L’Art et l’enfance

Par Epoch Times
8 avril 2016 09:29 Mis à jour: 19 mars 2021 01:26

Le musée Marmottan Monet consacre une exposition à l’enfance. L’exposition permet de suivre l’évolution du statut de l’enfant du XIVe au XXe siècle en France mais aussi ailleurs sans prétendre à l’exhaustivité.

76 œuvres sont présentées dont de nombreux chefs-d’œuvre. Les œuvres réunies proviennent des donations faites au musée ainsi que de prêts de collectionneurs et de grands musées en France et à l’étranger.

Vers la fin du XIXe siècle apparaissent les expositions thématiques, une branche des expositions dont la particularité est le portrait.

Le siècle des Lumières apporte un changement radical dans le regard porté sur l’enfant. Cet aspect prend de l’ampleur sous la Troisième République. L’enfant et les droits de l’enfant commencent à occuper une place centrale. Le changement de son statut se manifeste dans les nouvelles expositions. Après avoir été honorés de multiples manières, et pas seulement artistiques, dans le grand théâtre du Palais de l’Enfant de l’Exposition Universelle de 1889, les enfants sont présents accompagnés de leur mère. Plusieurs organisations charitables organisent des expositions pour financer des asiles de nuit pour femmes et enfants, des asiles maternels ou des traitements médicaux.

En 1901, le Petit Palais, tout nouveau musée des beaux-arts de la Ville de Paris allait, une fois encore, faire appel aux prêteurs parisiens pour illustrer avec plus de deux mille numéros les multiples aspects de l’enfance. Les expositions sur l’enfance et jouets d’enfants se multiplient. Entre 1910 et 1949, l’enthousiasme semble apaisé et le sujet perd de l’intérêt. En 1949, la galerie Charpentier présente l’exposition « L’Enfance ».

Le statut de l’enfant dans le miroir de l’art

Cette exposition, malgré sa taille réduite, vise à offrir un panorama chronologique complété de tout ce que les historiens, anthropologues ou sociologues nous ont appris depuis un siècle sur l’évolution du statut de l’enfance en France à travers ses représentations.

Jacques-Augustin-Catherine Pajou. Portrait de la famille de l’artiste. Vers 1802. Huile sur toile, 63 x 52 cm. (© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado)
Jacques-Augustin-Catherine Pajou. Portrait de la famille de l’artiste. Vers 1802. Huile sur toile, 63 x 52 cm. (© RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado)

À la fin du Moyen Âge, les représentations sont relativement peu courantes et l’enfant n’est bien souvent figuré que de manière accessoire. Elles restent modestes au XVIe siècle pour s’accroître sensiblement au siècle suivant. Si le siècle des Lumières témoigne à travers gravures, peintures et sculptures d’un intérêt grandissant pour l’enfant, c’est au XIXe siècle que le thème atteint incontestablement son apogée. Au XIVe siècle, il est souvent représenté accompagné mais jamais seul, sauf bien sûr dans les portraits des dauphins royaux ou dans les représentations de l’enfant Jésus. Pendant plusieurs siècles, ils sont décrits comme des adultes en miniature, tantôt par leurs vêtements tantôt par leurs gestes ou expressions. Le rôle de l’enfant était de continuer la filiation.

Les représentations de la famille faisaient partie de l’apparence, de l’image qu’on voulait montrer mais elles servaient également de trace ou de témoignage de leur existence si précaire à l’époque.

Le Portrait de la famille Habert de Montmor, attribué à Philippe de Champaigne et peint vers 1640-1645, constitue un bon exemple. Trois générations prennent la pose : deux grands-parents, le père, la mère et le fils aîné, l’héritier de la maison. Un second enfant, plus jeune, est porté par une femme en chaperon, figurée de dos comme pour signifier qu’elle ne fait pas partie de la famille.

De l’avenir de la famille à l’avenir de la patrie

Dans la première moitié du XVIIe  siècle, les frères Le Nain représentent les enfants qu’on ne montre pas, ceux des paysans.

Poussés par le goût d’une clientèle aisée qui, dans les années 1640, est sensible au retour du burlesque en littérature et à un certain réalisme artistique, ils peignent des scènes de genre où les familles paysannes sont fréquemment figurées entourées de leurs nombreux enfants. Contrairement aux enfants de l’aristocratie, les enfants des paysans sont présentés avec le charme de l’expression enfantine, du jeu, de l’étonnement, animés par la danse et la musique.

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Si à cette époque les enfants étaient considérés comme des êtres non finis proche des bêtes, au XVIIIe siècle, l’individualisation de l’enfant et son affirmation comme être à part entière devient évidente. Les Lumières se préoccupent de l’homme social, du bonheur individuel, des conditions de vie des sujets. L’heure est à la bienfaisance. L’enfant, qui était l’avenir de la famille, la manière pour le couple de se prolonger, incarne maintenant l’avenir du pays. L’enfant devient un enjeu politique, social et familial.

Avec ces nouvelles tendances, la pratique des nourrices qui séparent les enfants de leur mère est contestée au profit d’un mouvement d’allaitement maternel dans les milieux aisés. On parle désormais d’ « amour maternel ».

La représentation de l’apprentissage

L’éducation prend une place majeure et les enfants sont représentés dans des situations d’apprentissage : lisant ou posant devant un livre ouvert, feuilletant un ouvrage illustré, endormi sur un livre. Mais aussi en train de jouer.

Au début du XVIIIe siècle, l’enfant est représenté au sein d’une famille bourgeoise heureuse dont le bonheur est lié aux petits. Souvent plusieurs générations sont réunies dans un même tableau.

Pierre Mignard. Louise-Marie de Bourbon, duchesse d’Orléans, dite Mademoiselle de Tours. Vers 1681-1682. Huile sur toile, 132 x 96 cm.(© Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin)
Pierre Mignard. Louise-Marie de Bourbon, duchesse d’Orléans, dite Mademoiselle de Tours. Vers 1681-1682. Huile sur toile, 132 x 96 cm.(© Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin)

L’intimité familiale

Les impressionnistes nous font pénétrer dans l’intimité de leur cercle familial. Si l’étude reste un sujet important, c’est par le prisme du jeu que ces artistes représentent les enfants. Berthe Morisot, avec ses Pâtés de sable (1882), ou encore Claude Monet, qui peint sa famille dans son jardin d’Argenteuil, donnent à voir une enfance idéalisée.

Au début des années 1880, Berthe Morisot et les siens passent plusieurs étés à Bougival. Les scènes de la vie quotidienne lui inspirent de nombreuses toiles et témoignent de l’intimité familiale. Elle peint une scène insolite pour l’époque : celle d’Eugène Manet s’amusant avec sa fille, Julie, à un jeu de construction. Les représentations d’un père jouant avec ses enfants, qui sont de plus en plus fréquentes, permettent de suivre les changements au sein de la famille.

Dans le courant du XIXe siècle, s’ouvrent en ville de nombreux jardins publics pensant au bien-être de l’enfant. Félix Vallotton s’empare du thème de l’enfant au parc et donne, avec Le Ballon (1899), l’une de ses représentations les plus notoires. Le cadrage audacieux, la course de l’enfant vue de dessus semblent le faire voler, sa trajectoire se confondant avec celle du jouet. Plus que l’image d’une récréation, l’artiste livre une vision de l’enfant, infatigable et libre de toute entrave. Il renouvelle par là même l’imagerie familiale traditionnelle.

Au XXe siècle, on imite l’art brut et on imite également l’art des enfants. Picasso dira s’être entraîné toute sa vie pour pouvoir dessiner comme un enfant.

 

INFOS PRATIQUES

Musée Marmottan Monet

2, rue Louis-Boilly   75016 Paris

www.marmottan.fr

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