Une vidéo montre un médecin chinois frapper une patiente âgée lors d’une opération des yeux

Un sonneur d'alerte met une vidéo en ligne pour prouver les crimes du groupe hospitalier : "du point de vue d'un médecin, j'ai vu des ténèbres sans fond."

Par Shawn Lin & Lynn Xu
9 janvier 2024 05:13 Mis à jour: 9 janvier 2024 05:13

Un nouveau scandale ébranle un imposant groupe hospitalier chinois, spécialisé dans l’ophtalmologie, après la diffusion d’une vidéo devenue virale montrant l’un de ses chirurgiens frapper à plusieurs reprises une patiente à la tête au cours d’une opération de l’œil. Cette vidéo troublante fait suite à des accusations de prélèvements forcés d’organes réalisés sur des personnes vivantes et à d’autres allégations.

À la tête de plus de 600 hôpitaux, le Groupe hospitalier Aier Eye est la plus grande chaîne hospitalière en ophtalmologie de Chine. L’incident, qui s’est produit il y a quatre ans, implique un chirurgien de l’hôpital de Guigang, situé dans la province méridionale de Guangxi. La vidéo de « violence médicale » a été publiée sur Weibo le 19 décembre par le Dr Ai Fen, directrice du service des urgences de l’hôpital central de Wuhan.

Dr Ai a accuse le Dr Feng Guiqiang, président et chirurgien en chef de l’hôpital, d’avoir frappé la patiente Qin Guiying de plusieurs coups de poing à la tête alors qu’il l’opérait, rendant la femme de 82 ans aveugle de l’œil gauche.

Dr Ai est l’un des sonneurs d’alerte ayant collaboré avec le Dr Li Wenliang, lors de la première éclosion de cas de Covid-19 à Wuhan, alors appelé « pneumonie de Wuhan », pour mettre en garde la population de la présence du virus dès la fin 2019. Elle a un long grief contre le groupe hospitalier Aier Eye, qui, selon elle, a bâclé une opération des yeux qu’elle a subie en 2021, la rendant presque aveugle d’un œil. Le groupe nie les allégations du Dr Ai. Elle a publié à plusieurs reprises des messages sur les réseaux sociaux, détaillant différentes plaintes contre plusieurs secteurs du groupe hospitalier, allant de la corruption à la publicité mensongère, en passant par la faute professionnelle.

Dr Ai a publié une vidéo, sur Weibo, montrant le Dr Feng frappant à trois reprises la tête de sa patiente allongée sur la table d’opération. On aperçoit ensuite une infirmière qui tente d’immobiliser la patiente.

La vidéo a suscité l’indignation du public. En réponse, l’hôpital de Guigang du groupe hospitalier Aier Eye a publié le lendemain une déclaration pour s’expliquer : au moment où le médecin procédait à l’ablation du cristallin et à la vitrectomie du segment antérieur de l’œil gauche de la patiente, Mme Qin, partiellement anesthésiée, a été victime d’une « intolérance chirurgicale » et a essayé de toucher ses yeux. « Voulant éviter le pire, dans une situation d’urgence, le médecin a rapidement donné un ‘coup de marteau’ avec ses mains à la patiente, afin de la rappeler à l’ordre, mais n’avait aucune intention ni n’a eu de comportement visant à la blesser », indique la déclaration.

L’explication de l’hôpital n’a pas convaincu le public. Un article publié le 21 décembre 2023 sur le portail d’information chinois Sina a lancé au groupe hospitalier tout une série de questions : Pourquoi la patiente a-t-elle développé une intolérance au cours de l’opération sous anesthésie locale ? L’évaluation préopératoire était-elle adéquate ? Pourquoi le chirurgien a-t-il utilisé le « coup de marteau » sur une patiente de 82 ans, au lieu de demander à son équipe d’aider à l’immobiliser ? Le coup de marteau n’a-t-il pas aggravé la peur de la patiente ainsi que son état, affectant ainsi le résultat de l’opération ?

La commission de la santé de Guigang a ouvert une enquête sur l’hôpital local du groupe hospitalier Aier Eye.

Le 21 décembre en fin de journée, le groupe hospitalier Aier Eye a publié une nouvelle déclaration dans laquelle il admet que des règles de sécurité des soins ont été violées, et déclare que les médecins ne doivent, en aucune circonstance, maltraiter leurs patients. Le groupe hospitalier déclare que le Dr Feng a été démis de ses fonctions de président et de son poste de chirurgien en chef, et que deux autres membres de son équipe médicale font l’objet d’une enquête.

Au cours des dernières années, le groupe hospitalier a fait l’objet de nombreuses plaintes. L’une d’elles concerne le Dr Ai, qui est devenue presque aveugle de l’œil droit après une chirurgie de la cataracte à l’hôpital de Wuhan du groupe Aier Eye, en 2020. Selon Dr Ai, l’hôpital a bâclé l’opération, provoquant une baisse brutale de sa vision et le décollement de sa rétine.

Un garçon est allongé sur son lit d’hôpital, les yeux couverts de bandages, dans un hôpital de Taiyuan, dans la province de Shanxi, au nord de la Chine, le 27 août. (STR/AFP via Getty Images)

Dans un message publié sur Weibo le 21 décembre, Dr Ai écrit avoir persisté, pendant plus de trois ans, à dénoncer les crimes de l’hôpital Aier Eye, « parce que j’ai vu, du point de vue d’un médecin, des ténèbres sans fond ». Son message a reçu des milliers de « J’aime ».

Le groupe hospitalier Aier Eye

Le groupe hospitalier Aier Eye est le premier institut ophtalmologique de Chine, d’une valeur sur le marché de 146,3 milliards de yuans (18,7 milliards d’euros). Détenant plus de 700 hôpitaux dans le monde, y compris des établissements en Europe et en Asie du Sud-Est, il possède plus de 600 hôpitaux en Chine.

Le fondateur du groupe hospitalier Aier Eye, Chen Bang, est l’homme le plus riche de la province du Hunan. Il figure sur la liste des milliardaires de Forbes pour 2022, avec une fortune estimée à 11,6 milliards d’euros.

Chen Bang n’a pas de formation médicale. Il a servi dans l’armée et a créé une entreprise de jus de coco et un parc d’attractions avant de fonder la chaîne hospitalière en 2001.

Malgré sa réussite financière, ce groupe hospitalier en pleine expansion a été condamné à plusieurs reprises à des amendes pour violation des règles d’assurance, fraude sur les prix, fournisseurs médicaux non agréés, instruments chirurgicaux endommagés et publicité mensongère. La chaîne hospitalière a fait l’objet de nombreux procès pour faute professionnelle.

Selon Dr Ai, d’autres scandales mettant en cause le groupe hospitalier Aier Eye doivent encore être révélés. Or, « bon nombre des cas de faute professionnelle médicale se terminent avec de l’argent remis en privé. Tant qu’ils [le groupe hospitalier Aier Eye] peuvent résoudre les problèmes avec de l’argent, ils n’ont pas peur. Ils soudoient tous les niveaux des départements locaux et disposent de nombreux parapluies de protection ».

L’écrivain indépendant Zhuge Mingyang a déclaré à Epoch Times : « l’industrie médicale est exceptionnelle. Elle requiert un personnel qualifié, une excellente technologie, un sens aigu des responsabilités, l’intérêt du public et des normes morales. »

Cependant, toutes ces critères sont balayés par un « consortium d’intérêt » qui est le Parti communiste chinois, et qui est à l’origine de multiples scandales médicaux en Chine, déclare Zhuge Mingyang.

Allégation de prélèvements forcés d’organes

Le médecin chinois Wang Wenyi (C) s’entretient avec une femme identifiée comme « Annie » (G), qui affirme que son ancien mari a prélevé des organes sur des pratiquants de Falun Gong vivants au Centre de traitement de la thrombose de médecine chinoise et occidentale intégrée de la province du Liaoning, sous le regard de « Peter », un journaliste chinois qui a dénoncé les prélèvements forcés d’organes effectués par les autorités chinoises, lors d’une conférence de presse à Arlington, en Virginie, le 26 avril 2006. (Nicholas Kamm/AFP via Getty Images)

Il n’est pas surprenant que le groupe hospitalier Aier Eye fasse également l’objet d’allégations de prélèvements forcés d’organes. Les hôpitaux Aier Eye de Kunming, dans la province du Yunnan, et de Nanjing, dans la province du Jiangsu, figurent sur la liste des établissements soupçonnés de pratiquer des prélèvements forcés d’organes, selon l’Organisation mondiale chargée d’enquêter sur la persécution du Falun Gong (World Organization to Investigate the Persecution of Falun Gong, WOIPFG). Ces deux hôpitaux pratiquent un nombre étonnant de transplantations de cornée. L’hôpital Aier Eye de Shenyang se vante également de n’avoir besoin que d’une semaine à un mois, pour obtenir des cornées fraîches.

Le groupe hospitalier Aier Eye n’a pas répondu aux sollicitations d’Epoch Times.

Depuis plusieurs années, la communauté internationale scrute de près le régime communiste chinois au sujet de prélèvements forcés d’organes réalisés de façon systématique sur des détenus, notamment des pratiquants du Falun Gong, des Ouïghours, des Tibétains, des Chrétiens et des dissidents.

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