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Opinion

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Les puissances étrangères contrôlent-elles les débats et les manifestations dans la rue en Europe ?

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À La Haye, des manifestants ont incendié un véhicule de police le 20 septembre 2025.

Photo: Josh Walet / ANP / AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 9 Min.

Une question se pose : les utilisateurs des réseaux sociaux peuvent-ils détecter le « cancer » des fake news qui incitent à la violence ?
Depuis l’assassinat de l’influenceur conservateur Charlie Kirk, les analystes américains en matière de sécurité ont constaté une augmentation de la désinformation sur les réseaux sociaux, derrière laquelle ils soupçonnent des acteurs russes, — qui non seulement propagent de fausses informations sur le meurtre de Charlie Kirk, mais semblent aussi viser à provoquer encore davantage l’indignation d’utilisateurs déjà politiquement polarisés.
Cette conclusion américaine s’applique-t-elle également à l’Europe ? Comment lutter contre les deepfakes et les bots ?
La chaîne privée américaine ABC News a fait état de ce phénomène le 17 septembre ; le lendemain, la station publique NPR publiait un article similaire sous le titre : « Des influenceurs étrangers font tout pour déformer l’assassinat de Charlie Kirk ».
« Nous avons des bots [programmes informatiques] qui imitent le comportement humain, venant de Russie, de Chine et du monde entier, qui cherchent à diffuser de la désinformation et à inciter à la violence », a rapporté NPR en citant le gouverneur de l’Utah, Spencer Cox, lors d’une prise de parole devant la presse après la mort de M. Kirk.

Internet rend « accro à l’indignation »

Ce n’est pas la première fois que le gouverneur de l’Utah alerte sur les risques des réseaux sociaux. En juin, il avait intenté un recours contre Snapchat, Meta et TikTok, dénonçant notamment leur influence sur les enfants et les adolescents.
Qualifiant les dangers des réseaux sociaux, de « cancer de notre société », il a déclaré « ne pas pouvoir assez insister sur les dommages que les réseaux sociaux et l’Internet nous causent à tous. »
« Ces poussées de dopamine, ces entreprises — avec une capitalisation boursière de milliers de milliards, les plus puissantes de l’histoire — ont trouvé comment pirater notre cerveau, nous rendre accros à l’indignation […] et nous pousser à nous détester », a déclaré M. Cox le 14 septembre dans l’émission Meet the Press sur NBC.

La violence pourrait « déborder » en Europe

Les médias américains se fondent, pour évoquer une ingérence russe, notamment sur les analyses du Center for Internet Security (CIS). Le centre affirme avoir identifié « des signes clairs de manipulation étrangère » contribuant à l’augmentation perçue de la violence politique aux États-Unis.
Selon le CIS, de nombreux messages en ligne pourraient être « attribués à des groupes soutenus par la Russie, dont la campagne d’influence pro-russe connue sous le nom d’Operation Overload ».
« Une grande partie des contenus semblait viser les conservateurs et des publics LGBTQ+, en utilisant de faux articles ou reportages, des citations inventées de personnalités et des images trompeuses pour susciter l’indignation politique », explique le CIS sur son site.
Parmi les exemples cités, une vidéo donnant l’apparence d’une diffusion par la chaîne France 24 prétendait à tort qu’un responsable français aurait exhorté les LGBTQ+ américains de s’installer en France pour « éviter la persécution ».
Un autre message feignait une mise en garde de la BBC selon laquelle des attaques contre des responsables conservateurs aux États-Unis « déborderaient sur l’Europe ».
De plus, il y aurait eu de fausses déclarations d’acteurs et du président américain Donald Trump.
Selon ABC News, cela aurait pour but de monter les internautes de différents camps politiques les uns contre les autres.
« Leur but n’est pas seulement d’inciter les gens à lire ou écouter, mais à réagir », a rapporté ABC News, citant John Cohen, ancien employé du département américain de la Sécurité intérieure. « Et dans notre situation actuelle de menace, c’est dangereux. »

Des manifestations à Londres et des violences à La Haye

Qu’en est‑il en Europe ? Ces derniers jours, de grandes manifestations contre la politique d’asile ont eu lieu à Londres et à La Haye. Aux Pays-Bas, elles ont dégénéré en graves violences et émeutes. Ces événements auraient-ils pu être, via les réseaux sociaux, au moins partiellement « influencés » par une puissance étrangère ?
Les médias mettent en avant les organisateurs apparents : pour la manifestation londonienne rassemblant 150.000 personnes — où ont eu lieu des incidents — est cité Tommy Robinson, de son vrai nom Stephen Yaxley, multirécidiviste et issu de la scène hooligan d’extrême droite, qui s’emploie à agiter contre les immigrés musulmans au Royaume‑Uni.
Il est banni de Facebook et d’Instagram, mais reste présent sur X et YouTube. La mobilisation qu’il a organisée a été largement relayée via les réseaux sociaux, sans qu’une ingérence étrangère n’ait pu être démontrée. La manifestation est restée majoritairement pacifique.
En revanche, la manifestation anti‑immigration du 20 septembre à La Haye a donné lieu à des violences majeures : des manifestants ont incendié un véhicule de police et brisé les vitres du bureau du parti de centre‑gauche D66 en centre‑ville, rapportent les médias néerlandais. L’autoroute A12 a été bloquée, des policiers ont été attaqués, et les forces de l’ordre ont employé des gaz lacrymogènes. Selon Dutch News, la manifestation aurait été organisée via les réseaux sociaux afin d’inciter le gouvernement à renforcer les contrôles en matière d’immigration et d’asile par une commentatrice nommée Els Rechts, qui a déclaré à la chaîne locale Omroep West regretter les violences et assurer qu’elle n’aurait « jamais organisé » l’événement si elle avait su qu’il dégénérerait.

Bots et deepfakes

Comment distinguer si l’on participe à un véritable débat politique ou à une campagne pilotée ? Aujourd’hui, les réseaux sociaux permettent de diffuser des informations erronées à grande échelle et très rapidement, en raison de leurs mécanismes et algorithmes. On peut créer de faux comptes ou déployer des bots pour automatiser une diffusion systématique.
Faux comptes et bots, une fois activés, agissent de façon autonome. Sur les plateformes, ils imitent les comportements humains, propagent la désinformation voulue par leurs opérateurs, suivent des hashtags, commentent massivement et amplifient ou affaiblissent des opinions selon l’objectif poursuivi.
L’intelligence artificielle permet par ailleurs de produire des enregistrements audio, des images et des vidéos falsifiés — les deepfakes — qui font dire à des responsables des propos qu’ils n’ont jamais tenus. Exemple : en novembre 2023, une vidéo très convaincante attribuée au chancelier allemand Olaf Scholz a circulé, le montrant prétendument annoncer que le gouvernement souhaitait interdire le parti AfD ; elle aurait été créée par un groupe d’activistes de gauche.
Avec le progrès continu de l’IA, distinguer des deepfakes de grande qualité sera de plus en plus difficile. Il est donc conseillé de prendre avec prudence les déclarations choquantes de personnalités ou les vidéos d’événements extraordinaires : mieux vaut d’abord les vérifier plutôt que de les partager frénétiquement parce qu’elles correspondent à son propre cadre de pensée. C’est d’autant plus vrai que les algorithmes savent désormais très précisément quelles opinions et quels centres d’intérêt correspondent à chaque utilisateur.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Tom Goeller est journaliste, spécialiste des États-Unis et politologue. Il a travaillé comme correspondant à Washington D.C. et à Berlin, notamment pour le journal américain The Washington Times. Depuis avril 2024, il écrit entre autres pour Epoch Times. De 1995 à août 2023, il a également été officier de réserve avec le grade de lieutenant-colonel et a participé à des missions à l'étranger, notamment pendant dix mois en Irak.

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