Pêche de loisir : vous allez être obligé de déclarer vos merlus, bars, thons rouges et dorades dès 2026

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Photo: Spencer Platt/Getty Images
À compter du 10 janvier 2026, les pêcheurs de loisir français devront obligatoirement déclarer toute capture de merlus, de bars, de thons rouges et de certaines espèces de dorades aux autorités maritimes. Cette nouvelle réglementation transpose en droit français un règlement européen adopté en novembre 2023, visant à renforcer la gestion durable des ressources halieutiques.
Le ministère de la Transition écologique a confirmé vendredi 19 septembre cette information révélée par Ouest-France, précisant que cette obligation s’appliquera aux « pêcheurs récréatifs français » tandis que les professionnels de la pêche sont déjà soumis à cette contrainte déclarative.
Un projet d’arrêté en consultation publique
Un « projet d’arrêté précisant les conditions d’exercice de la pêche de loisir dans le domaine maritime » est actuellement soumis à consultation publique jusqu’au 2 octobre. Ce texte réglementaire transpose les dispositions du règlement européen de novembre 2023 et définit précisément le cadre d’application de ces nouvelles obligations.
L’article 55 du règlement européen prévoit qu’à compter du 10 janvier 2026, les pêcheurs de 16 ans et plus souhaitant capturer des espèces soumises à des mesures de gestion européennes devront se conformer à ces nouvelles exigences.
Le projet d’arrêté délimite géographiquement les zones concernées en fonction des espèces : la Manche et l’Atlantique pour le lieu jaune (également appelé merlu ou colin) et le bar européen ; la Manche, l’Atlantique et la Méditerranée pour le thon rouge et la dorade rose ; la Méditerranée exclusivement pour la dorade coryphène.
Une liste évolutive d’espèces protégées
Cette première liste d’espèces soumises à déclaration obligatoire est « de nature à s’étoffer » avec d’autres poissons, en fonction de l’évolution des populations halieutiques et des recommandations scientifiques. Le ministère précise que cette approche progressive permettra d’adapter la réglementation aux enjeux de conservation spécifiques à chaque espèce.
« La meilleure connaissance du secteur de la pêche de loisir en mer est un enjeu essentiel, qu’il s’agisse de documenter la population des pêcheurs concernés et les prélèvements des stocks de poissons », explique le ministère de la Transition écologique. L’objectif affiché est de « renforcer l’exploitation durable des ressources » marines françaises.
Des modalités techniques à préciser
La consultation publique doit être suivie d’un arrêté définitif pris par le prochain gouvernement, a indiqué le ministère à l’AFP. Les modalités pratiques de cette déclaration en ligne restent à définir, notamment concernant les délais de déclaration, les informations à fournir et les sanctions en cas de non-respect.
Les autorités compétentes devront également mettre en place les systèmes informatiques nécessaires pour recevoir et traiter ces déclarations, représentant un défi technique et logistique considérable compte tenu du nombre de pêcheurs concernés.
Un demi-million de pêcheurs potentiellement concernés
Selon les statistiques de l’observatoire FranceAgriMer datant de 2017, environ un demi-million de personnes pratiquent la pêche depuis une embarcation en France. Parmi eux, approximativement la moitié sont qualifiés de « pêcheurs récréatifs » qui « possèdent un bateau pour se livrer à la pêche en mer ».
Cette population de pêcheurs de loisir représente donc un enjeu majeur pour l’efficacité de ce nouveau dispositif de déclaration, nécessitant une importante campagne d’information et de sensibilisation pour garantir son respect.
Des espèces sous pression halieutique
Les espèces visées par cette réglementation font l’objet d’une attention particulière des scientifiques en raison de leur situation préoccupante. Le lieu jaune, très apprécié des consommateurs français, est une espèce protégée pour laquelle les experts scientifiques souhaiteraient l’instauration d’un moratoire face à l’effondrement documenté des populations.
Le thon rouge, l’un des poissons les plus convoités de Méditerranée, a subi des années de surpêche intensive à la fin du siècle dernier. L’établissement de quotas stricts dans les années 2000 commence heureusement à produire des effets positifs sur le renouvellement des stocks, justifiant un encadrement renforcé.
La dorade rose, qui a fait l’objet d’une pêche intensive durant les années 1980, demeure soumise à des quotas de pêche rigoureux. En revanche, la dorade coryphène (également appelée mahi-mahi) bénéficie d’une relative protection naturelle grâce à sa croissance très rapide, limitant les risques de surexploitation.
Un alignement sur les pratiques professionnelles
Cette nouvelle obligation aligne les pratiques déclaratives entre pêcheurs professionnels et de loisir. Les premiers sont déjà tenus de déclarer leurs captures dans le cadre de la politique commune de la pêche européenne, permettant un suivi statistique précis des prélèvements commerciaux.
L’extension de cette obligation aux pêcheurs de loisir répond à une demande ancienne des scientifiques, qui soulignaient le manque de données fiables sur les captures récréatives pour évaluer correctement l’état des stocks halieutiques.
Enjeux de conservation marine
Cette réglementation s’inscrit dans la stratégie européenne de préservation des ressources marines et de mise en œuvre de la politique commune de la pêche. Elle répond aux objectifs de gestion durable des stocks fixés par l’Union européenne, visant à maintenir les populations de poissons à des niveaux permettant un rendement maximal durable.
Les données collectées permettront aux scientifiques d’affiner leurs modèles d’évaluation des stocks et d’adapter les mesures de gestion en fonction de la pression de pêche réelle exercée sur chaque espèce. Cette approche scientifique constitue un préalable indispensable à toute politique de conservation efficace.
Défis de mise en œuvre
Le succès de ce dispositif dépendra largement de l’adhésion des pêcheurs de loisir et de la simplicité du système déclaratif mis en place. Les autorités devront veiller à proposer une interface utilisateur intuitive et des procédures allégées pour éviter tout risque de contournement ou de négligence.
La sensibilisation des pêcheurs aux enjeux de conservation constitue également un défi majeur, nécessitant une communication pédagogique sur l’importance de ces déclarations pour la préservation des ressources halieutiques françaises.

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