Val-d’Oise : privé de son permis à cause d’une erreur administrative, il ne peut plus conduire depuis un an et demi

Par Paul Tourège
17 juillet 2020 18:31 Mis à jour: 17 juillet 2020 18:31

C’est en septembre 2018, à l’occasion d’un contrôle routier, que Patrick Joyeux a découvert par hasard que son permis de conduire n’existait pas dans les fichiers de la préfecture.

Depuis un an et demi, Patrick Joyeux fait face à un imbroglio administratif qui l’empêche de conduire une voiture.

Son permis B, obtenu il y a déjà 40 ans, n’a pourtant jamais été suspendu ou annulé pour une quelconque infraction au code de la route. « Au début, c’est presque drôle mais là ça commence à être vraiment pesant. Je ne sais plus quoi faire », confie cet habitant de Saint-Witz (Val-d’Oise) dans les colonnes du Parisien.

« Je suis également motard. Et c’est lors d’un contrôle de routine par la gendarmerie [en septembre 2018] que les militaires m’informent que si j’avais été en voiture, ils auraient dû immobiliser mon véhicule car mon permis B a un problème, ils ne le trouvent pas dans la base », raconte M. Joyeux.

Le Wézien contacte alors le service des permis de conduire du Val-d’Oise afin d’en savoir plus. Ces derniers lui confirment qu’ils n’ont aucune trace de son permis dans leurs fichiers informatiques. Son dossier est alors transmis au Bureau national des droits à conduire (BNDC), qui dépend du ministère de l’Intérieur et gère l’ensemble des données relatives au système du permis de conduire.

Inquiet des conséquences en cas d’éventuel accident, Patrick Joyeux décide de ne plus conduire d’automobile tant que la situation n’est pas réglée. S’il espère d’abord que les choses s’arrangeront rapidement, il finit par déchanter.

« Une fois mon dossier parti à Beauvau, plus de nouvelles malgré mes nombreuses relances. Jusqu’en mars où je reçois un mail de l’ancien directeur du bureau, qui m’assure qu’il va s’occuper de mon cas, et puis… plus rien », explique-t-il.

Le Wézien multiplie les lettres et les courriels, sans succès. « C’est cette absence de réponse qui m’énerve le plus, c’est censé être un service public », souligne le père de famille.

Excédé par les lenteurs de l’administration, il a même songé à repasser l’examen du permis de conduire : « J’y étais prêt, même si c’est quand même fou puisque je l’ai déjà. Mais on me l’a déconseillé, car cela risquait de poser divers problèmes, et en plus j’aurais été considéré comme jeune conducteur pendant 2 ans. »

Patrick Joyeux a finalement décidé de prendre un avocat pour défendre ses droits et faire avancer les choses. « Car les conséquences se font de plus en plus sentir sur ma vie », observe-t-il.

« En ce moment par exemple, j’ai une sciatique et donc je ne peux pas prendre ma moto. Impossible alors de me déplacer chez mes clients et ça commence à me porter préjudice », poursuit ce responsable d’une société de services informatiques dont il est l’unique salarié.

« Mon fils a eu d’énormes soucis de santé et je ne peux pas l’emmener à l’hôpital quand il a besoin. Et je ne parle même pas des besoins du quotidien. Il y a vraiment une aberration dans le système », ajoute M. Joyeux.

Une procédure lancée devant le tribunal administratif

Interrogé par les journalistes du Parisien, Me Rémy Josseaume, l’avocat de M. Joyeux, estime qu’il s’agit d’une « histoire rocambolesque ». Il y a quelques jours, il a déposé une requête en référé au tribunal administratif de Pontoise.

L’erreur dont Patrick Joyeux est victime pourrait être liée à un problème lors de l’informatisation des données du fichier national, au moment du passage au permis à points, en 1992.

« J’ai déjà eu des anomalies dans de ce type de dossier avec des incohérences tout à fait ubuesques. L’erreur est humaine, ce n’est pas ça que l’on reproche. C’est que l’administration ne fasse rien pour la corriger. Là, on est dans le cas d’une erreur connue depuis plus d’un an et ça n’avance pas », pointe Me Josseaume.

Spécialiste du droit routier, l’avocat considère que la situation de son client est représentative d’une « administration défaillante qui n’arrive plus à gérer les permis de conduire ».

« Ce que je conteste dans ce genre de litige, c’est que l’on place toujours l’administré dans une situation de présumé en tort. On pourrait juste lui dire : ‘D’accord, votre situation semble étonnante, mais on regarde et on accélère le mouvement.’ Là, on ne fait rien, on abandonne l’administré. Ce n’est plus un service public », souligne Me Josseaume.

Et le conseil de rappeler que 15 millions de points de permis sont retirés chaque année en France.

« Aujourd’hui, on est capable d’automatiser le retrait de points mais pas l’inverse. Pourquoi ? Parce qu’on ne se préoccupe que de la répression. Tout le reste, on l’écarte car ça ne rapporte rien. Je suis remonté, car je vois tous les jours des gens qui ne peuvent plus conduire alors qu’ils en ont le droit. Pourtant, plus de permis du jour au lendemain, cela peut faire basculer une vie professionnelle et personnelle », s’agace l’avocat.

La situation aurait été régularisée le 10 juillet, sans que l’intéressé n’en soit informé

Contactée par Le Parisien, la Direction de la sécurité routière (DSR) affirme qu’elle a été alertée sur le cas de Patrick Joyeux au mois de mars 2019 et que la situation a fini par être régularisée.

« La difficulté était de rechercher la préfecture compétente pour vérifier la régularité et la véracité du titre de la catégorie B de monsieur Joyeux. Le dossier datant de 1980, il a été effectivement un peu difficile de retrouver l’historique, mais la situation de cet usager pour lequel l’administration a pris cas a heureusement été régularisée », explique la DSR.

Ni l’intéressé ni son avocat n’ont toutefois été prévenus de cette avancée, qui daterait seulement du 10 juillet 2020. « C’est une bonne nouvelle, mais j’attends de voir », tempère Me Josseaume.

« Comme souvent, l’administration ne répond pas et régularise quand elle est acculée à devoir s’expliquer sur la situation. Et dans ces cas-là, cela leur permet d’évacuer la question des dommages et intérêts. Mais cela ne va pas m’empêcher de maintenir ma demande auprès du tribunal », conclut l’avocat.

 

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