Bénin : que sait-on de la disparition des deux touristes français dans la Pendjari ?

6 mai 2019 14:31 Mis à jour: 7 mai 2019 11:23

Les recherches se poursuivent pour retrouver les deux touristes français disparus depuis le 1er mai alors qu’ils étaient en vacances dans le parc de la Pendjari, au Bénin, et dont on est toujours sans nouvelles.

Si personne ne parle officiellement d’enlèvement, et qu’il n’y a eu aucune revendication, plusieurs éléments semblent corroborer cette hypothèse, dans une région frontalière du Burkina Faso, où opèrent de nombreux groupes armés et jihadistes.

Les deux touristes étaient partis en safari dans le parc de la Pendjari, l’un des derniers sanctuaires de la vie sauvage en Afrique de l’Ouest, qui s’étend sur près de 5 000 km le long de la frontière burkinabé.

Attendus dans la soirée au lodge où ils devaient séjourner, ils ne sont jamais revenus. Mais très peu de détails ont jusque-là émergé sur le déroulement précis des évènements.

Le cadavre de leur guide béninois, Fiacre Gbédji, très abîmé, a été retrouvé samedi matin dans le parc. Son identité a pu être formellement identifiée par un médecin légiste et sa famille, qui a notamment reconnu son pantalon.

En revanche, « impossible de savoir s’il a été tué par balle, par arme blanche ou par autre chose. Le corps était dans un état de dégradation très avancée », ayant été dévoré par des charognards, a confié une source gouvernementale béninoise à l’agence France Presse (AFP).

Leur véhicule, un Toyota 4 Runner blanc, a par ailleurs été retrouvé à quelques dizaines de km de là, dans l’est du Burkina, selon des sources sécuritaires de la région, estimant dimanche que « la thèse d’un enlèvement se précise ».

Il s’agirait de deux enseignants, venus passer une dizaine de jours au Bénin. La Pendjari était la dernière étape de leur séjour, après avoir visité les sites touristiques d’Abomey et Ouidah, dans le sud du pays. Ils devaient s’envoler pour Paris dimanche soir, selon des sources locales.

L’un des deux touristes, un homme d’une quarantaine d’années, vit en région parisienne mais est originaire de Barenton, dans le Sud-Manche, où vit sa famille qui est en contact avec le Quai d’Orsay, a déclaré une adjointe au maire de la commune, Thérèse Pottier.

Aucune information n’a pour l’instant été rendue publique sur le deuxième touriste.

Le Bénin, longtemps épargné par le terrorisme, fait figure de havre de paix en Afrique de l’Ouest, région mouvementée où prolifèrent les groupes armés, notamment jihadistes et criminels.

Sur son site, le Quai d’Orsay déconseillait toutefois formellement aux voyageurs de se déplacer dans l’extrême-nord du Bénin, frontalier du Burkina et du Niger, « compte tenu de la présence de groupes armés terroristes et du risque d’enlèvement ».

(Photo : Googlemaps)

« La menace était réelle dans ce parc, étant donné sa proximité avec l’est du Burkina, en proie à attaques armées récurrentes depuis février 2018 », estime Rinaldo Depagne, directeur pour l’Afrique de l’Ouest à l’International Crisis Group (ICG).

« Le parc de la W-Burkina, proche de la Pendjari, avait déjà fait l’objet d’une tentative d’implantation de groupes jihadistes il y a quatre ans, fin 2015, qui a finalement échoué », affirme-t-il à l’AFP.

Parmi les groupes armés opérant dans l’est du Burkina « le plus actif à l’heure actuelle dans cette région serait l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) », poursuit le chercheur.

L’armée burkinabé a d’ailleurs lancé début mars une opération baptisée « Otapuanu » (« pluie de feu ») visant à « restaurer l’autorité de l’État » dans cette région tombée aux mains des jihadistes où des milliers d’écoles ont fermé. Une centaine de « terroristes » ont ainsi été interpellés et sept soldats ont été tués en un mois, selon l’armée.

Si l’hypothèse d’un enlèvement se confirmait, on ne peut pas non plus exclure qu’il soit le fait d’un « sous-groupe, voire de bandits opportunistes qui pourraient vouloir revendre les otages à une organisation plus importante, sachant leur valeur marchande », ajoute M. Depagne.

Au Burkina, 90% des attaques ne sont pas revendiquées. La plupart ont été attribuées à l’EIGS (groupe État Islamique dans le Grand Sahara), à Ansaroul Islam ou au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), mais une dizaine d’autres groupes, plus petits et sans doute moins structurés opèrent également.

Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute, basé à Dakar, estime lui qu’« une telle opération nécessiterait un soutien logistique important » de groupes chevronnés, pour pouvoir ensuite exfiltrer les otages au Burkina ou au Mali, « épicentre du jihadisme » dans le Sahel.

D. S avec AFP

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