Les débats sur la fin de vie, qui reprennent lundi dans l’hémicycle à l’Assemblée nationale, sont particulièrement délicats : un mot peut faire la différence. Voici quelques termes voués à cristalliser les discussions.
La proposition de loi portée par Olivier Falorni (groupe MoDem) prévoit d’inscrire dans la loi un « droit à l’aide à mourir », comme le reflète désormais son titre. Les termes, plus courants, de « suicide assisté » et « d’euthanasie » n’y figurent pas. Mais il s’agit bien de légaliser, sous conditions, l’un et l’autre. Ces deux termes portent « un poids historique ou émotionnel » et « peuvent être perçus comme clivants ou réducteurs », expliquait en mars le ministre de la Santé, Yannick Neuder, pour défendre l’expression d’aide à mourir.
Si le texte initial prévoyait de n’autoriser l’euthanasie qu’à titre dérogatoire, lorsque le patient n’est pas en mesure de s’administrer seul le produit létal, le texte amendé par la commission entend lui accorder le libre choix entre auto-administration et administration par un médecin ou un infirmier. La ministre de la Santé Catherine Vautrin a dit dimanche son souhait que l’administration par un tiers reste l’exception.
Ce que l’on peut attendre des soins palliatifs
Les soins palliatifs, au centre de l’autre texte examiné dès lundi, ne visent pas à guérir le patient mais à l’aider à vivre jusqu’à sa mort, notamment en réduisant ses souffrances physiques et psychiques. Le développement de ces soins fait l’objet d’un large consensus. Toutefois, un débat sourd oppose adversaires et partisans de la légalisation du suicide assisté, sur ce que l’on peut attendre des soins palliatifs.
Les premiers estiment que, suffisamment développés, ces derniers éviteraient très largement que des patients souhaitent en finir. L’écrivain Michel Houellebecq, adversaire déclaré de l’euthanasie, a ainsi estimé en mars que « l’envie de mourir » n’était qu’une « envie de ne plus souffrir ».
En face, on juge que le désir de mourir reste parfois irréductible. Ces situations « sont peu fréquentes » mais « existent » comme dans certaines maladies neurodégénératives, a déclaré, au lendemain des propos de M. Houellebecq, le professeur Jean-François Delfraissy, président du Comité d’éthique, instance s’étant prononcée pour une aide à mourir encadrée.
Le texte sur l’aide à mourir fixe d’importantes conditions pour y être éligible. Il impose notamment que le patient soit « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Ce critère exclurait donc les malades d’Alzheimer, ou les personnes plongées dans un coma irréversible.
Des « directives anticipées »
Un terme est étroitement lié au sujet : celui de « directives anticipées ». Elles permettent à une personne d’indiquer quels soins elle souhaite recevoir si son état ne lui permet plus de s’exprimer. Certains députés souhaitent que les patients puissent y inscrire leur souhait de bénéficier d’une aide à mourir. D’autres, à l’inverse, veulent en exclure explicitement la possibilité de demander l’euthanasie.
Le texte fixe d’autres critères, excluant par exemple les mineurs. Surtout, il impose que le patient soit atteint d’une « affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale ».
Ces termes sont trop vagues pour les sceptiques de l’aide à mourir. Selon eux, celle-ci serait ouverte à des patients à qui il reste encore plusieurs années à vivre. Une première version du texte, examinée à l’Assemblée avant la dissolution de 2024, évoquait un pronostic vital engagé à « court ou moyen terme ». Mais cette expression avait elle-même été jugée trop floue par les députés qui l’avaient retirée.
La Haute autorité de santé (HAS) a rendu public mardi un avis très attendu, où elle constate qu »n’existe pas de consensus médical sur la définition du pronostic vital engagé “à moyen terme” », et recommande de « retenir une logique d’anticipation et de prédiction de la qualité du reste à vivre ».
Elle y définit aussi la phase avancée d’une maladie comme « l’entrée dans un processus irréversible marqué par l’aggravation de l’état de santé de la personne malade, qui affecte sa qualité de vie », définition que va intégrer le gouvernement dans un amendement.
Qui autorisera une aide à mourir ? Début 2024, le président Emmanuel Macron avait promis que la décision serait prise « collégialement » par une équipe médicale. Mais le texte n’en renvoie la responsabilité qu’à un seul médecin, qui doit recueillir l’avis d’autres soignants.
L’un des rapporteurs du texte, Laurent Panifous (Liot), et le président de la commission des Affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons) ont déposé vendredi des amendements identiques, afin de renforcer le caractère collégial de la procédure. Les avis écrits sont remplacés par une réunion du collège, qui se tient par défaut en présentiel.
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