Fêtes de l’Ours catalanes : un label Unesco pour sauver une vallée des Pyrénées

Par Epoch Times avec AFP
21 février 2023 09:52 Mis à jour: 21 février 2023 19:11

Trois villages des Pyrénées catalanes célèbrent leurs remuantes fêtes de l’Ours chaque mois de février et comptent sur la récente inscription de cette tradition ancestrale au patrimoine de l’Unesco pour faire revivre leur vallée reculée.

« On n’a que ça ! On est dans un territoire un peu retiré, en perdition, et on n’a que ça qui nous fait vivre, nos traditions. On en est fier et on est fier d’être reconnu par l’Unesco », lance tout sourire le maire d’Arles-sur-Tech, David Planas.

En ce dimanche de février, avec d’autres habitants habillés comme lui en chasseurs, il s’apprête à partir sur la piste de la bête – « l’Os » en catalan – un villageois revêtu d’une combinaison de fourrure marron et d’un masque d’ours richement dentu.

Chaque année, la saison des Fêtes de l’Ours, simulacre de chasse célébrant la fin de l’hiver dans la vallée du Haut-Vallespir, s’ouvre à Arles-sur-Tech. Elle se poursuit à quelques kilomètres de là, à Prats-de-Mollo, avant de s’achever un peu plus haut, à Saint-Laurent-de-Cerdans, sur le versant sud du massif du Canigou, près de la frontière espagnole. Deux autres fêtes en Andorre toute proche ont été labellisées par l’Unesco.

« Perpétuer une tradition »

« C’est essentiellement une affirmation identitaire : d’avoir participé à cette fête signe l’identité des jeunes et exprime en même temps la volonté de perpétuer une tradition par rapport aux aléas de la vie moderne », analyse pour l’AFP Robert Bosch, organisateur de la fête d’Arles-sur-Tech de 1986 à 1991.

Ces fêtes immémoriales « se structurent autour de la légende de Jean de l’Ours qui raconte qu’un ours a kidnappé et violé une bergère, qu’il a eu de cette femme un fils nommé Jean, à mi-chemin entre son père sauvage et un homme civilisé », explique Olivier de Robert, écrivain et conteur pyrénéen.

Des jeunes, souvent joueurs du club de rugby qui réunit les trois villages, sont les acteurs principaux du rituel.

« Vivement que l’ours arrive ! »

Sébastien Dalos, 39 ans, ours pour la cinquième fois cette année à Arles-sur-Tech, correspond au profil. « C’est un honneur de faire ce personnage-là », se réjouit-il.

« Tant que perdureront ces traditions, ces moments de convivialité, rien que ça, ça nous met du baume au cœur et on attend ça avec impatience toute l’année : vivement que l’ours arrive ! », explique-t-il.

De nombreux membres de sa famille ont joué des rôles lors de la fête. Dans la maison de ses grands-parents, leurs portraits sont accrochés au mur.

« J’ai deux petites filles et un fils de six mois, ce sera sa première fête de l’ours, ça va être particulier, on fera aussi une photo de famille », ajoute-t-il.

Le dimanche, la population se masse près de la rivière avec les chasseurs, leur chef – le trappeur et son épouse – la Roseta, homme grimé en femme. Non loin, dans un sous-bois, Sébastien Dalos enfile son costume.

« Je suis chaud patate », confie-t-il entre ses dents d’ours. « Dès que je vais voir le trappeur et la Roseta arriver, ça y est, je bascule comme on pourrait dire du côté obscur, je suis dans l’ours. »

Quelques minutes plus tard, le voilà qui cavale au milieu de la foule, fonce sur les chasseurs, les plaque. Il attrape la Roseta et d’autres jeunes femmes avant de rouler au sol avec elles.

Il va ainsi de place en place, sous les huées, au son des pétards et de la musique jouée par la cobla, ensemble instrumental catalan, avant d’arriver sur la place de l’église.

Là, pour qu’il retrouve forme humaine, des habitants miment son rasage avec une fausse hache en bois. L’ours retire alors son masque et dévoile son visage. Tout s’achève en musique et par des danses catalanes, les sardanes, mêlant les villageois.

(VALENTINE CHAPUIS/AFP via Getty Images)

« Que du bonheur »

Lien fort entre les quelque 5000 habitants des trois villages, les fêtes, fortes de l’inscription au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco, veulent rayonner vers l’extérieur pour redonner vie au territoire.

Les mines de fer d’Arles-sur-Tech ou les usines d’espadrilles de Saint-Laurent-de-Cerdans ont disparu. « Ici, c’est une vallée qui se bat pour ne pas mourir », confie Marie-Rose Bouisset, ex-directrice de l’école maternelle d’Arles, née à Saint-Laurent et mariée à un habitant de Prats-de-Mollo. Dans ce contexte, dit-elle, le label Unesco, « ça n’est que du bonheur ».

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