Xu Na et le million d’âmes

Une poète, emprisonnée en Chine, parle de génocide

Par Anders Corr
22 janvier 2022 05:14 Mis à jour: 6 novembre 2023 08:55

Une femme, sans nom et sans visage pour la plupart, a été avalée par les prisons du Parti communiste chinois (PCC). Cette femme est une artiste poète et peintre. Elle a un nom.

Xu Na.

Mais le monde est largement silencieux sur sa souffrance. Les prisons chinoises qui lui ont ouvert leurs portes sont équipées de cellules en béton. Ces mêmes cellules dans lesquelles plus de 100 prisonniers d’opinion ont été torturés et tués l’année dernière, et plus de 5 000 autres, arrêtés.

Des millions de Ouïghours, de pratiquants du Falun Gong, de Tibétains et de défenseurs des droits de l’homme chinois sont détenus dans ces prisons. Elles pourraient bientôt accueillir des millions de prisonniers de conscience chrétiens. Il y a 44 millions de chrétiens en danger aujourd’hui en Chine.

Comme tous les prisonniers d’opinion, Xu Na a des principes. Elle croit en la vérité, la compassion et la tolérance.

Ces valeurs sont universelles et correspondent à la plupart des religions.

Mais elles sont illégales en Chine. Ce sont les principes fondamentaux de la pratique spirituelle de Xu Na, appelée le Falun Gong. Cette pratique, tout comme l’islam et le bouddhisme tibétain, est proscrite et injustement dénigrée au point que les autorités et les universitaires reconnaissent à peine qu’il s’agit d’une forme de génocide.

Xu Na décrit sa persécution à partir de son propre vécu. Elle compare son expérience personnelle à un génocide.

Après avoir été condamnée à 5 ans de prison en 2001, Xu Na a été torturée et soumise au travail forcé.

« Comme j’aurais aimé être emprisonnée à Auschwitz plutôt que dans une prison chinoise », a-t-elle écrit. « Parce que dans les chambres à gaz nazies, on pouvait mourir rapidement, alors que dans la prison pour femmes de Pékin, il était pire de vivre que de mourir. »

Une reconstitution de la torture appelée « le grand écart » utilisée par les prisons ou les camps de travail chinois ciblant les pratiquants de Falun Gong. (Avec l’aimable autorisation de Minghui.org)

Xu Na a décrit une torture appelée « le grand écart », dans laquelle « les jambes étaient écartées à 180 degrés et on ordonnait à trois prisonniers de s’asseoir sur les jambes et le dos du torturé et de les presser à plusieurs reprises. Les policiers étaient fiers de cette invention : ‘C’est bien, parce que la douleur est insupportable, mais cela ne fait pas mal aux os.' »

Une atrocité innommable contre une femme, qui déchire le corps mais aussi la moralité et l’éthique des prisonniers contraints de l’exécuter, voilà le genre de torture que Xu Na pourrait maintenant vivre en prison, à nouveau.

Pourtant, Xu Na a vécu sa persécution avec une clarté que beaucoup dans le « monde libre » n’ont pas.

« Ma patrie est synonyme des montagnes et des rivières du pays et des milliers d’années de confucianisme, de bouddhisme et de taoïsme traditionnels », a-t-elle écrit après son dernier emprisonnement.

« Mais il y a cent ans, un ‘fantôme’ flottant au-dessus de l’Europe est venu écorcher la terre de Chine, rendant le peuple orienté vers le profit, parlant de profit national, de profit familial et de profit personnel. »

Le « fantôme » de Xu Na ressemble au capitalisme d’État que le Parti communiste chinois impose aux citoyens chinois, et qui s’étend du Tibet et du Xinjiang à Hong Kong, et constitue désormais une menace directe et imminente pour Taïwan également.

Ce fantôme n’est pas accepté de plein gré, mais imposé à des nations entières sous la menace du fusil de Mao Zedong et des armes nucléaires de Xi Jinping.

« Le pays tout entier a été poussé de toutes parts à la conquête des profits et a abandonné les cinq vertus que sont ‘la bienveillance, la droiture, la rectitude, la sagesse et la foi' », a écrit Xu Na.

« Il combat les cieux et la terre, de sorte que les montagnes et les rivières n’existent plus. Maintenant, même l’eau verte et les montagnes vertes doivent être écrasées par les montagnes d’or et d’argent. »

Xu Na est une poète qui sait décrire avec éloquence son expérience. Des millions d’autres personnes qui ont subi des persécutions similaires en Chine après 1949 restent totalement sans voix.

Ils souffrent dans un silence inconnu.

Le monde ignore leur détresse.

Au lieu de cela, nous prévoyons de participer aux « jeux » olympiques à Pékin, où les tortures de Xu Na pourraient avoir lieu juste de l’autre côté de la rue. Peut-être ses cris se joindront-ils à ceux des supporters enthousiastes, inconscients du sang et de la mort dont dépendent leurs jeux.

Les cris pourraient devenir plus forts et la torture du grand écart bien pire pour Xu Na. Nous pourrions ne jamais la revoir, libre de contempler les montagnes et les rivières du pays de la Chine.

La torture est peut-être encore pire pour les autres prisonniers, y compris les gardes et les citoyens ordinaires qui sont en réalité des prisonniers du système, et qui sont forcés par ce système, ou par leur propre esprit corrompu, de lui imposer la torture.

Le monde, en ignorant les cris de Xu Na, est complice. Nous qui nous taisons, nous sommes tous ces prisonniers et ces gardiens, et nous imposons simultanément une injustice à Xu Na, à nous-mêmes et à l’avenir.

Anders Corr est titulaire d’un BA/MA en sciences politiques de l’université de Yale (2001) et d’un doctorat en administration de l’université de Harvard (2008). Il est directeur de Corr Analytics Inc. et éditeur du « Journal of Political Risk », et a mené des recherches approfondies en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Il est l’auteur de « The Concentration of Power » (La concentration du pouvoir), à paraître en 2021 et de « No Trespassing » (Défense d’entrer), et a édité « Great Powers, Grand Strategies » (Énormes pouvoirs, stratégies globales).


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Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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