Eure – Une famille qui vit dans un logement insalubre pousse un cri de détresse : « Nous ne sommes pas des animaux »

Par Paul Tourège
19 juin 2020 15:28 Mis à jour: 19 juin 2020 15:28

Locataire d’une habitation insalubre aux murs constellés de mousses et de moisissures, une famille souhaite être relogée dans un « appartement sain » afin « de pouvoir vivre dignement ».

Depuis décembre 2019, Kadriye Akkaya, son mari et ses deux enfants de 13 et 15 ans vivent un cauchemar dans leur logement de location sis 18, rue des Forges à Rugles, une commune d’un peu plus de 2000 habitants située à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest d’Évreux.

Une habitation qui fait l’objet d’un arrêté préfectoral « portant mise en demeure d’effectuer des travaux urgents dans un immeuble d’habitation » depuis le 20 février 2020.

L’arrêté fait état d’un « danger grave et imminent pour la santé et la sécurité des occupants par risque de survenue ou d’aggravation de pathologies notamment maladies pulmonaires, asthmes et allergies ».

Il enjoint le bailleur de « rechercher les causes d’humidité et d’y remédier, de procéder au nettoyage et à la décontamination des revêtements dégradés par les moisissures, de produire les documents établis par des professionnels qualifiés attestant de la réalisation dans les règles de l’art de ces travaux » dans un délai de deux mois après notification de l’arrêté.

À l’intérieur de l’habitation, des tâches noirâtres, des couches de mousses vertes, blanches, bleues ou noires et des auréoles couvrent les murs. Une forte odeur de moisissure imprègne le logement insalubre.

« Même un chien ne vivrait pas là-dedans. C’est un enfer », explique Mme Akkaya dans les colonnes du Réveil normand.

« Nous sommes obligés de vivre à quatre dans une pièce de 9m² dans la maison. C’est la seule qui ne présente pas de problèmes de moisissure », ajoute-t-elle.

Un logement insalubre qui représente un danger pour la santé des occupants

Même la cuisine n’est pas épargnée : « On ne peut rien laisser à l’extérieur ou garder, car dès le lendemain, tout est mort. Nous achetons au jour le jour. Nous avons dû jeter des spatules en bois, des pâtes qui devenaient vertes. La prise électrique du réfrigérateur a grillé à cause de l’humidité. »

D’après la mère de famille de 47 ans, « ce n’est pas la seule prise qui a grillé. Celle de la box Internet et de la télévision également ».

Les membres de la maisonnée sont également obligés de jeter régulièrement des vêtements qui prennent la moisissure.

« Mon mari et l’un de mes enfants ont été hospitalisés d’urgence pour des difficultés à respirer et des toussotements. J’angoisse qu’ils développent quelque chose », souligne Kadriye Akkaya.

Sujette aux embolies pulmonaires, la quadragénaire en a déjà fait quatre. « J’ai peur d’en faire une cinquième », indique-t-elle.

Au moment de l’état des lieux, en avril 2019, la famille n’avait pourtant rien remarqué d’anormal.

« À l’époque, il n’y avait pas d’anomalies. La situation a commencé à se dégrader en octobre-novembre. Les tâches ont commencé à apparaître avec l’hiver », précise Mme Akkaya.

Les services de l’État assurent suivre l’évolution du dossier

Le 11 février 2020, un membre de l’Agence régionale de Santé (ARS) de Normandie s’est déplacé pour faire un diagnostic. « Le propriétaire et la mairie étaient conviés, mais personne n’est venu », regrette la mère de famille.

« L’ARS a effectivement été retenue afin de constater l’état d’insalubrité, et mener les investigations. Notre rôle, ensuite, a été de mobiliser les partenaires et interlocuteurs pour la suite des opérations », confirme Hélène Muller, attachée de presse de l’ARS de Normandie.

C’est à la suite de cette visite que l’arrêté préfectoral mettant en demeure le propriétaire des lieux de faire des travaux pour « la résorption de l’insalubrité de l’immeuble » a été pris.

Mais depuis, rien n’a été fait et ce, bien que le délai de deux mois prévu par l’arrêté préfectoral pour permettre au bailleur de procéder aux travaux nécessaires ait expiré.

Une situation que Mme Akkaya ne comprend pas : « Vivre là-dedans, ce n’est pas possible. »

« Pourquoi suis-je traitée comme cela ? J’habite à Rugles depuis 40 ans, j’ai travaillé près de 20 ans à la mairie, je suis quelqu’un d’honnête. Et pourtant, on me dit non à tout ce que je demande. Les gens me prennent pour une imbécile », poursuit la mère de famille.

La quadragénaire demande à « être relogée » afin de disposer d’un « appartement sain et de pouvoir vivre dignement ».

L’arrêté pris en février stipulait notamment que « compte tenu de la gravité des risques pour la santé et de la nature des travaux prescrits, l’immeuble est interdit à l’habitation dans un délai de 1 mois à compter de la notification du présent arrêté et jusqu’à la réalisation des travaux imposés ».

Si la famille a bien entamé des démarches pour être relogée, elle affirme toutefois avoir essuyé plusieurs refus. « On me dit que j’ai une dette », confie Mme Akkaya.

Un arriéré qu’elle assure rembourser petit à petit, tous les mois. « Ce n’est pas une raison valable pour me laisser dans la misère. Aucun bâilleur social ne veut me reloger. Je fais comment ? » s’interroge-t-elle.

« J’ai rempli des dossiers DALO (Droit au logement opposable, ndlr). Au moins, trois ou quatre. Ils ont été refusés », ajoute la Rugloise. « Nous ne sommes pas des animaux », soupire-t-elle.

Contactée par la rédaction du Réveil normand, la préfecture de l’Eure explique que « concernant l’aspect social, en complément du côté réglementaire apporté par l’ART, les services de l’État, en lien avec le Conseil Départemental ont proposé différentes solutions à la famille, dont un dossier aux fins de faire usage du droit au logement opposable ».

« Un contact est maintenu entre la famille et les agents du service social du Conseil Départemental. Les services de l’État demeurent attentifs à l’évolution de la situation de la famille », précise la préfecture.

Le propriétaire fait état d’une situation « compliquée »

De son côté, le propriétaire du logement soutient qu’il s’agit d’une « histoire compliquée ».

« J’ai eu beaucoup de problèmes avec cette locataire. Déjà, la caution n’a pas été payée et il y a eu de nombreux arriérés de loyer », précise-t-il.

Et le propriétaire de faire état de « travaux qui ont été réalisés sur la maison il y a six ans environ. J’ai fait faire des aérations, des travaux sur la VMC, la toiture a été changée ».

« Je ne comprends pas comment la maison peut être dans cet état-là. Lors de l’état des lieux, il n’y avait aucun problème. Alors, certes, ce sont des habitations anciennes, il y a de l’humidité dans les murs. Mais pas à ce point-là, d’où cela peut-il provenir ? Et pourquoi avoir attendu si longtemps ? » ajoute-t-il.

Interrogé à propos de l’arrêté pris par les autorités, il assure avoir « simplement été prévenu par courrier ». « Je pensais que madame Akkaya ne vivait plus dans lieux », poursuit le bailleur.

Une situation délicate face à laquelle il s’est d’ailleurs résolu à faire appel à un conseil juridique : « Avec les antécédents, j’ai décidé de prendre un avocat. »

Il indique également ne pas être en mesure de proposer une autre habitation à la famille pour le moment : « Je ne peux pas le faire, je n’ai pas de logements de libres actuellement. »

 

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