Entretien avec Piero San Giorgio : « Retrouver son indépendance et sa liberté par le travail et la préparation »

Par Ludovic Genin
9 janvier 2023 14:10 Mis à jour: 15 mars 2023 15:26

La première réaction en lisant Piero San Giorgio est celle d’un choc. L’éventualité d’un effondrement et d’un retour à une société primitive et barbare a quelque chose d’effrayant. En parcourant ensuite ses ouvrages, nous découvrons de véritables manuels de survie pour être préparés aux différents types d’éventualités que nous réserve l’avenir. De l’effarement initial, nous passons au soulagement d’avoir sur ces situations détaillées des solutions précises, puis à la curiosité de lire comme un bon roman d’anticipation dont on peut voir les effets aujourd’hui. Vous pouvez retrouver les ouvrages de San Giorgio sur son site Piero.com

Epoch Times : Pouvez‑vous vous présenter en quelques mots ?

Piero San Giorgio : Je suis un écrivain suisse. De 1992 à 2011 j’ai été cadre supérieur, responsable du marketing et du développement des affaires pour des sociétés de logiciel américaines, notamment Oracle où j’ai développé pour eux les marchés de l’Afrique et puis du Moyen Orient et de l’Europe de l’Est. J’ai ensuite créé ma société de services dans l’aide à des sociétés de logiciels nord‑américaines pour leur implantation commerciale en Europe, après avoir travaillé dans quelques startups. J’ai vendu cette société en 2005 et j’ai rejoint Salesforce.com une des sociétés pionnières du cloud où j’ai travaillé 5 ans. J’ai travaillé ensuite pour SuccessFactors de SAP, toujours pour développer les marchés du Moyen Orient, d’Afrique mais surtout d’Europe de l’Est, dans ce qu’on appelait les marchés émergents.

Je n’aime pas l’État, encore moins quand il est gros, centralisateur et bureaucratique, c’est pourquoi je me qualifie comme un anarchiste à tendance libertarienne. Agnostique, ancien militant écologiste, je suis père de quatre enfants. Depuis la sortie de mon best‑seller « Survivre à l’effondrement économique » je me consacre à promouvoir la préparation individuelle, la résilience et la recherche de la liberté, bref, ce qu’on appelle le survivalisme.

Il est étonnant en parcourant votre livre « Survivre à l’effondrement économique », publié en 2011, d’y voir décrit la situation que nous traversons aujourd’hui : fin du pétrole, crise économique, crise nucléaire, crise sociale, etc. D’où vous est venue l’inspiration de ce livre ?

Mon approche de la survie n’a pas été celle classique de se dire : que se passe‑t‑il si je suis abandonné dans la forêt ou si je me retrouve perdu sur l’océan… même si ces démarches sont réalistes et pertinentes.

Ma démarche a été celle de comprendre que nous sommes dans un monde qui a des ressources limitées qui se réduisent au fur et à mesure, alors que notre consommation et la population humaine grandissent de façon exponentielle. Je me suis rendu compte que les ressources qui sont en train de se tarir sont absolument fondamentales au bon fonctionnement d’un système économique extrêmement complexe qui fonctionne de plus en plus en flux tendu avec zéro stock et qui risque de s’effondrer par le cumul de ces tendances lourdes que sont : la surpopulation, les migrations massives, les guerres et la déstabilisation des systèmes traditionnels du monde, la raréfaction, l’envol ou la spéculation sur les prix non seulement des matières premières, mais aussi des denrées alimentaires.

Une autre tendance lourde sont les crises et les stress hydriques liés au manque d’eau douce et d’eau potable pour les populations et les cultures à travers le monde notamment dans les pays où il y a les plus fortes croissances de population. Il y a aussi l’épuisement de la fertilité des terres et des sols dû à la monoculture intensive qui détruit, lessive les sols et réduit leur capacité à produire par hectare des productions croissantes. On voit aujourd’hui que ces productions par hectare commencent à baisser.

Enfin, il y a le vacillement financier de nos économies qui sont basées sur la dette, les États‑Unis en tête, l’Europe en second, le Japon également et qui menace à tout moment de nous faire tomber d’une crise économique qui existe déjà, à une crise structurelle. Crise qui se caractérise par du chômage, de la pauvreté croissante, des inégalités perçues comme étant injustes par une grande partie de la population.

En réalité, l’idée m’est venu à partir de 2003 et la guerre en Irak où j’ai pu voir cette incroyable propagande de guerre américaine, basée sur cette fausse idée des armes de destruction massive et de l’implication de Saddam Hussein dans le 11 septembre, que l’on sait fausse évidemment aujourd’hui. Je me suis alors rendu compte que la plupart des médias reproduisaient des mensonges de manière éhontée à la population.

J’étais encore un peu naïf à cette époque et cette prise de conscience m’a poussé à rechercher des informations alternatives, d’aller chercher dans les livres d’histoire la réalité de ce qui se passait. Cela m’a fait prendre conscience de la raréfaction des ressources naturelles, des problèmes liés à la pollution, la surcroissance de la population humaine et de la géopolitique liée au contrôle des ressources qui deviennent de plus en plus rares et qui sont fondamentales à notre monde.

Pour la petite histoire, lorsque j’ai vendu ma société en 2005, je ne savais pas où les investir et je ne voulais pas laisser ce cash sur mon compte en banque. J’ai décidé de tout investir dans l’or, à l’époque, c’étaient des ETFs, c’est‑à‑dire de l’or papier. Je me souviens d’avoir vu cet or monter, monter, monter à partir de 2005 et comme je m’y suis intéressé cela m’a aussi permis de me plonger dans la réalité du marché de l’or et de ce qui en découle par rapport à l’économie réelle et l’économie surendettée dans laquelle la plupart des pays du monde se trouvent aujourd’hui. C’est vraiment un sujet intéressant.

À partir de 2011, la convergence de toutes ces réflexions, c’est‑à‑dire une sensibilité écologique, une sensibilité historique, une sensibilité énergétique, une sensibilité financière m’ont fait comprendre que nous allions vers une catastrophe. Avec cette prise de conscience, j’ai décidé d’écrire un livre qui expliquait les démarches que j’avais prises à titre personnel pour ma famille et moi pour me préparer à ce que j’appelle l’effondrement économique, c’est‑à‑dire, à mon avis, l’inévitable crise, très longue et très dure, que les économies globalisées vont traverser. Donc j’ai écrit « Survivre à l’effondrement économique » et qui, sans prétention, a été publié chez un éditeur qui a eu le courage de croire dans un livre qui était le tout premier en France sur ce sujet et certainement à contre‑courant des économistes qui pensaient que tout allait très bien et que tout ira toujours très bien, que la croissance sera toujours infinie dans un monde qui est, par définition, limité. Ce livre a eu un grand succès. Sorti en 2011, nous en sommes aujourd’hui à plus de 200.000 exemplaires vendus, et sa traduction en 12 langues, sans avoir été couvert par les grands médias parce que je pense que les conséquences de ce que j’écris sont assez radicales et remettent en cause les croyances de l’économie moderne. Donc il va de soi que les grands médias ne veulent absolument pas en parler. Sauf qu’aujourd’hui ce que j’ai écrit – et que j’avais prévu arriver entre 2020 et 2025, arrive.

Fort du succès de ce livre, j’ai coécrit un livre qui s’appelle « Rues barbares, survivre en ville » et qui traite de la problématique de la vie dans les villes, notamment liée au système d’approvisionnement qui sont en flux tendus, en « just in time » et qui rendent la vie dans ces villes extrêmement dangereuse si ce qui est considéré comme normal – c’est-à-dire un approvisionnement constant devait s’arrêter à cause d’une crise. On l’a vu lors des ouragans de Katrina à la Nouvelle‑Orléans, des tsunamis comme au Japon en 2011 ou encore l’ouragan Sandy en 2012 à New York. La problématique qui arrive dans les villes est lourde de conséquences et donc ce que j’essaye d’enseigner, d’apprendre et d’apporter comme témoignage et comme expérience dans ces livres, c’est comment est‑ce que l’on peut se préparer et se prémunir en cas de crise financière ou physique, tel que des guerres internationales ou civiles.

Ce sont des choses qui ne sont plus de l’ordre de la science‑fiction, ce sont des choses qui rentrent dans l’ordre du possible aujourd’hui, y compris dans des pays occidentaux comme les États‑Unis ou la France. Je communique essentiellement avec mes lecteurs via ma page Facebook, j’ai un site qui s’appelle Piero.com et puis j’ai écrit un troisième livre paru en 2014 qui traite des femmes, qui s’appelle « Femmes au bord de la crise » qui est plutôt une approche de sensibilisation de la moitié de la population, les femmes, par rapport au risque qu’elles ont – qui a mon avis devient de plus en plus grand malgré les acquis du féminisme, leur risque à la fois financier, économique mais aussi physique en cas de problèmes accrus. Je voulais les avertir et les sensibiliser aux problématiques que j’ai mentionnées pour les femmes particulièrement. C’est un livre qui me tient aussi beaucoup à cœur. J’ai encore deux trois livres sous le coude qui touchent des sujets comme la préparation au risque d’accident nucléaire, chimique et biologique et d’autres sur l’autodéfense qui viendront plus tard.

(Avec l’aimable autorisation de Piero San Giorgio)

Vous y décrivez ce que serait l’effondrement d’une société industrialisée telle que la nôtre. Pouvez‑vous revenir sur les raisons et les formes que prennent selon vous cet effondrement ?

L’élément clé à comprendre est la rupture des chaînes d’approvisionnement, interconnectées à un niveau global, et dont nous dépendons pour notre eau, notre nourriture, nos médicaments, notre chauffage, nos carburants, nos pièces de rechange, etc. Des producteurs aux consommateurs, les biens dépendent de ces systèmes très complexes, certes capables de se réorganiser de manière organique, mais qui, s’ils subissent trop de stress, de coupures, d’arrêts, se congestionnent, s’arrêtent de manière durable et ont de la difficulté à redémarrer, comme on a pu le constater lors des confinements de 2020, pourtant pas étendus sur toutes les industries et toutes les géographies et de courte durée.

Dès lors que les supermarchés sont moins approvisionnés, que les gens se sentent démunis et qu’ils craignent pour eux et pour leurs familles, il y a un risque de violence qui s’ajoute à la réalité des pénuries. On l’a vu à de nombreuses reprises, de l’ouragan Katrina aux États‑Unis, à l’île de Saint‑Martin en 2017 et aux plus récentes légères pénuries de carburant en France, par exemple, il suffit qu’une poignée de gens fassent régner la violence pour que la situation empire. Or, notre monde moderne n’a plus de stocks ni de réserves car tout fonctionne en flux tendu. L’effet de panique est à craindre. Avoir chez soi de quoi tenir le coup permet à ceux et celles qui sont préparés de ne pas participer à cette panique, à cette possible violence, mais au contraire contribuer à l’apaisement en restant tranquilles ou en aidant, selon leurs capacités, les gens dans le besoin.

Dans mes livres, je parle de tout cela en donnant des solutions pour ces crises‑là, mais aussi dans le cas où les crises devraient devenir plus longues et qu’un monde de pénurie devienne la normalité. Là, ceux qui ont développé un peu d’autonomie auront plus de facilité à s’adapter et à reconstruire. C’est en somme une forme d’assurance. Savoir se préparer au pire, tout en espérant le meilleur. Mais quoi qu’il arrive, vivre avec plus de liberté, plus de nourriture saine et d’eau pure, avec un corps physiquement entraîné et moins de stress, c’est mieux, crise ou pas !

Parmi les thèmes que vous abordez, on peut vous reprocher de faire peur aux lecteurs. Quelles solutions concrètes leur proposez‑vous et qu’est‑ce que l’on peut voir de positif en ces temps de crise ?

Le plus grand pourvoyeur de peur, c’est l’État. Nous l’avons vu ces trois dernières années avec ses injonctions à se confiner, porter des masques, se faire piquer avec des produits expérimentaux et dangereux… La peur est devenue le cœur de la communication des États.

Pourtant ceux‑ci nous exhortent aussi à nous préparer. L’État français, par exemple, publie par le biais du site internet de son ministère de l’Intérieur des documents qui nous apprennent à être plus résilients en cas de crise, en cas d’incendie, d’inondation ou d’autres catastrophes climatiques.

Un citoyen qui est préparé à faire face à 24, 48 ou 72 heures de crise ne sera pas un poids pour la communauté, au contraire il va même pouvoir aider d’autres personnes parce qu’il aura une lampe de poche, une batterie de rechange, des couvertures, un peu de nourriture ou de l’eau afin de subvenir à des besoins d’urgence pour lui, sa famille et éventuellement d’autres personnes.

Ceux qui pensent que le survivalisme est « complotiste » ou « illuminé » devraient prendre l’avion pour voir l’état réel du monde. Même sans aller si loin, ceux qui habitent hors de Paris peuvent facilement observer qu’il y a des endroits où une approche de la survie est nécessaire, car le monde est brutal, violent et les gens se battent pour les ressources que sont la nourriture, l’électricité, l’énergie et tout simplement pour avoir de quoi vivre.

Il faut se rendre compte qu’aujourd’hui on a pratiquement 1 milliard de personnes qui n’ont pas accès à de l’eau potable et propre quotidiennement. Il y a un peu moins d’1 milliard de personnes qui n’ont pas forcément tous les jours de la nourriture, et ces gens dans beaucoup d’endroits sont prêts à se battre. On le voit dans des contextes catastrophiques comme en Somalie ou dans les années 1990 au Libéria ou au Sierra Leone où les conflits dégénèrent très vite en guerre civile pour l’accès aux ressources. Ces guerres ne sont souvent pas que politiques.

On observe également qu’avec la croissance de la population, même chez nous avec les vagues migratoires, la criminalité explose. Ceci devrait ouvrir les yeux aux gens à la nécessité de se préparer aussi individuellement. L’autre raison pour laquelle la plupart des gens n’y réfléchissent pas c’est qu’ils sont habitués depuis maintenant 70 ans à avoir un État nounou, un État providence qui paye, qui protège et qui dans l’ensemble fonctionne encore. Or je vous l’ai dit dans ma définition, il faut être un adulte responsable et non pas un enfant. Cela n’est pas pour faire peur, mais bien voir la réalité telle qu’elle est.

Mais il y a un message positif : retrouver son indépendance et sa liberté par le travail et la préparation. De plus, se savoir capable de se sortir d’une mauvaise situation et d’aider sa famille, ses voisins, ses amis est un élément qui rassure et qui permet de souder une mini‑société en liquéfaction. N’oublions pas qu’en périodes difficiles, ceux qui savent se « serrer les coudes », s’entraider mutuellement, créent des liens forts qui leur permettent non seulement de mieux s’en sortir, mais aussi de reconstruire le monde de demain, plus unis et plus forts.

En quoi consiste selon vous le survivalisme ? Quels sont les principes de base et les conseils que vous pouvez donner à des néophytes ?

Pour moi le survivalisme c’est être un adulte responsable. C’est‑à‑dire être une personne qui est libre, qui sait se défendre, qui sait gagner sa vie de manière indépendante ou qui, si elle est employée, a suffisamment de compétences pour subvenir aux besoins de sa famille.

C’est aussi être prévoyant, essayer d’anticiper l’avenir et s’y préparer de manière adéquate même pour de petites choses : vous partez en voyage, en vacances, qu’est‑ce que vous prenez en voiture qui va vous permettre en cas d’accident d’alerter les secours ou de rentrer chez vous ? À l’autre extrême, pour des catastrophes très lourdes : en cas d’effondrement d’une économie, d’une civilisation, qu’est‑ce qui vous permet vous, votre famille, vos amis de subvenir et d’en subir le moins possible les effets à moyen et long terme ?

D’une définition simple on peut donc avoir une déclinaison qui peut aller du relativement bénin au très complexe comme le changement de mode de vie.

La Base autonome durable (BAD), dont je parle dans mes ouvrages, est un lieu de résilience, un lieu où on travaille notre autonomie. C’est un concept d’enracinement, d’autonomie dans la durée. Elle peut être idéalement dans la campagne, mais aussi dans une maison au fond des bois. Cela peut tout simplement être l’appartement, la maison pavillonnaire ou une maison de vacances, voir même un bateau, une péniche.

J’ai défini dans mes livres sept critères de besoins physiologiques qui doivent guider l’idée de la BAD : l’eau, la nourriture, la santé, l’énergie, les connaissances, la défense et le lien social. Ces éléments sont imbriqués les uns avec les autres et sont indispensables. En négliger un provoque un déséquilibre et met donc en péril notre capacité d’autonomie.

Je vois de plus en plus de citoyens, de jeunes qui veulent se réapproprier les outils de leur liberté, les outils de leur défense. Depuis les vingt dernières années et la pandémie, le contrat social se brise progressivement et les gens veulent se préparer de plus en plus par eux‑mêmes. Avec la récession qui arrive en 2023, les dysfonctionnements fondamentaux des États vont s’accentuer et la population devra se réorganiser pour faire face aux besoins et à la possible violence.

Selon vous, allons‑nous revenir inexorablement à un âge de pierre, ou y‑a‑t‑il plusieurs stades possibles ? Quels sont les différents types d’effondrements que vous traitez dans vos différents ouvrages ?

Je ne prédis pas un effondrement économique comme un prophète ou comme un devin. Je dis seulement que la chance d’une convergence des facteurs lourds est extrêmement forte et peut nous conduire à un effondrement économique. La forme de cet effondrement peut être variable : cela dépend de la saison dans laquelle il arrive, de la vitesse à laquelle il arrive, ça peut être très lent ou très rapide et il peut y avoir des paliers comme avec une grande coupure d’électricité qui se prolonge sur plusieurs jours et qui fait passer un palier de stress. C’est la « rupture de normalité ». C’est‑à‑dire lorsque l’on sort de la norme à laquelle nous sommes habitués à vivre. La notion est relative à ce que l’on est habitué à vivre : pour le paysan du Mali, l’absence d’électricité ne change rien à son quotidien, pareil pour le paysan au fin fond de la campagne de l’Indre qui saura s’adapter. Je ne m’attends pas à ce que l’on revienne à « l’âge de pierre », mais on risque fort de devoir s’adapter à un monde plus difficile que celui que nous avons connu en Europe et aux USA depuis 1945.

Pour l’urbain habitant Londres, Paris ou New York, une rupture de normalité sans électricité pendant plusieurs jours, c’est l’apocalypse ! Enlevez le WiFi pour quelques jours et vous verrez les réactions des adolescents ! Quel que soit notre lieu de vie, quel que soit notre niveau social et de revenu, ou notre capacité physique, plus nous augmentons notre résilience, plus nous limitons l’impact qu’un éventuel effondrement peut avoir sur nous, mieux cela sera. Donc le survivalisme devrait être la chose la plus simple, la plus évidente pour l’immense majorité de la population.

Le meilleur et le pire se manifestent aujourd’hui dans la société, avez‑vous confiance en la nature humaine, en son altruisme et à sa fraternité pour reconstruire en cas d’effondrement ? Comment cela serait‑il possible ?

Si je n’étais pas optimiste et confiant dans la nature humaine, je me préparerais en cachette sans prendre le risque qu’en cas de crise, on vienne essayer de venir chez moi. Toutefois, je suis réaliste. La nature humaine est capable du pire comme du meilleur, parfois les deux simultanément. Pour preuve, lorsqu’un tsunami ravage le nord du Japon, la population des zones dévastées s’est mise au travail pour sauver les blessés, enterrer les morts, enlever les débris, organiser les secours… Sans doute que la culture du Japon et leur homogénéité sont des facteurs importants et que l’on n’a pas retrouvé lors de l’ouragan Katrina par exemple.

N’y‑a‑t‑il pas derrière le survivalisme à la fois un besoin de se déconnecter du monde contemporain et la nécessité d’une vie plus calme, plus proche de la nature, avec des valeurs plus simples et traditionnelles ?

Oui, et c’est sans doute un besoin fondamental de l’homme, pas encore adapté au rythme frénétique de la vie moderne, que de retrouver un calme, une proximité de la nature et de ses cycles, de vivre dans un groupe d’humains ayant des valeurs saines. Cela dit, je ne préconise pas de tout quitter sans réfléchir et de vivre comme un ermite. À chacun de faire sa démarche en fonction de ses moyens, de sa situation familiale, de son âge, de sa santé, de son travail et compétences, etc. tout en tenant compte des principes de base de la survie, qui sont fondés sur notre anthropologie profonde.

De nombreuses personnes n’ont pas attendu mes livres pour se préparer, pour être des survivalistes ou faire du « prepping » (de la préparation, ndlr). Tout simplement faire leur potager, apprendre à se défendre ou apprendre de nouveaux métiers.

Je vois sur mon réseau privé sur Patreon et dans mes conférences des gens de tous bords politiques, de tous âges, des personnes marquées par les années soixante et l’idée de revenir à la nature, par l’écologie, d’autres beaucoup plus jeunes qui se demandent de quoi leur avenir sera fait, quel métier choisir : grandes écoles, université ou plutôt aller vers l’agriculture biologique et la coopérative par exemple.

Il y a aussi des gens de toutes origines, j’ai rencontré des personnes qui sont retournées chez eux dans le Maghreb ou en Afrique pour monter des coopératives de développement local de production de légumes biologiques, de production agricole. D’autres vivent en Asie. Il y a donc énormément de profils différents et de démarches.

Si, et je l’espère, il n’y a pas d’effondrement économique nous aurons appris à avoir une vie plus autonome moins dépendante d’un système économique, social et politique qui est de plus en plus lourd et bureaucratique, de moins en moins libre et qui nous donne peu d’espace de liberté. Nous aurons au moins récupéré un temps cet espace de liberté, cette capacité de vivre dans la forêt, à produire notre propre alimentation ou simplement avoir acquis la certitude de savoir qu’en cas de pépin on est apte à s’en sortir seul sans l’aide d’un tiers ou de l’État.

Pour conclure, n’y aurait‑il finalement pas besoin de se préparer matériellement mais aussi de se construire mentalement et spirituellement pour affronter l’avenir, de faire un travail sur soi ?

C’est certain. En survie on parle de mental d’abord, sans quoi les compétences ne peuvent être appliquées et sans lesquelles le matériel et les outils ne sont rien. Et le mental humain est pétri, qu’on le veuille ou non de spiritualité. Pour certains, c’est une spiritualité qui se traduit en croyance religieuses, pour d’autres ce sera la foi dans la science, le progrès ou dans des dogmes.

En ce qui me concerne, je n’ai pas beaucoup parlé de cela car qui suis‑je pour parler de mes croyances ? Cependant j’ai une éthique que je m’efforce de perfectionner avec le temps et qui se base sur des principes universels comme la non‑initiation de la violence, sur le respect de la propriété, sur le travail… et sur l’exploration de l’esprit humain.

Ceci me donne confiance et explique sans doute pourquoi je ne vis pas dans la peur. Mon prochain livre, prévu pour cette année, traite de comment réduire ou gérer les effets que la peur peut avoir sur nous. Et le travail sur soi et sur sa spiritualité sera un chapitre important de ce livre.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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