Le début de la guerre en Ukraine en 2022 a marqué le début de la généralisation des drones de guerre sur le terrain des combats. Plus mobiles, moins chers, programmés avec l’IA, leur prolifération est en train de changer les codes des champs de bataille, à l’heure où toutes les armées du monde entrent dans une course technologique à l’armement.
Depuis le début de la guerre, on estime que plus de 60 % des destructions ne sont pas le fait de l’artillerie lourde mais de drones de frappe, c’est pourquoi les industriels se sont engouffrés dans le créneau des munitions téléopérées (MTO).
L’armée française ne compte actuellement que quelques milliers de drones dans ses équipements, quand les Ukrainiens en ont utilisé plus d’un million et demi en 2024 et comptent en utiliser 4,5 millions cette année, pour faire face à la Russie.
La France veut maintenant récupérer son retard dans cette course mondiale aux drones. La compétition a déjà commencé en Europe, devancée de loin par les États-Unis et la Chine, dans une guerre de véhicules aériens de combat sans pilote (UCAV), où les règles ne sont pas les mêmes pour tous les participants.
L’utilisation des drones en Ukraine
Depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine en 2022, les drones de petite taille ont modifié les règles du jeu. La plupart effectuent des missions de reconnaissance de routine, mais ils servent également de leurres, de relais de communication ou, dans le cadre de la guerre électronique, d’outils de brouillage.
Selon le Wall Street Journal, l’an passé, l’Ukraine a également lancé des drones capables d’intercepter des avions russes ou de brûler des rangées d’arbres en larguant des engins incendiaires.
L’Ukraine teste aussi des drones équipés de fusils automatiques et de lance-grenades. Ne se limitant plus au largage de petites bombes, les drones ukrainiens effectuent désormais des tâches allant de la pose de mines à la livraison de matériel, transformant ainsi le champ de bataille en guerre de drones.
Depuis le début du conflit russo-ukrainien, les fabricants de drones ukrainiens ont acquis une grande expérience pratique dans la construction et les essais de drones d’attaque à longue portée et les ont utilisés pour frapper des bases aériennes russes, des installations pétrolières et d’autres cibles clés.
Grâce aux progrès rapides de l’intelligence artificielle (IA), les derniers drones de combat et de reconnaissance peuvent également accomplir des missions de plus en plus complexes, avec une intervention humaine minimale, voire inexistante.
Le conflit en Ukraine aura été le terreau d’un nouveau type de guerre centré sur les véhicules aériens de combat sans pilote (UCAV). Elle a enclenché, d’un côté et de l’autre, une course technologique qui concerne toutes les armées – de Terre, de l’Air et de la Marine.
Les drones omniprésents au Salon des forces spéciales françaises
De reconnaissance, de ravitaillement ou de frappe, les drones et les moyens de s’en protéger étaient omniprésents dans les allées du Salon des forces spéciales Sofins le 3 avril, dans le sud-ouest de la France, illustrant les efforts d’adaptation pour tirer les leçons du conflit en Ukraine.
Alors que la France n’en possède que quelques milliers, industriels et forces armées s’efforcent de se mettre en ordre de bataille pour répondre aux besoins en cas de guerre de haute intensité.
Le fabricant européen de missiles MBDA a profité du Sofins pour dévoiler sa gamme de drones explosifs, baptisés Akeron, ayant une portée de 5 à 50 kilomètres. Thales mise de son côté sur Toutatis, un engin de 4 kg, dont 1 de charge explosive, doté de petites ailes rétractables capable de marauder pendant 45 minutes dans un rayon de 10 kilomètres.
« On le lance en petite série et on souhaite arriver à en fournir en masse », explique Gilles Labit, le responsable du programme chez Thales. D’autres entreprises plus petites travaillent sur des drones en impression 3D capables de voler pendant 15 minutes et de percuter un autre drone ou une cible au sol à une vitesse de 200 km/h.
Aujourd’hui, un enjeu prime : « Produire vite et en masse », résume le délégué général de l’armement Emmanuel Chiva, selon qui des projets de collaboration entre fabricants de drones et l’industrie automobile devraient voir le jour en 2025, l’industrie sachant produire à la chaîne.
Sébastien Lecornu veut « sauter une génération technologique »
Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a déclaré fin février que la France avait pris du retard pendant pratiquement 15 ou 20 ans. “Mon objectif, ce n’est pas de rattraper ce retard, ce serait vain, c’est de sauter une génération technologique » d’une génération pour se remettre « au goût du jour », a-t-il déclaré. La France « se réarme massivement, on met beaucoup d’argent, on va sûrement en mettre encore plus dans les années qui viendront », a-t-il continué.
Le ministre a mis l’accent sur le développement « des munitions téléopérées, ou armes dites de saturation », destinées à « saturer les défenses d’un adversaire, pour créer un champ de bataille d’une autre nature ».
Des premières conventions de subventions sont prévues en juin lors du salon du Bourget, a précisé le ministère, indiquant que de premiers vols étaient attendus d’ici 2026 de la part des industriels. Une ambition de livraison des premiers systèmes est ensuite fixée à l’horizon 2027.
La loi française de programmation militaire 2024-2030 prévoit actuellement 413 milliards d’euros pour les armées, avec un budget progressant de plus de 3 milliards d’euros chaque année pour répondre aux besoins croissants imposés par la multiplication des tensions internationales.
L’Allemagne veut doter son armée de « drones kamikaze »
L’Allemagne va également doter son armée, la Bundeswehr, de « drones kamikaze », un type d’armement qui joue un rôle crucial dans la guerre russe en Ukraine, a indiqué début avril Mitko Müller, un porte-parole du ministère de la Défense.
Selon des médias allemands, ces drones seront produits par deux sociétés spécialisées dans l’intelligence artificielle (IA) de défense, Helsing et Stark, créées par des entrepreneurs allemands et parmi les plus en vue de ce secteur.
Le ministre de la Défense, Boris Pistorius, avait annoncé fin novembre la livraison de 4000 drones de l’entreprise Helsing à l’Ukraine. Les unités sophistiquées étaient destinées à agir sur une portée de 30 à 40 km en territoire russe afin « d’attaquer des postes de combat, des nœuds logistiques et autres », avait-il précisé.
Dans une Allemagne profondément pacifiste depuis les horreurs du nazisme, l’utilisation de drones armés et de systèmes d’armes automatisés pour l’attaque est restée très longtemps controversée. C’est l’invasion russe en Ukraine en février 2022 qui a changé les mentalités.
Les États-Unis s’appuient sur l’expertise ukrainienne
Au début du mois de mars, un organisme du ministère américain de la Défense a annoncé l’octroi de contrats de défense à deux partenariats ukraino-américains pour la construction de drones à longue portée.
Le projet, lancé l’année dernière, a un objectif clair : construire des drones « kamikazes » ou à usage unique, abordables et à longue portée. Ces drones doivent voler sur une distance de 300 km et travailler dans des conditions difficiles, telles que des conditions météorologiques extrêmes et des télécommunications perturbées.
Le fait que 60 % des destructions en Ukraine soient le fait de drones de frappe semble avoir guidé la décision du Pentagone d’aller au-delà des géants de l’armement établis et de s’associer à de nouvelles entreprises plus agiles, en particulier celles qui ont l’expérience du champ de bataille.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, les États-Unis se sont montrés réticents à utiliser des systèmes de missiles haut de gamme et coûteux contre des cibles russes, ce qui rend les drones plus petits et moins contraignants d’autant plus attrayants, et suffisamment bon marché pour être produits en masse.
La prolifération des drones chinois
Ces dernières années, la Chine est devenue l’un des principaux constructeurs, et exportateurs, de drones armés. Au cours des deux dernières décennies, le pays s’est lancé de manière agressive sur le marché des drones, devenant rapidement l’un des plus grands fabricants, proposant toutes sortes de produits, des drones de petite taille (tenant dans la main) aux grands drones de haute altitude – longue endurance (HALE).
Le Parti communiste chinois (PCC) et sa branche militaire, l’Armée populaire de libération (APL), ont entrepris de nombreux projets liés aux drones chinois depuis le début des années 2000. Mais la production massive des drones furtifs chinois a véritablement commencé au début du mandat de Xi Jinping.
Les UCAV chinois sont comparativement bon marché. Un drone Wing Loong coûte environ 1 million de dollars, soit environ un quart du coût du drone américain Predator, d’une taille et d’une technologie similaires.
La Chine applique généralement une politique de non-questionnement en matière de ventes d’armes. Ainsi Pékin est prêt à exporter des drones armés à des pays auxquels d’autres pays fabricants de drones, comme les États-Unis, ne veulent pas vendre, craignant que des civils puissent être pris pour cible par des gouvernements autoritaires.
Les UCAV chinois, même s’ils ne sont peut-être pas aussi performants ou de qualité aussi élevée que leurs concurrents, occupent une part du marché mondial essentielle et très lucrative. C’est pourquoi, les forces américaines et alliées risquent bientôt de se retrouver face à des adversaires armés d’UCAV chinois qui compliqueront les manœuvres militaires, marquant un tournant technologique majeur sur la nature des futures guerres.
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