Pourquoi les aliments transformés pourraient secrètement augmenter la tension artérielle

Une étude récente a montré que les additifs courants à base de phosphate, utilisés pour conserver la fraîcheur et la saveur des aliments emballés, pourraient faire monter la tension artérielle.

Menée sur des rats de laboratoire pendant 12 semaines, l’étude a révélé que les phosphates inorganiques pourraient contribuer à l’hypertension en stimulant la libération d’une substance chimique appelée facteur de croissance des fibroblastes 23 (FGF23).

Comment les conservateurs alimentaires augmentent la tenson artérielle

Les chercheurs ont découvert que les régimes riches en phosphates entraînent une accumulation de la protéine spécifique FGF23 dans le sang. Cette protéine traverse ensuite des régions cérébrales cruciales qui contrôlent la tension artérielle, y compris le tronc cérébral.

Les résultats suggèrent que cet effet se produit parce que des niveaux élevés de phosphate incitent le corps à libérer du FGF23. Ce dernier traverse la barrière hémato-encéphalique et stimule certains récepteurs qui augmentent l’activité nerveuse sympathique, ce qui finit par provoquer de l’hypertension.

De plus amples expériences indiquent que cela implique l’activation d’une protéine appelée calcineurine, connue pour influencer l’activité nerveuse et la fonction cardiaque.

Phosphates naturels contre phosphates inorganiques

Toutes les formes de phosphates ne sont pas égales, suggère la recherche. Les résultats concernent principalement le phosphate inorganique, a déclaré le Dr Wanpen Vongpatanasin, l’un des auteurs de l’étude et experte en hypertension.

Alors que les légumes contiennent naturellement des quantités élevées de phosphate, celui-ci existe sous une forme organique que le corps absorbe mal – seulement 40 à 60 % sont absorbés dans les intestins.

En revanche, les phosphates inorganiques ajoutés lors de la transformation des aliments ont un taux d’absorption dépassant 90 %, ce qui les rend beaucoup plus susceptibles d’atteindre des niveaux problématiques dans la circulation sanguine.

Les additifs de phosphate, couramment utilisés comme conservateurs et exhausteurs de goût dans les aliments transformés et les boissons gazeuses, sont très facilement absorbables, a-t-elle souligné.

« Les légumes contiennent également de grandes quantités de phosphate, mais il se présente sous forme de phosphate organique, qui n’est pas facilement absorbé dans l’intestin. Par conséquent, ils n’ont pas le même profil d’effets secondaires », a souligné le Dr Vongpatanasin.

L’excès de phosphate lié à d’autres problèmes de santé

Le problème du phosphate va au-delà des préoccupations cardiovasculaires, selon Holly Huhlein, diététiste-nutritionniste agréée, qui n’a pas participé à l’étude.

« C’est l’une des raisons pour lesquelles la surconsommation d’aliments hautement transformés, comme les produits de boulangerie, les produits laitiers transformés et les collations hautement transformées, n’est pas recommandée », a expliqué Holly Huhlein.

Elle a noté que si les phosphates dans les aliments hautement transformés aident à les conserver et à mélanger les ingrédients, consommer trop de phosphate peut potentiellement entraîner une structure osseuse affaiblie, des lésions rénales et un risque accru de problèmes cardiaques en raison du déséquilibre du rapport calcium/phosphore dans le corps.

« Nous avons tendance à stocker le phosphate aux côtés du calcium dans le corps, dans nos os, et notre corps fait naturellement un excellent travail de gestion de nos niveaux de phosphate en équilibrant les hormones et d’autres minéraux », a-t-elle expliqué.

Des niveaux élevés de phosphate peuvent amener le corps à extraire le calcium des os.

Cependant, Holly Huhlein a précisé que les phosphates sont également un minéral essentiel pour le corps et sont importants pour de nombreuses fonctions corporelles, y compris la création de l’ADN, la structure cellulaire, la minéralisation osseuse et l’utilisation de l’énergie.

Qui devrait le plus s’en préoccuper ?

Pour la population générale en bonne santé, a déclaré Holly Huhlein, le phosphate n’est pas une source d’inquiétude lorsqu’on suit un régime alimentaire équilibré composé de sources de protéines maigres (animales et végétales), de céréales complètes, de fruits et de légumes.

Elle a ajouté que l’inquiétude peut venir d’un régime alimentaire plus riche en aliments hautement transformés qui, en plus de contenir généralement plus d’additifs comme les phosphates, contiennent également des quantités plus élevées de graisses saturées et de sucres ajoutés que l’on encourage à limiter.

« Pour cette raison », a poursuivi Holly Huhlein, « si on se concentre sur la consommation de la majorité des nutriments provenant de sources alimentaires complètes tout en consommant occasionnellement des aliments stables ou hautement transformés, la consommation de phosphate n’est pas une préoccupation ».

Cependant, certaines populations ayant des besoins alimentaires particuliers – comme celles souffrant de problèmes rénaux ou d’ostéoporose – devraient être plus prudentes, a-t-elle ajouté.  « L’ostéoporose est causée par une dégradation de nos os plus rapide que leur reconstruction, et le maintien d’un rapport calcium-phosphate approprié peut jouer un rôle pour empêcher l’aggravation de la maladie », a expliqué Holly Huhlein. « Quant à nos reins, ils sont l’un des moyens par lesquels nous surveillons et gérons les niveaux de phosphate en les excrétant par l’urine. »

Le Dr Vongpatanasin a averti que, puisque la recherche a été menée sur des animaux, il n’est pas encore certain que les mêmes effets se produiraient chez l’homme.

Selon le Dr Vongpatanasin, les résultats suggèrent également que la voie du récepteur FGF4 du cerveau pourrait être une cible prometteuse pour de nouveaux traitements de l’hypertension artérielle liée à l’alimentation.