« Twitter a refusé de supprimer des contenus d’abus sexuels sur un mineur et en a tiré profit » selon une avocate

Par Jan Jekielek
9 février 2021 18:55 Mis à jour: 17 mars 2021 03:56

Lisa Haba, une associée du cabinet Haba Law Firm basé en Floride, a déclaré à Epoch Times que Twitter avait refusé de retirer les vidéos d’exploitation sexuelle de son client, même après que celui-ci a prouvé à Twitter qu’il était mineur au moment des faits, et que Twitter « profitait certainement de l’exploitation de [son client] ».

Le cabinet d’avocats Haba, le Centre national sur l’exploitation sexuelle et le cabinet Matiasic ont conjointement déposé une plainte fédérale contre Twitter le 20 janvier 2021.

L’avocate a raconté l’histoire de son client lors d’une interview avec Jan Jekielek, animateur du programme « American Thought Leaders » (maîtres à penser américains) à Epoch Times.

John Doe, le client de Haba, est actuellement un lycéen de 17 ans. À l’âge de 13 ans, il a été ciblé sur Snapchat par des trafiquants de sexe en ligne qui se sont fait passer pour une jeune fille de 16 ans. Il a été manipulé pour qu’il envoie ses photos de nu. Après les avoir reçues, les trafiquants ont commencé à le faire chanter. Ils ont menacé d’envoyer ses photos de nu à ses parents, son pasteur, les responsables de son école et d’autres personnes.

« L’enfant a longtemps tenté d’apaiser les trafiquants, en acceptant leurs demandes dans un effort pour sauver sa famille et se soustraire à leurs exigences », a déclaré son avocate. « Finalement, il a pu sortir de cette situation lorsqu’ils lui ont demandé de le rencontrer et, heureusement, il a refusé de le faire. »

Néanmoins, lorsqu’il avait 16 ans, les images en question sont apparues sur Twitter.

John Doe s’est aperçu que de nombreux posts de ses camarades de classe circulaient en janvier 2020. De nombreux élèves de son école ont regardé les vidéos et il est devenu « victime de brutalités » et « suicidaire ».

Heureusement, sa mère l’a découvert et l’a soutenu en contactant Twitter pour demander que le matériel abusif soit retiré de la plateforme.

Néanmoins, après avoir reçu une copie du permis de conduire de John Doe et deux autres demandes de sa mère, Twitter n’a pas réagi.

« Twitter a attendu plusieurs jours de plus avant de donner une réponse dévastatrice au jeune homme », a déclaré Lisa Haba. « Nous ne pensons pas que cela constitue une violation de nos politiques, et nous ne prendrons aucune autre mesure. »

Le matériel n’a pas été retiré avant que le ministère de la Sécurité intérieure n’intervienne. Il a été visionné plus de 167 000 fois et a fait l’objet de 2 223 retouches, selon la plainte.

« Ils avancent qu’ils ont une politique de tolérance zéro, mais leurs actions démontrent une tout autre réalité. Lorsque notre client leur a demandé de retirer le matériel visé qu’ils affirment pourtant exclure, ils ont refusé d’agir », a déclaré Haba.

« C’est l’essence même de ce procès », a-t-elle ajouté.

Twitter a profité du contenu abusif

L’avocate a poursuivi en affirmant que Twitter a profité du fait de ne pas avoir retiré les vidéos d’abus de son client.

« Lorsque vous regardez la structure de profit de Twitter, ils profitent de chaque fois que ces publications sont diffusées, retweetées, regardées. Il y a une énorme incitation à la publicité et à la licence de données pour que ces publications restent, que ce matériel reste à jour. Donc Twitter a certainement profité de l’exploitation de John Doe. »

Lisa Haba a expliqué que, d’après leurs recherches, Twitter en profite principalement de deux façons. La première est leur service de publicité : chaque fois que l’on clique sur les publications sur Twitter ou qu’on les regarde, Twitter fait des bénéfices. L’autre est l’octroi de licences de données. « Cela vient bien sûr du fait que les gens sont sur la plateforme, qu’ils tweetent des choses, qu’ils les retweetent et les regardent. »

« C’est ce qui a permis à Twitter de devenir une entreprise d’un milliard de dollars, leur permettant de profiter de chacun des tweets qui sont mis en ligne », a déclaré Lisa Haba.

La valeur marchande de Twitter était de 43 milliards de dollars au 4 février 2021.

Dans son rapport du troisième trimestre (pdf) de 2020, Twitter a reçu un revenu estimé à 936 millions de dollars, dont 808 millions de dollars provenaient des services de publicité et 127 millions de dollars des licences de données et autres.

Lisa Haba a déclaré qu’ils ont « vérifié chaque fait avant de l’alléguer ».

Twitter n’a pas souhaité répondre à la demande de commentaires d’Epoch Times.

L’article 230 ne s’applique pas

Lisa Haba a également souligné que Twitter ne peut pas utiliser l’article 230 pour se dégager de sa responsabilité dans cette affaire.

L’article 230 fait partie de la loi sur la décence en matière de communication (Communications Decency Act, CDA) de 1996 qui protège largement les grandes entreprises technologiques contre les poursuites judiciaires pour le contenu de leurs sites web.

« Si vous tirez directement profit ou que vos obtenez des intérêts de la traite des êtres humains, ce n’est pas nécessairement une immunité garantie pour les grandes plateformes technologiques », a-t-elle déclaré, en référence à une nouvelle loi appelée FOSTA/SESTA.

En 2018, le Congrès a adopté un projet de loi connu sous le nom de Combattre le trafic sexuel sur internet (FOSTA) et Interdire les activités des trafiquants sexuels (SESTA). Ce projet de loi rend illégal le fait d’aider, de faciliter ou de soutenir sciemment le trafic sexuel et modifie l’article 230.

L’ancien président Donald Trump a signé le projet de loi en avril 2018.

« Twitter n’est pas un intermédiaire passif, inactif, dans la distribution de ce matériel nuisible. Au contraire, Twitter a adopté un rôle actif dans la diffusion et la promotion et la distribution en connaissance de cause de ce matériel nuisible », allègue le procès. « Les politiques, les pratiques, le modèle d’entreprise et l’architecture technologique de Twitter encouragent la distribution de matériel d’exploitation sexuelle et en tirent profit. »

« Par exemple, il existe des hashtags connus qui sont directement liés à la pornographie enfantine et à sa distribution », a déclaré Lisa Haba à Epoch Times. « Ces hashtags ne sont pas seulement opérationnels sur Twitter, mais si vous les tapez dans la barre de recherche, il vous propose des phrases suggérées pour vous aider à les trouver plus efficacement. »

« Quand on voit la quantité incroyable de matériel de cette nature et la facilité avec laquelle on peut le trouver sur la plateforme si on connaît les bons hashtags, c’est affreux », a poursuivi Lisa Haba.

« Je voulais faire partie de ce combat »

« Quand j’étais à l’école de droit, je savais que je voulais travailler avec des survivants d’abus sexuels », a-t-elle déclaré à Epoch Times. « Je savais que je voulais les aider à trouver un chemin à travers l’obscurité vers la lumière et être sur le chemin de la guérison. »

Lisa Haba se souvient qu’après avoir entendu le discours d’une survivante du trafic sexuel, elle a réalisé que « c’était une offense à la dignité humaine et à la vie humaine dont personne ne semblait vraiment s’occuper ».

« Et je voulais faire partie de cette lutte pour changer cela, dans ce pays et dans le monde. »

Elle a été procureur pénal en Floride pendant 8 ans avant d’ouvrir un cabinet privé.

En parlant de son client John Doe, l’avocate a suggéré que tous les parents soient prudents avec les activités en ligne de leurs enfants. Elle a souligné que John Doe « avait un foyer très stable, de très bonnes notes » et « était un très bon élève ».

Elle a dit avoir vu certains trafiquants passer des années à établir des relations avec des victimes potentielles en ligne.

« Cela montre vraiment que chaque enfant qui est exposé à internet est potentiellement exposé aux trafiquants, et j’encourage tous les parents à surveiller de près à qui leurs enfants parlent en ligne. »

En avril 2020, en partenariat avec DiCello Levitt Gutzler, Lisa Haba a intenté une action collective contre le magnat de la mode Peter Nygard dans le district sud de New York.

Elle a affirmé que Peter Nygard avait utilisé son entreprise de mode comme un mécanisme pour gérer un réseau international de trafic sexuel pendant environ 50 ans.

L’homme est maintenant détenu à Winnipeg, au Canada. Le gouvernement américain demande son extradition.

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