Des partenariats exigeants entre entreprises et ONG accélèrent l’apprentissage de la RSE

janvier 12, 2017 9:42, Last Updated: janvier 12, 2017 9:42
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La définition et la mise en œuvre d’une démarche de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) suppose des changements profonds dans les pratiques et la stratégie, voire dans le business model. L’entreprise doit engager un processus d’apprentissage organisationnel pour revoir ses manières de faire et de penser.

Les parties prenantes

Dans cette perspective, le dialogue avec les parties prenantes est essentiel. Il ne permet pas uniquement de comprendre, ou même d’anticiper les attentes des salariés, des clients, des fournisseurs ou de la société civile ; il permet également et surtout d’accélérer et de maintenir dans la durée le processus d’apprentissage de la RSE.

Pour le démontrer, il suffit de regarder l’exemple des partenariats entre entreprises et ONG qui se multiplient en France et touchent désormais des entreprises de secteurs et de tailles très différents. Depuis plus de 10 ans le WWF France suit cette voie en signant des partenariats stratégiques grâce à une méthodologie lui permettant de nouer des relations à la fois constructives et exigeantes pour améliorer l’impact des entreprises sur la planète.

L’apprentissage de la RSE

On peut identifier cinq étapes du processus d’apprentissage de la RSE. Il s’agit de définir les objectifs du changement, puis d’acquérir des connaissances et des compétences, de les diffuser et de les mettre en œuvre, puis de s’assurer que l’apprentissage s’inscrive dans la durée dans une logique d’amélioration continue. Un partenariat bien construit avec une ONG permet d’accélérer chacune de ces cinq étapes.

Avant même de commencer à apprendre, il convient de constater la nécessité de changer les pratiques développées dans l’entreprise et de se fixer des objectifs à atteindre pour améliorer l’impact social ou environnemental. Faire cet exercice seul peut s’avérer difficile pour les managers de l’entreprise, tellement les enjeux de la RSE sont larges et complexes. Il y a un fort risque que l’entreprise disperse ses énergies en tentant d’agir sur des enjeux qui ne sont pas essentiels aux yeux des parties prenantes ou qui ne permettent pas d’obtenir des résultats à moyen terme.

Collaborer avec une ONG

En travaillant avec une ONG qui a développé une expertise dans le domaine concerné, l’entreprise se donne les moyens de définir des objectifs à la fois ambitieux et réalistes. Ainsi, dans le cadre de son partenariat avec le WWF et pour agir en faveur de la biodiversité marine, Carrefour a stoppé la commercialisation d’espèces de grands fonds comme le brosme, le grenadier et le sabre noir, et s’est fixé pour objectif de multiplier le nombre de produits certifiés MSC, le label de pêche durable.

Une fois l’ambition et les objectifs précis définis, l’entreprise doit acquérir des connaissances et compétences pour les atteindre. Elle peut bien entendu chercher si ces connaissances et compétences existent ou peuvent être développées en interne.

Elle peut également faire appel à des consultants externes. Là encore, une approche intéressante serait de s’appuyer sur l’expertise d’une ONG spécialisée dans le domaine, afin de gagner du temps et s’inscrire dans une logique gagnant-gagnant. Ainsi, dans le cadre de son partenariat avec Tetra Pak, le WWF a aidé l’entreprise à réaliser une analyse du cycle de vie des emballages de boissons.

Diffuser la démarche RSE

En raison du caractère transversal de la RSE, il est ensuite important de diffuser les connaissances et compétences auprès de l’ensemble des salariés de l’entreprise. Dans la mesure où il s’agit de transformer l’ensemble de la stratégie et des pratiques de l’entreprise, il convient d’étendre ce savoir au-delà de la seule direction de la RSE, sensibiliser et former le plus largement possible, notamment les acheteurs, les équipes marketing et les contrôleurs de gestion.

Si le rôle de la direction générale est essentiel pour stimuler cette diffusion dans l’entreprise, l’intervention d’une ONG peut accroître l’attention des salariés. Le WWF développe ainsi de nombreuses actions pour sensibiliser les salariés aux enjeux environnementaux et aux objectifs du partenariat avec l’entreprise. Au-delà des interventions dans les réunions de l’entreprise, l’ONG organise notamment chaque année un « Pandathlon » qui permet de fédérer les salariés des entreprises partenaires autour d’un défi environnemental.

Une mise en œuvre délicate

Cependant, il ne suffit pas que les connaissances et compétences soient diffusées dans l’entreprise ; il faut qu’elles soient réellement mises en œuvre. Beaucoup d’entreprises savent ce qu’elles devraient faire pour améliorer leur performance en matière de RSE, mais ne passent pas à l’acte car il est difficile de remettre en cause les manières actuelles de penser et de faire.

Un partenariat avec une ONG renforce considérablement les chances d’une mise en œuvre réelle des actions en matière de RSE car l’ONG rappellera ses engagements à l’entreprise si jamais elle ne progresse pas suffisamment vite.

Le WWF publie ainsi chaque année un rapport sur les différents partenariats que l’ONG a noué avec les entreprises, en faisant état tant des avancées que des progrès à réaliser. Une telle transparence garantit une certaine indépendance de l’ONG, tout en constituant un levier puissant pour amener l’entreprise à respecter ses engagements.

Une adaptation permanente

La RSE ne se limite pas à une liste d’actions prédéfinies, mais suppose une adaptation permanente aux attentes des parties prenantes. Au fur et à mesure que l’entreprise progresse, de nouveaux enjeux vont apparaître et nécessiter que l’entreprise continue à s’adapter dans une logique d’amélioration continue.

L’échange régulier avec les parties prenantes favorise une telle dynamique et stimule l’innovation. Les partenariats stratégiques du WWF ont une durée de trois ans et sont souvent renouvelés au moins une ou deux fois, ce qui permet d’établir des relations de long terme et de créer progressivement une confiance permettant d’interroger de plus en plus la stratégie et le business model des entreprises partenaires. Des plans d’action annuels sont l’occasion de vérifier l’atteinte des objectifs fixés et d’en définir de nouveau pour pousser l’entreprise à progresser.

Au-delà des avantages en termes d’image d’un partenariat avec une ONG, une telle coopération constitue ainsi un vrai levier pour permettre à l’entreprise d’avancer dans sa démarche RSE et donc de renforcer sa compétitivité. Reste à trouver l’ONG qui dispose de l’expertise adaptée aux objectifs de l’entreprise, qui a envie de travailler avec le monde économique et qui a une démarche structurée de partenariat.

André Sobczak, Directeur académique & titulaire de la chaire RSE, Audencia Business School

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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