osseuse. La réduction de l’activité physique qui survient après la retraite et le fait de rester assis durant des périodes prolongées, en sont les principaux facteurs responsables, car ils éliminent les stimuli fonctionnels reçus par les os. C’est également le cas lorsque nous laissons la robotique et les machines prendre en charge les tâches que nous avions l’habitude de faire par nous-mêmes.

Lorsque l’os est « chargé », c’est-à-dire soumis à diverses forces, il réagit en devenant plus fort. Ceci a été attesté par de nombreuses études portant sur les conséquences d’exercices physiques. Autres preuves : des recherches ont démontré que la résistance osseuse d’athlètes pratiquant des sports « d’impact » – tels que le football, le hockey et la course – est de 20 à 30 % supérieure à celle de non-athlètes.

Au fil des âges

L’analyse d’os anciens, vieux de centaines ou de milliers d’années, suggère non seulement que notre squelette est aujourd’hui plus fragile que celui de nos ancêtres, mais aussi que ces différences sont devenues plus prononcées à partir du moment où les humains ont commencé à cultiver leur nourriture, en domestiquant animaux et plantes.

Avant cette époque, les humains se nourrissaient de plantes sauvages et chassaient les animaux. Ils étaient beaucoup plus actifs que leurs descendants fermiers, mangeaient de la viande plus maigre et passaient le plus clair de leur temps « en mouvement ». Des recherches ont démontré que leur masse osseuse était alors environ 20 % plus importante. Des coupes transversales ont révélé que l’avènement de l’agriculture a également eu pour conséquences une diminution de la taille de l’os de la jambe et des changements dans sa forme. Ces modifications sont le reflet des changements de charge sur le squelette qui ont résulté de la transformation des activités des individus.

La science suggère également que la résistance mécanique osseuse des bras des femmes préhistoriques du Néolithique (environ 6000 – 2200 avant notre ère), de l’Âge du bronze (environ 2200 – 800 avant notre ère) et de l’Âge du fer (environ 800 avant notre ère – fin du premier siècle de notre ère) était environ 5 à 10 % plus élevée que celle des athlètes féminines modernes, ce qui indique une importante utilisation de leurs bras durant des activités spécifiques. Ce constat suggère que les êtres humains modernes ne sont pas à l’optimum de leur potentiel de résistance osseuse.

Ce que vous pouvez faire

Des exercices simples et des modifications de style de vie destinés à mimer les activités d’un chasseur-cueilleur permettent de renforcer les os. Les exercices fractionnés et les sports nécessitant des sprints rapides, comme le football, peuvent y aider, tout comme l’haltérophilie. Mais il n’est pas forcément nécessaire de se rendre à la salle de sport pour y parvenir.

Des modifications d’habitudes simples peuvent faire l’affaire : l’utilisation d’un sac à dos durant les promenades ou le shopping peut par exemple augmenter la charge sur la colonne vertébrale. Faites vos courses vous-même le plus souvent possible, portez vos sacs à provisions afin de charger les muscles de vos bras et de votre dos – ainsi que, indirectement, vos jambes (et donc tous les os connexes).

Si vous avez un chien, marchez avec lui plus souvent et sur de plus longues distances. Garez votre voiture plus loin de votre travail ou du centre commercial, marchez régulièrement durant vos pauses, au travail et à la maison, organisez des randonnées ou pratiquez la marche « sociale », en famille et entre amis. Essayez d’utiliser les escaliers plutôt que les escalators ou les ascenseurs, et tâchez de monter les marches deux à deux, pour faire travailler vos grands glutéaux et vos quadriceps tout en chargeant les os situés à l’articulation de vos hanches.

Jardiner régulièrement, entretenir un potager ou un jardin communautaire peut procurer des avantages similaires, tout comme la pratique vigoureuse des travaux ménagers. Et si vous avez un poêle à bois, le fait de couper vos propres bûches imite en quelque sorte la façon dont nos ancêtres préparaient les carcasses des animaux qu’ils tuaient, ainsi que les matériaux de construction qu’ils utilisaient pour leurs abris.

Ces petits changements peuvent aider à renforcer la solidité des os, ce qui est d’une importance vitale. En effet, on estimait en 2010 que 158 millions de personnes âgées de 50 ans et plus présentaient un risque élevé de fracture ostéoporotique. Ce chiffre devrait doubler d’ici à 2040. Si l’allongement de l’espérance de vie peut expliquer partiellement cette situation, une composante importante du problème réside dans des habitudes de vie défavorables à la solidité et à la bonne santé des os.

Karen Hind, Assistant Professor in Sport and Exercise Sciences & Fellow of the Wolfson Research Institute for Health and Wellbeing, Durham University et Charlotte Roberts, Professor of Archaeology specialising in bioarchaeology (human remains), Durham University

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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