2 000 ans d’histoire médicale : les plus anciennes aiguilles d’acupuncture mises au jour

Aiguilles d’acupuncture, bâtons de moxa et anciennes pièces chinoises.
Photo: Shutterstock
Dans la province du Jiangxi, en Chine, une découverte archéologique éclaire les origines de l’une des plus anciennes pratiques médicales encore en usage. Dans la tombe du marquis de Haihun, un tube de jade placé dans une boîte laquée d’or a révélé les plus anciennes aiguilles d’acupuncture en acier, vieilles de plus de 2 000 ans.
Depuis des siècles, les textes médicaux chinois anciens, comme le Huangdi Neijing (le Livre de l’Empereur Jaune), décrivent des systèmes complexes d’acupuncture, de méridiens et d’autres techniques thérapeutiques associées. Cette découverte comble enfin l’écart entre théorie et preuve matérielle.
Précision millimétrique et système médical sophistiqué
« Il s’agit de la plus ancienne preuve physique d’aiguilles médicales en acier en Chine », confirme Gu Man, directeur de l’Académie chinoise des sciences médicales traditionnelles. Les aiguilles ont un diamètre de seulement 0,3 à 0,5 millimètre, quasiment identique à celui des aiguilles modernes.
Le choix de l’acier n’était pas fortuit. « Les aiguilles de fer s’oxydent facilement, augmentant le risque d’infection. Les aiguilles en or ou en argent sont trop malléables et difficiles à fabriquer à de si petites dimensions », expliquent les chercheurs. L’acier, produit grâce à un procédé de fonte et d’alliage bien plus complexe, représentait un progrès technique permettant des traitements plus raffinés.
Aux côtés des aiguilles, une étiquette en bois portait une inscription essentielle : « Neuf aiguilles complètes ». Ce détail relie directement la découverte aux textes médicaux qui décrivent les « neuf types d’aiguilles », chacun conçu pour une fonction thérapeutique précise. Pour la première fois, nous pouvons vérifier que ces catégories n’étaient pas de simples constructions théoriques, mais correspondaient bel et bien à des instruments utilisés dans la pratique clinique.
Le mode de conservation des aiguilles est lui aussi remarquable. Enveloppées dans du textile (dont des traces subsistent) et placées dans un tube de jade à l’intérieur d’une boîte laquée, elles témoignent de protocoles médicaux déjà établis. L’importance accordée à la protection des instruments, conjuguée au choix de l’acier, moins sujet à l’oxydation, montre que les médecins de la Chine ancienne considéraient l’hygiène et l’entretien du matériel comme partie intégrante de leur pratique.

La portée de cette découverte pour la médecine chinoise actuelle
Cette découverte a des implications directes sur notre compréhension de l’acupuncture aujourd’hui.
L’acupuncture moderne peut désormais retracer sa filiation technique jusqu’au Ier siècle avant notre ère, avec des preuves physiques d’instruments d’une précision comparable. Nous ne parlons donc pas d’une pratique « folklorique », mais bien d’une médecine qui documente deux millénaires de développement technique.
La transition de la pierre au bronze, puis du bronze au fer et enfin à l’acier montre que les médecins de l’époque évaluaient et perfectionnaient leurs outils en fonction des résultats obtenus. Ils ne restaient pas figés dans des traditions dépassées : ils innovaient lorsqu’ils découvraient de meilleurs matériaux.
Le fait qu’on ait déjà fabriqué des aiguilles d’acier millimétriques il y a 2000 ans révèle une collaboration entre métallurgistes et médecins : une véritable « ingénierie médicale » ancienne, qui suppose une institutionnalisation du savoir et une transmission méthodique des techniques.
Longtemps perçue en Occident avec scepticisme, parfois reléguée dans la catégorie des « médecines alternatives » sans fondement historique solide, l’acupuncture apparaît ici sous un jour nouveau. Cette découverte démontre qu’elle s’est développée avec un véritable savoir-faire technique, une sélection minutieuse des matériaux et une compréhension de principes tels que la prévention des infections (les aiguilles étant soigneusement enveloppées et protégées).
La mise au point d’aiguilles d’acier de précision millimétrique confirme que l’acupuncture n’était pas une pratique marginale, mais un système médical techniquement avancé, comparable en exigence instrumentale à d’autres médecines de son temps.
L’acupuncture : une science médicale, pas seulement une tradition
En Occident, l’acupuncture a longtemps été classée parmi les « médecines alternatives », souvent avec une dose de scepticisme quant à ses origines. Pourtant, la découverte des aiguilles de Haihun va bien au-delà d’un simple trésor archéologique : elle apporte une preuve tangible que l’acupuncture s’est développée comme un système rigoureux, avec une sélection réfléchie des matériaux et des protocoles établis, révélant ainsi toute la sophistication de cette tradition médicale plurimillénaire.
Alors que la médecine intégrative cherche à rapprocher différentes traditions et la recherche contemporaine, cette découverte rappelle qu’il faut étudier avec rigueur les mécanismes de l’acupuncture, au-delà de sa valeur historique. Une pratique qui a perfectionné ses instruments pendant plus de vingt siècles a encore un rôle à jouer pour soulager les maux du XXIᵉ siècle.
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