Dans Marioupol, la vie en ruine des rescapés

Par Epoch Times avec AFP
23 mai 2022 04:13 Mis à jour: 23 mai 2022 04:14

Les carcasses d’immeubles calcinés se dressent dans le ciel bas et pluvieux de la ville martyre de Marioupol. Alors que les derniers défenseurs ukrainiens se rendent aux Russes, de rares passants pleurent leur avenir perdu.

Trois mois de combats ont laissé un paysage apocalyptique dans de nombreux quartiers, mis en fuite des centaines de milliers d’habitants et fait un nombre inconnu, mais sans doute énorme, de morts.

Ici, les avenues appartiennent aux militaires russes et leurs alliés séparatistes, qui les ont conquises au prix de la destruction d’une cité portuaire qui comptait plus d’un demi-million d’habitants avant la bataille.

Les derniers soldats ukrainiens se rendent

Des journalistes de l’AFP ont constaté l’ampleur des dégâts lors d’un voyage de presse organisé par le ministère russe de la Défense.

Denis Pushilin , chef des séparatistes de la République populaire autoproclamée de Donetsk, s’adresse aux médias dans la ville portuaire ukrainienne de Marioupol le 18 mai 2022. Photo par Olga MALTSEVA / AFP via Getty Images.

En ce 18 mai, on n’entend plus les incessantes canonnades des semaines précédentes, car sur le site sidérurgique d’Azovstal, les derniers soldats ukrainiens se rendent. L’armée russe n’a cependant pas permis aux médias d’approcher l’immense aciérie, devenue le symbole de la farouche résistance ukrainienne.

Les autorités pro-russes ont promis de faire de Marioupol une station balnéaire. Un projet difficile à imaginer dans cet enchevêtrement de tôles et de débris, de barres d’immeubles éventrées par les missiles et les obus.

« Que puis-je encore espérer? « 

Avec la fin des combats, des habitants osent sortir en quête de victuailles. Ceux qui parlent affichent leur désespoir pour cette cité que Moscou dit avoir « libérée » d’un joug néonazi.

Une vue de la partie détruite de l’Ilyich Iron and Steel Works dans la ville portuaire ukrainienne de Marioupol le 18 mai 2022. Photo par Olga MALTSEVA / AFP via Getty Images.

Angela Kopytsa, cheveux décolorés, presse le pas devant une patrouille militaire. Puis, elle répond à l’AFP dans un russe teinté de l’accent caractéristique de la région ukrainienne de Donetsk, que la Russie considère comme une république indépendante.

« Que puis-je encore espérer? Que dire quand la maison est détruite, quand la vie est détruite? », dit l’ancienne puéricultrice de 52 ans.

« Je n’espère plus rien »

« Il n’y a ni travail, ni nourriture, ni eau. Avec les enfants, le petit-fils, on se partageait une cuillère » de nourriture, poursuit-elle, pleurant les nouveau-nés « qui mourraient de faim dans les maternités ».

« Quel avenir? Je n’espère plus rien », conclut-elle, avant de verser des larmes et de repartir au pas de course.

– Une vue de la partie détruite de l’Ilyich Iron  dans la ville portuaire ukrainienne de Mariupol le 18 mai 2022. Photo par Olga MALTSEVA / AFP via Getty Images.

Elena Ilina, 55 ans, travaillait elle comme professeure à l’université technique de Marioupol, dans le département informatique. Son appartement a brûlé, « rien n’y reste ». Elle vit désormais chez sa fille et son gendre.

Son seul souhait: retrouver sa vie d’avant.

« J’aimerais pouvoir vivre dans mon appartement, en temps de paix, bavarder avec mes enfants », dit-elle. Sa voix se brise dans un sanglot.

 Au zoo de la ville

L’armée russe emmène ensuite les journalistes au zoo de la ville. Des lions, des ours et d’autres bêtes s’y dressent dans des cages sinistres, mais semblent en bonne santé.

Oksana Krichtafovitch, qui fut cuisinière dans un hôtel de Marioupol, explique avoir été recrutée pour s’occuper des animaux. A 41 ans, une nouvelle vie.

Un militaire russe montre un ours au zoo de la ville portuaire ukrainienne de Marioupol le 18 mai 2022. Photo par Olga MALTSEVA / AFP via Getty Images.

Elle donne à manger aux bestiaux, trait des vaches et se sait mieux lotie que d’autres, car elle est nourrie en échange de ce travail.

« Le restaurant dans lequel je travaillais sur la rive gauche est détruit. J’y étais cuisinière, maintenant, mes clients, c’est eux », dit-elle en portant une gamelle dans la cage des ratons laveurs.

Marioupol « manque de tout, on survit »

Affichant un tout petit peu d’optimisme, elle relève que si Marioupol « manque de tout, on s’habitue, on s’adapte, on survit ».

Sergueï Pougatch, 60 ans, travaille au zoo comme gardien.

Avant les combats, il travaillait sur les voies ferrées du complexe industriel d’Azovstal, à l’époque principal employeur de la ville, aujourd’hui largement détruit.

Un militaire russe se tient sur le bord d’une route à côté de maisons détruites dans la ville portuaire ukrainienne de Marioupol le 18 mai 2022. Photo par Olga MALTSEVA / AFP via Getty Images.

Fin février, lorsque la Russie a lancé son offensive, il ne lui restait que deux mois avant sa retraite après 30 ans de service. Maintenant, il ne sait pas s’il touchera un jour sa pension.

Mais pas question de se lamenter.

« Le peuple ukrainien, c’est pas des flemmards. Dès que ça a arrêté de tirer, les gens sont sortis des caves et ont cherché du travail. Certains travaillent déjà », proclame fièrement Sergueï.

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