Le risque que représente le coronavirus pour les Ouïghours de Chine impose des mesures concrètes

Par David Kilgour
14 février 2020 16:32 Mis à jour: 14 février 2020 16:32

Les mauvais traitements infligés aux Ouïghours et aux autres musulmans du Xinjiang, en Chine, peuvent être mieux compris en se concentrant sur une seule victime.

Asa (pseudonyme) avait quitté le Xinjiang pour aller travailler en Égypte. En 2015, elle a emmené ses triplés en bas âge dans le Xinjiang pour rendre visite à ses parents, ce qui fut le début d’un cauchemar de trois ans alors qu’elle a vécu la séparation forcée de ses enfants et une détention dans des « centres de formation professionnelle », en plus d’avoir été témoin de la mort de ses compagnons de cellule et la mort d’un de ses bébés.

En 2018, l’ambassade égyptienne a aidé Asa à sortir de prison. Elle et ses deux enfants sont maintenant réfugiés aux États-Unis, mais son expérience reflète celle de nombreux Ouïghours.

La dissimulation précoce de l’épidémie de coronavirus à Wuhan pendant plusieurs semaines en décembre 2019 a infecté plusieurs milliers de personnes dans la région et alors qu’il s’est maintenant propagé dans 28 pays. Les cadres du Parti communiste ont choisi, dans un premier temps, de garder le secret avant d’admettre l’existence d’une crise galopante. Le Dr Li Wenliang, 34 ans, qui a héroïquement alerté d’autres médecins sur le nouveau virus, a été contraint de signer une déclaration qualifiant son avertissement d’infondé et d’illégal. Sa mort causée par le virus le 6 février a provoqué un flot de tristesse et de colère dans toute la Chine.

On craint que le virus ne se propage au Xinjiang, où l’on estime qu’entre 1 et 3 millions de Ouïghours sont détenus dans des centaines de camps. Adrian Zenz, un des principaux chercheurs sur les internements de masse au Xinjiang, a écrit sur Twitter : « Le coronavirus pourrait ajouter une dimension entièrement nouvelle à la crise du Xinjiang. »

Radio Free Asia rapporte que les mauvaises conditions sanitaires et l’exiguïté des quartiers dans les camps pourraient faciliter une épidémie, conduisant à une « catastrophe massive », comme l’a dit un expert.

Zenz estime qu’il y a maintenant au moins un million de Ouïghours incarcérés à travers le Xinjiang et exposés à des heures interminables de « rééducation ». L’objectif du lavage de cerveau est de « tuer la mémoire de ce qu’ils sont, d’effacer leur identité, leur langue et leur histoire distinctes », a-t-il déclaré lors d’une conférence au Centre Fairbank d’études chinoises de l’Université Harvard.

En 2017, le leader chinois Xi Jinping a commencé à ériger un goulag de « rééducation » pour les communautés musulmanes, similaire aux camps de travail forcé établis pour les pratiquants de Falun Gong après la mi-1999. Les deux réseaux accueillent des détenus arrêtés par la police sans audience, procès ou appel – une pratique inventée par l’Union soviétique de Staline et adoptée sous le Troisième Reich d’Hitler.

Le prélèvement d’organes sur les prisonniers ouïghours a précédé celui du Falun Gong (qui a commencé en 2001). Le Dr Enver Tohti, un Ouïghour, a déclaré qu’en 1995, alors qu’il était chirurgien général dans un hôpital d’Urumqi, il a été emmené sur un lieu d’exécution par les autorités de l’hôpital et a retiré les reins et le foie d’un homme qui était vivant lorsque l’opération a commencé.

Dans son livre The Slaughter (pourrait se traduire en français par : « Le massacre » – ndt), publié en 2014, Ethan Gutmann estime que les organes de 65 000 adeptes du Falun Gong et de 2 000 à 4 000 Ouïghours, Tibétains et chrétiens ont été prélevés de force en Chine entre 2000 et 2008.

M. Tohti a rendu public une photographie du « Human Organ Transportation Green-Path » (littéralement : « Chemin vert du transport d’organes humains » – ndt) à l’aéroport d’Urumqi, qui accélère le transport d’organes pour les receveurs du monde entier. La photo montrant un panneau de voie prioritaire marqué : « Special Passengers, Human Organ Exportation Lane » (passagers spéciaux, voie d’exportation d’organes humains) a été diffusée sur les médias sociaux.

Le Dr Maya Mitalipova, de l’Institut Whitehead pour la recherche biomédicale au MIT, a déclaré : « Toutes les populations ouïghoure, kazakhe et musulmane du Xinjiang ont été soumises à un examen médical rigoureux et des échantillons de sang ont été prélevés depuis 2016. Ces procédures n’ont été effectuées que sur la population musulmane. »

Le Centre saoudien pour les transplantations d’organes a indiqué que ses citoyens achetaient des organes au marché noir et les faisaient transplanter illégalement en Chine. Les reins et les foies prélevés sur des Ouïghours détenus se vendent entre 150 000 et 152 000 euros.

Encerclés par des fils barbelés, des caméras de surveillance et des gardes armés, les camps de travail obligent les Ouïghours, les Kazakhs et d’autres minorités à travailler pour un salaire faible ou nul.

Les gouvernements et les entreprises responsables du monde entier devraient se joindre aux États-Unis et à l’Australie pour boycotter toute personne faisant des affaires au Xinjiang. Le travail forcé dans les camps d’internement empoisonne la chaîne d’approvisionnement d’un certain nombre d’entreprises bien connues des nations démocratiques qui y opèrent.

La législation mondiale Magnitsky permet aux gouvernements qui en disposent d’imposer plus facilement des sanctions financières et des sanctions relatives sur les visas aux fonctionnaires des pays autoritaires qui violent les droits de l’homme.

La communauté internationale devrait demander à Pékin d’autoriser la Croix-Rouge internationale et l’Organisation mondiale de la santé à accéder aux camps du Xinjiang pour surveiller ce qui est fait, le cas échéant, pour endiguer la propagation du coronavirus.

À son crédit, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté en décembre la loi ouïghoure sur la politique des droits de l’homme de 2019. Si ce projet de loi devient loi, il marquera la plus importante tentative internationale de pression sur Pékin concernant sa détention massive d’Ouïghours et d’autres minorités musulmanes.

David Kilgour, avocat de profession, a servi à la Chambre des communes du Canada pendant près de 27 ans. Dans le cabinet de Jean Chrétien, il a été secrétaire d’État (Afrique et Amérique latine) et secrétaire d’État (Asie-Pacifique). Il est l’auteur de plusieurs livres et co-auteur avec David Matas de Bloody Harvest : The Killing of Falun Gong for Their Organs (littéralement : Prélèvements meurtriers : le meurtre des pratiquants de Falun Gong pour leurs organes).

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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