Poutine arrive à Pékin pour resserrer les liens avec «mon ami» Xi Jinping sur fond de guerres en Ukraine et en Israël

Par Dorothy Li
19 octobre 2023 15:06 Mis à jour: 19 octobre 2023 16:10

Le président russe Vladimir Poutine a atterri à Pékin mardi pour rencontrer le dirigeant et chef du Parti communiste chinois Xi Jinping. C’est le premier grand voyage international de Poutine depuis que la Cour pénale internationale a lancé contre lui un mandat d’arrêt et l’a accusé d’avoir commis un crime de guerre en Ukraine.

À l’arrivée de Poutine à Pékin, l’État-parti chinois a déroulé le tapis rouge en l’accompagnant d’une garde d’honneur militaire, comme le montrent des images fournies par les médias d’État chinois. Wang Wentao, le ministre chinois du Commerce, a accueilli le dirigeant russe à l’aéroport.

Poutine participera au forum de haut niveau marquant le 10e anniversaire du titanesque programme chinois Initiative Ceinture et Route (ICR), souvent qualifié de « nouvelle route de la soie », qui vise à renforcer l’influence géopolitique de Pékin dans le monde entier en se reliant aux marchés d’Asie, d’Afrique, d’Europe, d’Océanie et d’Amérique latine par le biais d’investissements dans diverses importantes infrastructures de transports, d’énergie et de télécommunications.

Les médias d’État chinois ont qualifié « d’événement diplomatique le plus important de l’année » ce sommet qui réunit des chefs d’État et des représentants de plus de 140 pays et de 30 organisations internationales. La plupart d’entre eux viennent des pays en développement, tels que l’Argentine, l’Arabie saoudite et la Serbie.

Vladimir Poutine, l’un des invités les plus en vue du sommet, doit prononcer un discours mercredi pour montrer son soutien à l’initiative phare de Xi Jinping.

Selon une estimation du Green Finance & Development Center, un groupe de réflexion de l’université Fudan de Shanghai, depuis le lancement de la ICR par Xi Jinping il y a dix ans, la Chine a déjà injecté 1000 milliards de dollars dans les pays pauvres. Toutefois, en passant des contrats avec la Chine pour la construction de chemins de fer, d’aéroports et d’autres projets publics, le Sri Lanka, la Zambie et d’autres pays en développement sont tombés dans les pièges de la dette et se retrouvent avec de lourdes dettes qu’ils ne peuvent pas payer.

Le forum de la ICR se déroule également dans un contexte de ralentissement économique de la Chine – la deuxième économie mondiale.

Yeh Yao-Yuan, qui enseigne les relations internationales à l’université de St Thomas à Houston, doute que le régime chinois puisse poursuivre sa pratique de prêts à si grande échelle dans un contexte économique difficile, combiné à une guerre commerciale avec les États-Unis.

« Ce sera un grand défi pour Pékin », a-t-il expliqué à Epoch Times.

M. Yeh a laissé entendre que le dirigeant russe n’ignorait pas non plus les difficultés de Xi Jinping.

« Mais Poutine doit montrer qu’il est aux côtés de la Chine », a-t-il noté.

Le 4 février 2022, le jour de l’ouverture des Jeux olympiques de Pékin, Xi Jinping et Poutine ont annoncé un partenariat « sans limites » lors du dernier voyage du président russe en Chine. Les deux dirigeants ont publié un long document conjoint dans lequel la Russie soutenait les revendications territoriales du régime chinois sur Taïwan, et Pékin soutenait la Russie dans son opposition à l’élargissement de l’OTAN qui a été utilisée par Moscou en tant que justification clé pour l’invasion de l’Ukraine.

Moins de trois semaines après cette rencontre, juste après la clôture des JO de Pékin, la Russie a lancé son offensive contre l’Ukraine.

Le régime chinois a refusé de qualifier les actions de Moscou d’invasion et a accusé Washington d’être à l’origine du conflit. Il a également demandé aux pays occidentaux de respecter les « préoccupations légitimes de la Russie en matière de sécurité ». En outre, Pékin a refusé de se joindre aux nombreux pays qui ont imposé des sanctions à la Russie. Au contraire, l’État-parti chinois a déclaré qu’il continuerait à entretenir des relations commerciales normales avec la Russie, fournissant ainsi une bouée de sauvetage vitale à son voisin.

Xi Jinping et Poutine ont réaffirmé à plusieurs reprises les liens étroits qui unissent les deux pays lors de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Lorsque Xi Jinping s’est rendu à Moscou en mars dernier, il a laissé entendre à Poutine que les deux pays étaient à l’origine d’un changement « sans précédent depuis 100 ans ». Poutine était d’accord.

Cependant, selon Yeh Yao-Yuan, la dynamique des relations sino-russes n’est plus la même.

« Leur attitude est bien différente l’un envers l’autre », a-t-il précisé. « La Russie a besoin de la Chine. Mais ce que la Chine attend de la Russie n’a rien à voir avec l’économie. Dans une certaine mesure, la Chine souhaite que la guerre russo-ukrainienne se poursuive. »

« Mon ami »

Avant son départ, lors d’une interview avec les médias d’État chinois, Vladimir Poutine a évoqué son amitié avec Xi Jinping.

« Le président Xi Jinping m’appelle son ami et je l’appelle aussi mon ami », a-t-il déclaré à la chaîne de télévision chinoise CCTV, selon la transcription anglaise fournie par le Kremlin. Il a ajouté qu’il avait eu de « nombreuses » rencontres avec Xi Jinping qu’il a qualifiées de « bonnes ».

Vladimir Poutine et Xi Jinping lors de la cérémonie de bienvenue au troisième forum de l’Initiative Ceinture et Route à Pékin, le 17 octobre 2023. (Sergei Savostyanov/Pool/AFP via Getty Images)

Poutine aura un entretien en tête-à-tête avec Xi Jinping mercredi, a annoncé son assistant Yury Ushakov avant de se rendre à Pékin. Les sujets abordés dans ce type d’entretien sont généralement très « sensibles », a-t-il ajouté.

Cependant, les observateurs extérieurs ne s’attendaient pas à des surprises lors de ces entretiens.

« Poutine veut obtenir le soutien du Parti communiste chinois (PCC) dans le contexte de la guerre avec l’Ukraine », a commenté à Epoch Times Li Linyi, spécialiste de l’actualité chinoise, avant l’atterrissage du dirigeant russe à Pékin. « Sans le soutien du PCC, Poutine pourrait perdre sa guerre à l’avenir. »

« Mais le problème est que le Parti communiste chinois traverse une période difficile », a-t-il poursuivi, constatant que le commerce entre la Chine et l’Occident se réduit en raison des liens étroits entre Pékin et Moscou.

Dans un contexte de tensions entre la Chine et l’Amérique, M. Li a remarqué que l’État-parti chinois souhaite stabiliser les relations avec l’Union européenne. Cependant, cette dernière a considéré la position de la Chine sur la guerre en Ukraine comme un facteur critique dans leurs relations bilatérales.

Par conséquent, « Xi ne soutiendra peut-être pas trop Poutine, et les deux parties feront tout au plus quelques annonces politiques ».

Yeh Yao-Yuan est d’accord. « Ce que Poutine souhaite le plus, c’est le soutien militaire du PCC, mais Pékin ne peut pas se le permettre », a-t-il expliqué, ajoutant que la rencontre Poutine-Xi Jinping pourrait déboucher sur des contrats commerciaux, tels que sur l’achat de plus de gaz russe, afin d’aider l’économie de Moscou.

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