Opinion
Renversement du gouvernement : quelles conséquences dans la zone euro ?

Le Premier ministre français, François Bayrou, écoute les discours qui suivent sa déclaration de politique générale lors de la session extraordinaire du Parlement précédant le vote de confiance sur le budget d'austérité du gouvernement, à l'Assemblée nationale à Paris, le 8 septembre 2025.
Photo: Bertrand GUAY/AFP via Getty Images
Le Premier ministre français François Bayrou a présenté sa démission au président Macron mardi 9 septembre suite à un vote de confiance rejeté. Son ambitieux projet de budget, qui prévoyait des coupes budgétaires drastiques, a été rejeté par l’opposition parlementaire.
Sa fuite en avant vers un vote de confiance à l’Assemblée nationale lundi soir s’est soldée par un échec retentissant. Seuls 194 des 577 députés du Parlement lui ont accordé leur confiance, alors que 364 députés ont voté contre lui, une défaite cuisante.
François Bayrou, en poste seulement depuis décembre 2024, succédait à Michel Barnier, lui-même destitué par une motion de censure.
La France est clairement loin des critères de Maastricht et Bayrou critique les « baby-boomers »
Le Premier ministre avait auparavant lié son projet de budget à son propre destin politique. Il avait vivement critiqué les « baby-boomers qui pensent que tout va bien » et avait décrit son approche comme le seul moyen de contrer l’endettement excessif.
Au printemps 2025, la dette publique française s’élevait à 114 % du produit intérieur brut. Le déficit budgétaire s’élevait à 5,8 % l’année dernière. Ces deux chiffres sont loin des critères de Maastricht, qui fixent la dette publique à 60 % et le déficit budgétaire à 3 %. Seules la Grèce et l’Italie se trouvent actuellement dans une situation plus précaire dans la zone euro. Le projet de budget présenté par M. Bayrou devait permettre de réaliser 44 milliards d’euros d’économies.
Les mesures d’austérité de François Bayrou : annulation de jours fériés, gel des prestations sociales, augmentation des impôts
François Bayrou entendait s’attaquer à la crise de la dette par des mesures d’envergure. Il prévoyait de geler les retraites et les dépenses sociales à leurs niveaux actuels et de ne plus les indexer sur l’inflation.
Le projet de budget prévoyait moins d’options d’amortissement pour les plus hauts revenus. Il prévoyait également de supprimer deux jours fériés légaux : le lundi de Pâques et le 8 mai, jour de la capitulation de la Wehrmacht allemande pendant la Seconde Guerre mondiale.
La position du Parlement était d’emblée peu prometteuse. Macron et ses alliés ne détenaient plus la majorité à l’Assemblée nationale depuis les élections anticipées de l’été dernier.
Concernant la hausse des impôts pour les plus riches, Bayrou aurait peut-être pu compter sur des voix empruntées à la gauche. En revanche, les baisses des retraites et des allocations chômage auraient été taboues pour elle – et les syndicats avaient même appelé à une grève générale le 10 septembre.
La démission de Macron aussi improbable que de nouvelles élections
Dans cette situation, la solution la plus évidente pour Bayrou semblait être de poser la question de confiance, sans espoir, et de se décharger ainsi de ses fonctions. Parallèlement, des voix s’élèvent pour réclamer la démission du président Macron, élu jusqu’en 2027.
Il est peu probable que cela se produise. Dans l’histoire récente, un seul président français, Charles de Gaulle, a démissionné en cours de mandat. Il avait annoncé cette décision en 1969 en cas d’échec du référendum qu’il avait lancé sur la réforme constitutionnelle.
Il semble également extrêmement improbable que Macron prenne le risque une nouvelle fois de convoquer de nouvelles élections. Rien ne laisse présager que la situation majoritaire serait différente de celle observée depuis juillet 2024. Il s’agirait plutôt d’un jeu à somme nulle : l’alliance de gauche et le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen pourraient conserver leurs résultats.
La France connaît une impasse politique
La coalition Macron perdrait, principalement au profit des Républicains. Au total, cependant, ces deux forces politiques ne pourraient pas réunir plus de voix qu’il y a un an. Le seul espoir des centristes serait un effondrement de la coalition de gauche, ce qui permettrait d’intégrer les socialistes ou les Verts dans la majorité.
Mais un tel calcul pourrait aussi se retourner contre eux. Près de la moitié des députés de l’alliance de gauche appartiennent à la formation radicale La France Insoumise (LFI), qui n’est pas considérée comme apte à former une coalition au centre politique. Une nouvelle alliance de gauche sans LFI ne serait toutefois plus en mesure d’obtenir la majorité dans de nombreuses circonscriptions électorales.
Cela renforcerait soit le RN, soit LFI elle-même. Le résultat final pourrait être une situation où les majorités parlementaires seraient impossibles sans l’un des deux camps. Cela pourrait également créer des tensions en leur sein, entre les forces qui veulent « sauver » le système et celles qui veulent le détruire.
Les marchés financiers ne ferment pas les yeux
Compte tenu de la situation majoritaire actuelle, une restructuration des finances publiques est difficilement envisageable en France, même si le déficit ne cesse de croître. Une réduction drastique des dépenses publiques n’est pas plus susceptible de rallier le soutien de la majorité qu’une hausse des impôts, qui freinerait encore davantage la croissance économique.
La Commission européenne pourrait engager une procédure pour déficit excessif à l’encontre de la France, mais elle hésite à prendre de telles mesures, en particulier à l’égard des pays les plus puissants de la communauté internationale. Elle a donc décidé de ne plus contrôler les critères de Maastricht chaque année, mais seulement à plus long terme.
Les marchés sont toutefois moins indulgents et la prime de risque pour les emprunts d’État français à long terme a atteint des niveaux jusqu’alors réservés à l’Italie ou à la Grèce. Cela augmente encore davantage la charge d’intérêts. À terme, cela pourrait menacer la stabilité de la zone euro.
En Allemagne, augmentation significative de l’endettement net
L’exemple français pourrait s’avérer de mauvais augure pour l’Allemagne. Certes, le niveau de la dette publique, qui s’élève à environ 63 % du PIB, est nettement inférieur à celui de son voisin occidental. Cependant, les nouveaux emprunts augmentent considérablement. Le budget 2025 prévoit déjà un endettement de plus de 140 milliards d’euros pour l’État fédéral.
Contrairement à la France, la crise politique et économique en Allemagne ne s’est pas encore traduite par une perte de confiance dans les marchés financiers. L’assouplissement du frein à l’endettement, les fonds spéciaux et les objectifs ambitieux du gouvernement fédéral, allant des infrastructures à la défense et à la protection du climat, stimulent l’endettement. Parallèlement, le paysage politique ne se stabilise pas et la volonté d’épargner n’augmente pas significativement.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Reinhard Werner écrit pour Epoch Times sur l'économie, les dynamiques sociales et les questions géopolitiques. Il s'intéresse particulièrement aux relations internationales, aux migrations et aux conséquences économiques des décisions politiques.
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