Les médias d’État chinois renforcent à nouveau leur propagande en accusant les États-Unis d’être à l’origine du virus

Par Eva Fu
12 août 2021 21:12 Mis à jour: 12 août 2021 21:12

Alors que les services de renseignement américains doivent publier un rapport sur les origines du Covid-19 dans quelques semaines, le régime chinois a déclenché une nouvelle vague de propagande et de désinformation visant à désigner les États-Unis comme la source de la pandémie.

Au cours des dernières semaines, le régime a redoublé d’efforts pour établir un lien entre le virus et l’Institut de recherche médicale sur les maladies infectieuses de l’armée américaine, situé sur la base militaire de Fort Detrick, dans le Maryland, une théorie proposée pour la première fois par un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères l’année dernière, malgré l’absence de preuves.

Cette campagne de propagande concertée intervient alors que le régime fait l’objet d’une attention internationale croissante pour savoir si le virus du Covid-19 provient d’un laboratoire chinois de Wuhan, où il a commencé à se propager. Pendant ce temps, en Chine, un variant Delta du virus, qui se propage rapidement, remet en question la coûteuse stratégie de confinement de Pékin.

Le 29 juillet, le journal d’État Science and Technology Daily, que le régime a décrit comme « un important canal publicitaire pour les autorités centrales chinoises », a publié un article citant World News Network, un agrégateur d’informations en anglais basé aux États-Unis, selon lequel l’armée américaine aurait propagé le virus Covid-19 en Europe par le biais d’une collecte de sang. La source de ces accusations sans fondement semble provenir d’un média italien.

Un autre article du 4 août en anglais, rédigé par les journalistes du World News Network et citant des experts anonymes, prétendait, sans preuve, que certains patients qui ont contracté la pneumopathie associée au vapotage (PAV), en juillet 2019, pourraient avoir été des patients atteints de Covid-19.

Des militaires montent la garde devant l’Institut de recherche médicale sur les maladies infectieuses de l’armée américaine à Fort Detrick, le 26 septembre 2002. (Olivier Douliery/AFP via Getty Images)

Global Times, un tabloïd chinois d’État connu pour ses tonalités belliqueuses, est allé plus loin en organisant une pétition qui demande une enquête de l’Organisation mondiale de la santé sur le laboratoire de Fort Detrick. La pétition a été largement promue sur d’autres médias chinois. Le média affirme avoir réuni un total de 25 millions de signatures en trois semaines.

D’autres médias contrôlés par l’État ont exprimé des points de vue similaires. Le 29 juillet, la chaîne de télévision CCTV a diffusé une séquence de 20 minutes accusant les États-Unis de « s’engager dans le terrorisme de traçage des origines ».

Des mèmes et des illustrations anti-américains – comme celui décrivant les États-Unis comme un « super-épandeur », et un autre énumérant 8 prétendus échecs des États-Unis – ont également été promus par les médias d’État sur les médias sociaux chinois et internationaux.

La branche étrangère de CCTV, CGTN, a produit un dessin animé suggérant que la théorie de la fuite du laboratoire a été concoctée par la Central Intelligence Agency (CIA), qu’elle a surnommée « Agence des conspirations inventées ».

Une pression agressive

En janvier, un groupe dirigé par l’OMS s’est rendu à Wuhan pour enquêter sur les origines du virus et, dans un rapport conjoint avec des scientifiques chinois, a dit qu’il était « extrêmement improbable » que l’épidémie ait pu résulter d’une fuite de virus d’un laboratoire de Wuhan.

Depuis lors, des scientifiques et des dirigeants du monde entier ont exprimé des inquiétudes quant à l’intégrité du rapport de l’OMS, étant donné que le régime n’a pas fourni aux enquêteurs des données brutes cruciales ni autorisé l’accès aux dossiers de l’Institut de virologie de Wuhan (WIV).

« Nous demandons à la Chine d’être transparente, ouverte et de coopérer, notamment en ce qui concerne les informations, les données brutes que nous avons demandées dans les premiers jours de la pandémie », a dit le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors d’une conférence de presse le 15 juillet.

Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, assiste à une conférence de presse organisée par l’Association genevoise des correspondants des Nations Unies (ACANU) dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, causée par le nouveau coronavirus, au siège de l’OMS à Genève, le 3 juillet 2020. (Fabrice Coffrini/AFP via Getty Images)

Mais la conclusion du rapport de l’OMS a été utile aux responsables chinois et aux journaux d’État dans leurs efforts pour repousser la surveillance internationale croissante.

S’emparant du rapport comme d’un moyen de réfuter les critiques extérieures, un certain nombre de médias d’État ont affirmé que les États-Unis avaient « kidnappé des experts de l’OMS » pour « salir » la Chine.

« En inventant des conspirations, en réprimant les scientifiques, en politisant la recherche de l’origine, les États-Unis sont sans aucun doute ce ‘kidnappeur politique’ qui tente d’inverser le noir et le blanc », peut-on lire dans un article de la chaîne d’État China News du 1er août. Il a été publié sur le site officiel de la Commission de la santé de la province de Hebei le lendemain.

Le mois dernier, le régime chinois a rejeté une proposition de l’OMS concernant la deuxième phase de l’enquête sur les origines du virus, qui comprenait un audit des laboratoires de Wuhan. Pékin a ensuite soumis une « proposition chinoise », dans laquelle il insiste pour que la nouvelle enquête se concentre sur d’autres régions du monde, et que « ce qui a déjà été mené au cours de la première phase » ne soit pas répété.

« Ils veulent utiliser cette seconde enquête pour mieux dissimuler les faits », a dit à Epoch Times Su Tzu-yun, directeur de l’Institut de recherche sur la défense et la sécurité nationales basé à Taïwan.

Sur les plateformes occidentales telles que Twitter et Facebook, qui restent bloquées en Chine, les diplomates chinois ont redoublé leur rhétorique agressive visant les États-Unis.

« Si les États-Unis continuent à ne rien faire et à crier aveuglément ‘CHINE !’, alors le virus politique, c’est eux », a écrit Zhao Lijian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, dans un tweet du 5 août qui comprenait une caricature d’un virus pathogène se moquant de l’Oncle Sam aux yeux bandés par un masque. Le tweet a été partagé 1 400 fois.

Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, remballe ses notes après s’être exprimé lors du point de presse quotidien à Pékin, le 8 avril 2020. (Greg Baker/AFP via Getty Images)

Zhao Lijian s’est fait connaître l’année dernière pour avoir avancé une théorie du complot selon laquelle le virus aurait été introduit à Wuhan par l’armée américaine.

Lors d’une récente conférence de presse, M. Zhao a également demandé une enquête sur le laboratoire Baric de l’université de Caroline du Nord, dirigé par le virologue Ralph Baric, connu pour son expertise dans la création de virus en laboratoire. Il n’a pas mentionné le fait que M. Baric, qui a signé en mai une lettre soutenant un examen plus approfondi de la théorie de l’origine de la fuite en laboratoire, avait travaillé avec le WIV et publié en 2015 un article scientifique sur un virus similaire au SRAS chez les chauves-souris chinoises, avec la virologue Shi Zhengli du laboratoire de Wuhan comme co-auteur.

« Ce ne sont pas des diplomates étrangers, ils ressemblent plutôt à des chefs de syndicats terroristes, arrogants et péremptoires », a dit Chen, un écrivain de la province du Guangdong, dans le sud de la Chine, qui n’a donné que son nom de famille en parlant avec Epoch Times.

« Vous bloquez l’enquête internationale parce que vous vous sentez anxieux », a-t-il ajouté.

Certains pays occidentaux ripostent aux tentatives de désinformation du régime. Le 10 août, l’ambassade de Suisse en Chine a dit sur Twitter qu’un biologiste suisse récemment cité par de nombreux médias chinois n’existe probablement pas et a demandé le retrait des « fausses nouvelles ». Les médias chinois ont cité une personne nommée « Wilson Edwards », un prétendu biologiste suisse, qui a discuté des origines du virus et critiqué l’indépendance de l’OMS.

Les citations ont été rapidement effacées. Un article du Global Times du 30 juillet sur les affirmations de Wilson Edwards a discrètement disparu de la vue. Dans le quotidien d’État China Daily, deux paragraphes d’un article du 10 août citant le soi-disant biologiste ont également été supprimés.

Le parti est « devenu encore pire »

Dans environ 2 semaines, la communauté du renseignement américain doit présenter au président Joe Biden un rapport sur les conclusions de l’enquête de 3 mois sur l’origine du virus.

Le 2 août, un rapport de la Chambre des représentants républicaine a conclu à une « prépondérance de preuves«  – allant des tentatives de « cacher ou dissimuler » les recherches effectuées au WIV aux protocoles de sécurité laxistes des laboratoires – indiquant qu’une fuite accidentelle du laboratoire serait la source la plus probable de la pandémie.

En mai 2019, quelques mois avant l’épidémie, le directeur du laboratoire P4 du WIV, Yuan Zhiming, s’était inquiété des lacunes en matière de sécurité dans les laboratoires biologiques chinois de haut niveau, disant que « la sensibilisation à la biosécurité, les connaissances professionnelles et la formation aux compétences opérationnelles » devaient être améliorées au sein du personnel de laboratoire.

Des opérateurs travaillent à côté d’une cage avec des souris (D) à l’intérieur du laboratoire P4 à Wuhan, capitale de la province chinoise du Hubei, le 23 février 2017. (Johannes Eisele/AFP via Getty Images)

Malgré les « actions du régime chinois pour détourner le blâme », sa crédibilité a été entravée par un passé de dissimulation d’informations défavorables, selon l’analyste de la Chine Su Tzu-yun, qui a cité en exemple la dissimulation par les autorités du véritable bilan des morts et des dégâts causés par les récentes inondations dans le centre de la Chine.

« Nous devons noter que l’essence du Parti communiste chinois n’a pas changé, mais a seulement empiré », a-t-il dit. La récente décision de Pékin de suspendre l’émission de passeports chinois en raison de la pandémie est probablement le signe d’une crise interne plus importante, a-t-il ajouté.

Chen, l’écrivain chinois, souscrit également à la théorie de la fuite de laboratoire. Il dit que les autorités chinoises « portent de fausses contre-accusations » à l’encontre des tireurs d’alerte occidentaux tout en étouffant la dissidence en Chine.

« Dès que quelqu’un en Chine mentionne les origines de la pandémie dans une conversation sur WeChat ou QQ, les comptes et les groupes sont suspendus », a-t-il dit en faisant référence aux deux applications de médias sociaux chinoises appartenant à Tencent.

« Cette question est trop sérieuse et ils ont peur », a-t-il ajouté. « Par conséquent, ils retarderont, dissimuleront, mentiront et fuiront la responsabilité tant qu’ils le pourront. »

Eva Fu est une rédactrice basée à New York pour Epoch Times. Elle s’intéresse aux relations entre les États-Unis et la Chine, à la liberté religieuse et aux droits de l’homme.

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