Près de 10 000 chinois portent plainte contre l’ancien dirigeant chinois Jiang Zemin

2 juillet 2015 10:52 Mis à jour: 17 octobre 2015 23:13

 

D’abord c’était un filet d’eau, puis une inondation: ainsi pourrait-on comparer les plaintes déposées par les citoyens chinois – autorisées par les moyens légaux du régime – accusant l’ancien dirigeant du Parti, Jiang Zemin, de crimes contre l’humanité et génocide.

Que les autorités y répondent est une autre question, mais ce développement de l’actualité marque un tournant distinct dans ce qui a été, de mémoire, une des plus importantes opérations de répression de la sécurité chinoise contre une population ciblée.

L’afflux des plaintes pénales concorde aussi avec un développement parallèle des affaires ces deux dernières années  : une vague de procès et d’emprisonnement résultant de la campagne anti-corruption de l’actuel dirigeant du Parti Xi Jinping, à l’encontre du réseau politique et financier de Jiang Zemin.

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La raison ? Jiang Zemin a initié la persécution du Falun Gong en 1999.

Celle-ci a inclus une campagne de haine, de détention de centaines de milliers de personnes, de transformation idéologique forcée, de torture jusqu’à la défiguration et la mort, et de prélèvements d’organes. Minghui, un site relatant les informations sur le Falun Gong et sa persécution, a déclaré que plus de 3800 cas de morts avaient été confirmées suite à la torture, alors que des enquêteurs soupçonnent des dizaines de milliers d’autres assassinés pour leurs organes.

Le Falun Gong est pourtant une forme de qigong qui a attiré entre 70 et 100 millions d’adhérents à la fin des années 1990. Jiang Zemin a craint et détesté à la fois son impact sur la société (y compris parmi les plus hautes sphères du Parti) et son immense popularité. Ses enseignements rappellaient les traditions spirituelles de la Chine, loin de la doctrine historique, marxiste matérialiste, du Parti communiste.

Même après avoir démissionné du poste de chef du Parti et de chef de l’armée, respectivement en 2002 et 2004, Jiang Zemin s’est assuré que la campagne contre Falun Gong allait continuer, en installant de nombreux proches redevables à des postes clés de l’administration du pays. Parmi les plus importants, se trouvait Zhou Yongkang, qui a dirigé l’appareil de sécurité du Parti depuis 2012. Le mois dernier, ce dernier a été condamné à la prison à vie par Xi Jinping sous l’accusation publique de corruption.

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Jusqu’à l’arrivée de la campagne de Xi Jinping, pour purger du Parti l’influence de Jiang Zemin, il était largement inconcevable pour les citoyens chinois de déposer des plaintes au pénal contre lui. Les cas où des personnes ont tenté de le faire ont été révélateurs. En août 2000, par exemple, Zhu Keming et Wang Jie, deux Chinois pratiquant le Falun Gong ont fait une tentative. L’année suivante Wang a été torturé à mort dans une prison et Zhu a passé cinq ans dans un camp de travaux forcés, où il a perdu toutes ses dents.

Mais maintenant, les choses sont différentes.

Un graphique montrant l'évolution du nombre de plaignants ayant déposé des plaintes contre Jiang Zemin, au 18 juin 2015.
Un graphique montrant l’évolution du nombre de plaignants ayant déposé des plaintes contre Jiang Zemin, au 18 juin 2015.

Le 26 mai 2015 par exemple, Zhang Zhaosen, aussi pratiquant de Falun Gong a déposé une plainte pénale contre Jiang Zemin auprès d’un procureur public. L’aspect remarquable de l’affaire n’était pas seulement qu’il ait pu déposer la plainte, mais qu’il ait pu sortir après l’avoir fait.

D’autres pratiquants de Falun Gong ont soumis des plaintes par courrier express. Généralement, ils photographiaient les reçus postaux et les téléchargeaient sur Internet. Fin mai, Minghui a reçu des rapports de plaintes venant de 232 personnes. Le 11 juin, 3987 plaintes avaient été déposées. À la fin de la semaine suivante, 5761 cas supplémentaires ont été soumis, ramenant le chiffre total à près de 10.000.

Ces plaintes ont été envoyées aux institutions judiciaires les plus élevées en Chine – le Tribunal Suprême du Peuple et le Parquet Suprême du Peuple – depuis l’intérieur du pays et de l’étranger  : des États-Unis, du Royaume-Uni, de Canada, d’Australie, de France, de Malaisie, de Thaïlande, du Japon, de Corée du Sud et de Hong Kong. Les plaignants viennent également de tous horizons: juges, soldats, agents de police, universitaires, ouvriers, paysans, etc.

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Par elles-mêmes, les plaintes sont simplement représentatives d’une volonté populaire : celle que Jiang Zemin soit effectivement inculpé. Qu’il le soit maintenant ne dépend que du Parquet Suprême du Peuple. Les affaires impliquant les dirigeants actuels ou anciens dirigeants du Parti Communiste sont profondément politisées en Chine, ainsi, toute décision de ce type ne viendra probablement que d’une évolution politique plus profonde au sein du Parti communiste, quant aux statuts de la campagne de répression contre le Falun Gong.

En plus des rapports dénonçant le style de vie somptueux et les arrestations des membres clés du Bureau 610 (police secrète du Parti créée pour persécuter le Falun Gong), Radio France International a cité les actions en justice comme un exemple de la façon dont l’influence politique de Jiang Zemin était en déclin.

Un changement récent dans la manière dont les tribunaux en Chine enregistrent les cas a probablement offert des encouragements aux plaignants. De nombreux pratiquants de Falun Gong rapportent avoir effectivement reçu des reçus du Parquet Suprême du Peuple, acte décrété par une nouvelle règle du Parti qui demande que les tribunaux et le parquet acceptent toutes les plaintes légales et expliquent par écrit pourquoi elles sont rejetées. Avant ce changement, les tribunaux pouvaient simplement ignorer toutes les plaintes qu’ils souhaitaient.

Bien que le flot des plaintes pourrait ne pas entrainer d’acte d’accusation dans un futur immédiat, les experts chinois, les avocats et les anciens fonctionnaires du Parti ont applaudi cette tentative, comme une forme de pression publique sur les autorités, et une tentative d’exercer les droits légaux dont le Parti Communiste affirme que chaque citoyen chinois est doté.

«  Je pense que poursuivre Jiang Zemin est très approprié à la fois du point de vue de la loi et de la justice, » a déclaré Zhang Zanning, professeur de droit à l’Université Sud de l’agglomération de Nanjing, dans la province de Jiangsu. Il a déclaré que lui et ses collègues avaient trouvé cela « très encourageant ».

Zhong Weiguang, expert des régimes totalitaires vivant en Allemagne, a comparé la campagne contre Jiang Zemin, aux actions en justice pour crime contre l’humanité contre Adolf Hitler.

Han Guangsheng, ancien fonctionnaire du Parti qui a fait défection au Canada en 2001, a déclaré avec emphase que les plaintes constituaient un « phénomène sans précédent. »

Bao Tong, l’ancien secrétaire du défunt premier ministre libéral chinois, Zhao Ziyang, a expliqué à Epoch Times : «  En tant que citoyens, les gens peuvent normalement avoir un impact sur les dirigeants anciens et actuels… Si quelqu’un à des griefs, il les fait savoir. Voilà comment fonctionne une société normale.  »

En précisant que le régime devrait traiter le problème « en accord avec la loi ».

Article original : Nearly 10,000 Chinese Have Filed Legal Complaints Against Former Party Leader

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