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Pékin intensifie la pression pour contrôler les eaux disputées

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Le tout premier porte-avions construit en Chine, le Shandong, a fait son entrée dans les eaux de Hong Kong à son arrivée le 3 juillet 2025.

Photo: Peter Parks/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 8 Min.

Le Parti communiste chinois (PCC) multiplie les efforts pour affirmer son contrôle sur les îles Senkaku, le détroit de Taïwan, ainsi que sur les mers de Chine méridionale et orientale, la mise en service annoncée du porte-avions Fujian symbolisant une expansion majeure de ses capacités navales – au risque d’accroître la probabilité d’une confrontation avec les États-Unis et leurs alliés.
Dans la matinée du 14 septembre, deux navires chinois armés de canons ont pénétré dans les eaux territoriales japonaises près de Minamikojima, aux îles Senkaku, en mer de Chine orientale. La garde côtière japonaise a signalé la présence des bâtiments vers 7 heures et les a suivis tout en leur lançant des injonctions de quitter immédiatement les lieux. Bien que les îles Senkaku soient administrées par le Japon, la Chine continue de les revendiquer. Tokyo maintient qu’elles font partie intégrante de son territoire national, sur la base de l’histoire et du droit international, rejetant toute remise en cause de sa souveraineté.
La menace du PCC sur les îles Senkaku pourrait facilement déclencher un conflit impliquant les États-Unis. Selon le traité de sécurité nippo-américain, signé en 1951 puis révisé en 1960, Washington est tenu, par l’article 5, de défendre le Japon en cas d’attaque armée sur tout territoire qu’il administre.
Si les États-Unis ne prennent pas position sur le différend de souveraineté, ils reconnaissent l’administration effective du Japon sur ces îles. Les responsables américains rappellent à plusieurs reprises que l’article 5 couvre bien les Senkaku, signifiant que Washington serait légalement tenu d’appuyer Tokyo si le régime chinois recourait à la force.
Quelques jours avant cet incident, le tout dernier porte-avions chinois, le Fujian, a franchi pour la première fois le détroit de Taïwan alors qu’il menait encore des essais en mer, en amont de sa mise en service prévue cette année. L’armée japonaise a également repéré le Fujian près des îles Senkaku le 11 septembre, accompagné de deux destroyers.
Pékin a affirmé que le navire se rendait en mer de Chine méridionale à des fins de formation et de tests scientifiques, insistant sur la routine du trajet, sans aucune cible particulière. Ce déplacement porte néanmoins une forte charge symbolique, dans la mesure où le Parti communiste réaffirme ses prétentions tant sur le détroit de Taïwan que sur Taïwan lui-même.
À la même période, le destroyer américain USS Higgins et la frégate britannique HMS Richmond ont également traversé le détroit de Taïwan, provoquant de vives mises en garde de la part de Pékin, qui a dénoncé une atteinte à la stabilité régionale avant de déployer des moyens navals et aériens en surveillance.
Washington et Londres ont rétorqué que l’opération était conforme au droit international, réaffirmant que le détroit se situe en dehors des eaux territoriales de tout État et que la liberté de navigation doit y être respectée.
Plus tôt ce mois-ci, des bâtiments de guerre canadiens et australiens avaient également traversé le détroit, dans le cadre de passages réguliers pratiqués environ une fois par mois par les États-Unis et d’autres alliés tels que le Royaume-Uni et la France.
Les États-Unis réaffirment depuis longtemps que le détroit de Taïwan constitue des eaux internationales, et non un territoire chinois, et le démontrent à travers des opérations régulières de « Freedom of Navigation Operations » (FONOPS) dans l’Indo-Pacifique. Selon l’administration précédente, au cours des quatre dernières années, le Pentagone a « contesté plus d’une douzaine de revendications maritimes excessives », tout en multipliant les exercices bilatéraux et multilatéraux avec ses alliés pour renforcer la coopération et défendre un espace indo-pacifique libre et ouvert, en particulier en mer de Chine méridionale.
Selon la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS), à laquelle la Chine a adhéré, les États côtiers disposent d’une mer territoriale de 12 milles nautiques (22 kilomètres). Pékin revendique cette zone autour de son territoire continental et de Taïwan, puisqu’il refuse de reconnaître la souveraineté de l’île. Cependant, le détroit de Taïwan reste traversé par un couloir d’eaux et d’espace aérien internationaux hors de toute mer territoriale, où tous les États jouissent de droits de navigation, de survol et d’autres usages licites.
La Chine ne dispose que d’une compétence limitée dans sa zone contiguë et sa zone économique exclusive, sans y exercer de souveraineté. Même au sein de la mer territoriale, l’UNCLOS autorise le « passage inoffensif » des navires étrangers, dans la mesure où leurs activités ne menacent ni la paix, ni l’ordre, ni la sécurité de l’État côtier.
Depuis cinq ans, le PCC a accentué sa pression militaire sur Taïwan avec des exercices réguliers et des violations de plus en plus fréquentes de l’espace maritime et aérien taïwanais. Le Conseil des affaires continentales de Taïwan a averti que Pékin se préparait à une invasion.
L’Union européenne et le secrétaire d’État américain Marco Rubio ont dénoncé le développement des ambitions territoriales de la Chine dans le détroit de Taïwan et en mer de Chine méridionale, y compris l’entreprise de Pékin visant à faire du récif de Scarborough une pseudo-réserve naturelle.
Il apparaît que le PCC intensifie ses efforts pour s’imposer sur les îles Senkaku, le détroit de Taïwan, les mers de Chine orientale et méridionale, et, à terme, sur l’île de Taïwan elle-même. Le récent passage du Fujian représentait son neuvième essai en mer depuis mai 2024, ce qui alimente les spéculations quant à une mise en service imminente, à l’instar du Shandong, entré en activité peu de temps après son propre passage dans le détroit en 2019.
En tant que troisième porte-avions chinois, le Fujian rejoint le Liaoning et le Shandong. Avec trois unités, la Chine pourrait en affecter un à la maintenance, un à la formation en mer de Chine méridionale et un à la patrouille du Pacifique occidental. Ce dispositif lui donnerait la capacité de projeter sa puissance à l’est de Taïwan, menaçant directement les défenses de l’île. Un tel bouleversement complique grandement la capacité de Taïwan à intercepter les groupes aéronavals chinois, expose ses forces à des frappes à longue portée et permettrait à Pékin de décréter un blocus ou de mener des opérations de déni jusqu’à la ligne Guam-Taïwan.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Antonio Graceffo, docteur en philosophie, a passé plus de 20 ans en Asie. Il est diplômé de l'Université des sports de Shanghai et titulaire d'un MBA chinois de l'Université Jiaotong de Shanghai. Il travaille aujourd'hui comme professeur d'économie et analyste économique de la Chine, écrivant pour divers médias internationaux.

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