Xi Jinping reprend le contrôle de l’armée, mais la capacité réelle de la Chine à remporter une guerre est incertaine, explique un analyste

Par Venus Upadhayaya
6 novembre 2022 18:38 Mis à jour: 6 novembre 2022 18:38

Xi Jinping a obtenu un troisième mandat sans précédent et se maintient au pouvoir. Il consolide son statut de dirigeant du Parti communiste chinois (PCC). Il est désormais le chef d’État chinois le plus puissant depuis Mao Zedong. La Chine va se montrer plus agressive sur le plan militaire, avertissent plusieurs experts.

Le troisième mandat de Xi Jinping à la tête de la Chine pour cinq années supplémentaires, (voire davantage) le place également en position de chef des armées. Selon les experts, pour la première fois dans l’histoire du Parti, l’armée chinoise, appelée l’Armée populaire de libération (APL) constitue une véritable menace pour les autres pays de la région. Cependant les plus hauts gradés nommés récemment ont tous été choisis pour leur loyauté à Xi Jinping. Or, ils manquent d’expérience au combat. Xi Jinping est confronté à une profonde incertitude quant à la capacité de son armée à remporter la victoire contre un ennemi aguerri.

Suite au XXe Congrès national du PCC le 23 octobre, Xi Jinping a été reconduit au poste de secrétaire général du Parti. Le conclave a aussi été l’occasion de nommer les nouveaux membres du Comité Permanent du Politburo, l’organe décisionnel suprême du PCC, composé de sept membres uniquement. Pour le nouveau mandat de Xi Jinping quatre membres ont été remplacés. Désormais Xi Jinping n’est entouré que de ses alliés.

Selon Aparna Pande, chargé de recherche au Hudson Institute, un think tank basé à Washington, pour Epoch Times, Xi Jinping est désormais « plus puissant que nombre de ses prédécesseurs », notamment Deng Xiaoping, le dirigeant suprême du PCC de 1978 à 1989. Contrairement à Xi Jinping, Deng Xiaoping devait encore composer avec les anciens du Parti.

Alors que son pouvoir se consolide, la propagande qui Xi Jinping le présente désormais comme « le noyau dur » du Parti. Le PCC a amendé sa constitution le 22 octobre, renforçant d’autant les politiques et les idéologies de Xi Jinping. En 2017, la charte du Parti a été modifiée pour intégrer le dogme propre à Xi Jinping, connu sous le nom de « pensée de Xi Jinping ».

La charte du Parti, est le document d’autorité ultime auquel les 96 millions de membres du Parti doivent se conformer, et les amendements restent en vigueur indéfiniment.

Depuis quelques semaines la télévision publique chinoise publie via son application des articles sur Xi Jinping titrant qu’il est le « guide du peuple ».

Selon Frank Lehberger, sinologue basé en Europe et expert en politiques du PCC, ce culte de la personnalité sous l’étendard de « guide du peuple » marque la fin de la période de réformes économiques initiées sous le règne de Deng Xiaoping dans les années 1980. Souvenons‑nous que Deng Xiaoping avait interdit aux dirigeants d’instaurer le culte de la personnalité.

Une menace accrue

Alors que de nombreuses comparaisons sont faites entre Xi Jinping et Mao Zedong, les experts notent que si Xi Jinping, contrairement à Mao Zedong, n’est pas un chef militaire endurci. Il a consolidé son contrôle sur l’armée en éradiquant l’insubordination au sein de l’APL et en nommant ceux qui lui étaient loyaux. Xi Jinping dirige l’APL en tant que président de la Commission Militaire Centrale, l’organe militaire suprême du Parti.

Selon Grant Newsham, chercheur principal du Center for Security Policy et chargé de recherche au Japan Forum for Strategic Studies, pour Epoch Times, Xi Jinping est le premier dirigeant chinois depuis Mao Zedong à avoir la force politique nécessaire pour orienter le régime communiste dans la direction de son choix.

« Cependant contrairement à Mao Zedong, Xi Jinping a la capacité militaire de s’attaquer aux États‑Unis et de projeter sa force dans le voisinage immédiat de la Chine », explique M. Newsham.

L’APL, analyse le spécialiste, se dote progressivement de la capacité à étendre sa puissance à l’échelle régionale et mondiale. Xi Jinping n’hésitera pas à mettre à profit sa position renforcée et ses capacités militaires croissantes pour intimider davantage Taïwan, voire l’attaquer.

Pour Aparna Pande, un Xi Jinping incontesté n’est pas seulement une menace pour les États‑Unis, mais aussi pour les pays voisins de la Chine : le Japon, la Corée du Sud, l’Inde, le Vietnam et tant d’autres.

« Xi Jinping poursuivra probablement les politiques qu’il a menées au cours de la dernière décennie, notamment celle d’une Chine plus agressive qui cherche à effacer le siècle d’humiliation qu’elle a subi, à reconquérir des territoires avec la tactique du salami* et à utiliser la faiblesse de certaines puissances (la Russie) et la diversion d’autres (les États‑Unis) pour renforcer sa présence dans des régions stratégiques de par le monde », explique M. Pande.

[*La tactique du salami est une expression inventée en Hongrie pour décrire l’élimination progressive des pouvoir extérieurs au communisme (Église, autres partis, etc.), « tranche après tranche jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien ». Il s’agit d’opérations illégales, noyautage, police secrète, meurtres, etc.]

Selon M. Newsham, de tels objectifs souligne « l’aspect messianique du comportement de Xi Jinping », les États‑Unis et les autres nations libres devraient donc se préparer à l’affrontement.

« Il faut donc s’attendre à ce que la guerre politique chinoise (prélude à une guerre concrète) se poursuive à l’échelle mondiale. » Par « guerre politique », M. Newsham entend l’utilisation d’une série de moyens, généralement non violents, pour affaiblir, confondre, démoraliser, voire vaincre un adversaire.

Xi Jinping et les membres du nouveau Comité permanent du Politburo dans le Grand Hall du Peuple à Pékin, le 23 octobre 2022. (Noel Celis / AFP via Getty Images)

Nomination de ses fidèles à des postes militaires stratégiques

L’APL représente une menace accrue à l’international, néanmoins le fait que Xi Jinping ai promu les généraux selon leur loyauté envers lui et non selon leur capacité constitue son talon d’Achille.

Au cours des dix années de son règne, Xi Jinping s’est montré extrêmement méfiant à l’égard des hauts gradés de l’APL. Il a évincé un grand nombre d’entre eux tout en nommant des alliés, dont certains étaient en âge de prendre la retraite, note M. Lehberger. Xi Jinping a également réorganisé la défense dans son ensemble, notamment lors des réformes militaires radicales de 2015.

Cette réorganisation a été « visait à empêcher les généraux de l’APL de se liguer contre Xi Jinping et de le priver du pouvoir absolu », poursuit M. Lehberger, notant que, ironiquement, elle lui a également attiré des ennemis puissants.

Pour contenir toute éventuelle insubordination, Xi Jinping a annoncé le 24 octobre la promotion de quelques généraux en qui il pouvait avoir confiance, comme le général Zhang Youxia, 72 ans, « son voisin et camarade de jeu d’enfance ».

Zhang Youxia, qui a conservé son poste de vice‑président de la Commission Militaire Centrale, est l’un des rares généraux de l’APL à avoir une véritable expérience du combat, mais celle‑ci remonte au Vietnam il y a plus de quarante ans.

« Il est si âgé qu’il devrait être à la retraite selon les règles du PCC, mais Xi Jinping a modifié les règles en sa faveur et il a été élevé au rang de premier vice‑président du Comité Militaire Central, le deuxième homme militaire le plus puissant après lui‑même. »

L’autre poste de vice‑président a été attribué à He Weidong, qui était commandant de la 31e armée sur les côtes de la province de Fujian, localisée en face de Taïwan au‑delà du détroit. Il a également dépassé l’âge de la retraite. Il était auparavant responsable du commandement du théâtre occidental, dans la région occidentale de la Chine, et chargé de combattre l’Inde.

« Ces dernières années, Xi Jinping a apprécié les performances de [He Weidong] à l’ouest et l’a promu rapidement au poste de chef du Commandement du théâtre oriental, l’entité chargée de l’invasion envisagée de Taïwan. Il est maintenant le deuxième vice‑président de la CMC (Commission Militaire Centrale) après le général Zhang Youxia. »

La troisième personnalité de l’APL promue à la Commission Militaire Centrale est l’amiral Miao Hua, 66 ans, que Xi Jinping connaît depuis une trentaine d’années. M. Lehberger décrit Miao Hua, comme « un autre cadre politique de premier plan de la 31e armée (sans expérience du combat et juste un apparatchik communiste dans l’armée) », que Xi Jinping connaît depuis l’époque où il était responsable du Parti dans la province de Fujian, de 1985 à 2002.

Xi Jinping veut annexer Taïwan, et pour cela, il a besoin d’une solide expertise en matière de guerre de haute technologie, notamment de guerre aérienne et de guerre maritime ou navale, poursuit M. Lehberger.

« C’est pourquoi Xi Jinping a donné à sa marine des proportions impressionnantes qui rivalisent désormais avec celles des Américains en termes de nombre », mais « les soldats et les officiers manquent tous d’expertise professionnelle, par rapport aux champions de la région : la marine japonaise et la marine américaine ».

Selon M. Lehberger, le choix de Miao Hua reflète ce dilemme particulier et indique ce qui pourrait se passer à long terme.

« Miao Hua n’est qu’un officier politique, essentiellement un bureaucrate doué pour l’intrigue sans la moindre expérience du combat naval. Donc, avec une telle personne en charge de l’invasion de Taïwan, cela ne peut que conduire au désastre pour Xi Jinping lui‑même. »

« Mais Xi Jinping n’est pas intéressé par le professionnalisme, uniquement par la loyauté envers sa personne. »

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