Procès de Damien Rieu contre Karim Benzema : « C’est Karim Benzema qui devrait être à ma place »

Par Etienne Fauchaire
24 juin 2023 07:00 Mis à jour: 24 juin 2023 07:05

Un procès hautement médiatique. Ce mardi 20 juin, Damien Rieu, militant identitaire affilié à Reconquête, était devant la 6e chambre presse du tribunal judiciaire de Lyon pour se défendre face à Karim Benzema, qui le poursuit en diffamation en raison de la publication de deux tweets postés à l’automne 2020. Dans ces messages, le « communiquant » de droite, qui se présente comme un lanceur d’alerte spécialisé sur les thématiques de l’islamisme et de l’immigration, accuse le Ballon d’or, qui vient de signer au club saoudien d’Al-Ittihad, d’être proche de la mouvance islamiste. Le jugement a été mis en délibéré au 19 septembre.

Benzema, soutien de l’islamisme ?

Dans le premier tweet, l’ancien porte-parole de 33 ans du groupe Génération identitaire, depuis dissous par le gouvernement, affiche une photo du footballeur au côté de l’imam de Meaux (Seine-et-Marne), Nourdine Mamoune : « Intéressant de découvrir que Benzema fréquente l’imam Nourdine Mamoune qui vient d’être perquisitionné… Vivement que la justice s’intéresse aussi au financement des mosquées de #Bron. » Cette perquisition s’était déroulée trois jours après le meurtre de Samuel Paty.

Dans le second, Damien Rieu diffuse une photo du joueur international, le doigt levé vers le ciel, un « signe djihadiste », explique-t-il dans un entretien à TV Libertés. Le cliché était accolé à ceux de trois djihadistes armés réalisant le même geste, avec ce commentaire : « Je crois que Benzema veut nous faire passer un message. »

Des tweets qui avaient motivé Karim Benzema et son avocat Me Cormier à saisir la justice et à porter plainte pour diffamation. « Le militant d’extrême droite multirécidiviste Damien Lefèvre alimente la haine, son dernier tweet assimile Karim Benzema à un terroriste. Faut-il attendre un nouveau drame pour réagir ? », lançait le conseil sur Twitter, en mentionnant le président de la République Emmanuel Macron et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. « Karim veut me faire taire… dites-lui que j’ai gagné tous mes procès », réagissait le militant de Reconquête, en partageant sa convocation au tribunal sur le réseau social le 3 mai dernier.

« On sait qu’il y a aujourd’hui des gens qui ont la haine de la France »

« Un certain faisceau d’indices montre que Benzema est ambigu sur la question de l’islam. C’est une manière d’intimider ses adversaires, de les museler, que de les traîner au tribunal, ça coûte cher, ça peut faire peur, explique-t-il. Il est particulièrement suivi par des jeunes, sa responsabilité est donc dangereuse. Il diffuse et banalise cette vision des choses selon laquelle s’il y’a des attentats c’est parce que la France est islamophobe et que les musulmans seraient persécutés », faisait valoir Damien Rieu auprès de l’hebdomadaire Valeurs Actuelles. Et d’ajouter : « Benzema représente le malaise identitaire de la communauté algérienne en France. On sait qu’il y a aujourd’hui des gens qui ont la haine de la France, le rejet, la rancœur face à l’histoire entre la France et l’Algérie. Lui cristallise cela par le sport. Ce sont deux jeunesses qui s’affrontent. L’une qui n’a pas oublié et qui constate la violence et les dégâts que peut faire cette idéologie ; et l’autre qui est dans la revanche, la haine de la France, le prosélytisme et l’offensive islamique. »

En face, l’avocat de l’ex-attaquant star du Real de Madrid de 35 ans espère que la justice rappellera à l’ordre le militant politique. « Damien Rieu, derrière son ordinateur s’est cru tout permis, y compris de dépasser les limites de la liberté d’expression et de diffamer Karim Benzema, a déclaré Me Cormier au média local Lyon Capitale. On doit lui rappeler les règles de droit qu’il a explosées. » « On a le droit de se moquer de Karim Benzema, a-t-il plaidé lors de l’audience. Mais de l’associer à un terroriste, ça, on n’a pas le droit ».

« Le cœur du dossier, ce sont les ambiguïtés de Monsieur Benzema qui « like » certaines publications qui font l’apologie du terrorisme », a plaidé en défense Pierre-Vincent Lambert, pointant un « like » du joueur en faveur d’un sportif du Daguestan ayant parlé « des ennemis de l’islam » à propos de caricaturistes.

« Je suis lanceur d’alerte sur les questions islamistes », s’est justifié à la barre Damien Lefevre, se présentant comme « communiquant », salarié du parti Reconquête. « Quand on est une star on a des responsabilités, il a envoyé des signaux ambigus très graves. C’est monsieur Benzema qui devrait être à ma place aujourd’hui », a-t-il déclaré.

Des procès toujours gagnés en appel

« L’amalgame est non seulement diffamatoire, mais il est abject et grotesque », a estimé le procureur Alain Grellet, réclamant une amende de 10.000 euros, un montant inhabituel en matière de presse. Selon le magistrat, cette façon d’insinuer un lien entre le célèbre joueur originaire de Bron, en banlieue lyonnaise, et des djihadistes « constitue une insulte à l’égard de ceux qui luttent contre le terrorisme islamiste, et de ceux qui en ont souffert dans leur chair. »

À la sortie de l’audience, Damien Rieu a publié une vidéo sur Twitter dans laquelle il indique avoir « trouvé la juge vraiment partiale » et ne pas « s’attendre à grand-chose » : « On connaît la politisation de la justice souvent aux mains de l’extrême gauche. Je suis prudent et réservé sur l’issue du procès ». En revanche, le militant identitaire rappelle avoir systématiquement perdu ses combats judiciaires en première instance, avant de les remporter à chaque fois en appel. Ce dernier s’est aussi dit « particulièrement choqué par les propos de l’avocat de Karim Benzema qui a expliqué que je mettais une cible sur Karim Benzema » : « Comment on peut inverser ce qui se passe dans notre pays. Il y a eu 230 morts de l’islamisme et on accuse quelqu’un qui dénonce l’islamisme d’avoir mis une cible sur quelqu’un qui soutient des propos justifiant le djihadisme. »

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