Le côté sombre du textile: qui paye le prix de la mode?

Par Epoch Times avec AFP
21 avril 2023 10:07 Mis à jour: 21 avril 2023 10:10

Outre l’effondrement du Rana Plaza qui causa la mort de 1138 ouvriers au Bangladesh, l’industrie textile a provoqué de nombreux scandales, mettant en lumière de sombres facettes d’une mode toujours plus éphémère.

En 2020, les rapports d’ONG et de think tanks se succèdent pour dénoncer l’exploitation de membres de la minorité musulmane ouïghoure du Xinjiang dans des champs, ateliers et usines fournissant des matières premières ou des produits finis. Les autorités chinoises sont accusées par les pays occidentaux d’avoir massivement enfermé des Ouïghours dans des camps de rééducation. L’ONU évoque la possibilité de « crimes contre l’humanité », des accusations fermement rejetées par Pékin.

Tirer profit d’une main d’œuvre corvéable et bon marché

Il est reproché à de grands noms du textile (Adidas, Lacoste, Gap, Nike, Puma, H&M, etc.) de tirer profit de ce « travail forcé ». Depuis, certaines marques se sont engagées à ne pas utiliser de coton du Xinjiang (un cinquième de la production mondiale) mais peinent à montrer patte blanche face à des sous-traitants en cascade. Quatre multinationales de l’habillement, dont Uniqlo France et Inditex (Zara, Bershka, Massimo Duti), sont visées depuis 2021 par une enquête en France pour « recel de crimes contre l’humanité ».

Les maigres rémunérations des salariés du textile du sous-continent indien sont régulièrement pointées du doigt. Mais au Royaume-Uni aussi. L’ONG Labour behind the label révélait, en 2020, que des ateliers, fournisseurs de la « fast fashion » ou mode éphémère, avaient recours à des pratiques quasi-esclavagistes. Selon des témoignages corroborés par plusieurs médias britanniques, les salaires oscillaient parfois entre 2 et 3 livres de l’heure, bien en dessous du revenu minimum de 8,72 livres (9,66 euros).

D’Haïti au Cambodge, en passant par la Birmanie, les employés du textile réclament régulièrement des hausses de salaires, notamment lors des manifestations – pour certaines violemment réprimées. D’après des organisations de défense des travailleurs, des milliers d’ouvrières syndiquées ont aussi été mises à la porte des ateliers de confection en Asie pendant la pandémie de Covid-19. Comme précédemment, à la suite de grèves et de manifestations.

Des conditions de travail dramatiques

Avant l’effondrement du Rana Plaza, plusieurs catastrophes s’étaient déjà produites dans les usines textile du Bangladesh, deuxième exportateur mondial de prêt-à-porter après la Chine. En 2012, un incendie avait provoqué la mort de 111 ouvriers au moins dans une usine de Dacca. Auparavant, d’autres incendies avaient causé la mort de 51 personnes à Chittagong et 47 autres à Shibpur.

L’ampleur de la catastrophe du Rana Plaza a entraîné, sous une intense pression internationale, des contrôles poussés des normes de sécurité dans quelque 1820 usines du pays, qui n’ont pas connu d’autre désastre d’ampleur depuis 2013.

Mais ces catastrophes n’ont pas été l’apanage du Bangladesh : au Pakistan, en 2012, une usine de textile avait été ravagée par un incendie, faisant près de 260 morts. En 2016, treize ouvriers étaient morts en Inde dans l’incendie de leur atelier de confection alors qu’ils y dormaient. Au Maroc, en février 2021, 29 employés sont morts noyés dans un atelier de confection textile, sans issue de secours, inondé par des pluies torrentielles.

De plus en plus de vêtements finissent à la poubelle

Les décharges sauvages de vêtements et de chaussures usagés grossissent dans les pays du Sud à la mesure de la production effrénée de la mode à bas coût. Bottes de pluie ou même après-ski atterrissent en plein désert d’Atacama, au Chili. La décharge de Dandora, aux portes de Nairobi, reçoit « 4000 tonnes » d’immondices chaque jour, dont beaucoup de textiles en provenance de pays occidentaux, selon Changing Markets Foundation. Les marques d’« ultra fast fashion » (Boohoo, Emmiol, SheIn …) avec leurs T-shirts à 5 euros et leurs robes à 8 repoussent les limites des petits prix en produisant encore plus que les géants de la fast fashion comme H&M ou Zara.

Les « articles bon marché terminent leur courte vie, jetés et brûlés dans d’immenses décharges à ciel ouvert, le long des rivières ou de la mer, avec de graves conséquences pour la population locale et l’environnement », dénonçait Greenpeace en 2022. Selon le rapport 2020 de l’ONG Climate Chance, l’industrie textile est responsable d’un tiers des rejets de micro-plastiques dans l’océan, et de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

La mode éphémère est le troisième secteur le plus consommateur d’eau et 70% des fibres synthétiques produites dans le monde proviennent du pétrole, selon l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

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