Conférence de Bilderberg à Stockholm : les élites entre elles

Par Reinhard Werner
15 juin 2025 06:44 Mis à jour: 15 juin 2025 11:53

Jeudi 12 juin, la conférence annuelle de Bilderberg s’est ouverte à Stockholm. Elle se tiendra jusqu’à dimanche prochain. Comme chaque année, entre 120 et 150 figures de la politique, de l’économie, de la recherche, de l’armée, des médias et de la société civile sont invitées à y participer. Créée en 1954, cette conférence met l’accent sur le dialogue transatlantique et vise à discuter des grands enjeux politiques, économiques et sociaux du moment.

Un espace confidentiel

L’objectif de la conférence est d’offrir un cadre protégé permettant un échange libre et ouvert entre décideurs de haut niveau. Dans la vie courante, de telles discussions sont rarement possibles en raison des contraintes de temps et du formalisme protocolaire. Par ailleurs, aucune couverture médiatique n’est prévue durant l’événement, à l’exception de quelques journalistes conviés à titre de participants.

Les rencontres se déroulent sous le sceau du secret, conformément aux règles dites de Chatham House, qui autorisent la diffusion d’un contenu synthétique des discussions, sans possibilité d’en attribuer la teneur à un participant précis.

La conférence annonce vouloir rassembler des points de vue divers, à favoriser la compréhension mutuelle et à renforcer les réseaux informels. Elle dit aussi vouloir miser sur la création de capital social et culturel.

Une vision du monde d’hier pour débattre du monde de demain ?

Les participants seront informés des visions et analyses de cercles de pouvoir différents de ceux qu’ils connaissent. La confidentialité des échanges permet d’évoquer des informations sensibles ou non destinées au public. Le site officiel de la conférence ne contient d’ailleurs pas de mentions légales.

La question reste ouverte quant à la pertinence d’un tel format à notre époque, d’autant que le cercle des invités reste essentiellement centré sur l’Europe et l’Amérique du Nord. Même le Forum économique mondial (FEM) de Davos, organisé chaque janvier, accueille une bien plus grande diversité de personnalités, notamment issues des BRICS ou du Sud global.

Selon la liste officielle, les invités proviennent presque exclusivement des États-Unis, du Canada et de la zone UE/EEE. Aucun invité d’Israël, d’Argentine ou du Mexique ne figure sur la liste, malgré l’importance géopolitique et économique croissante de ces pays.

Fait notable, seuls le ministre turc des Finances, Mehmet Şimşek, et son compatriote Murat Özyeğin, dirigeant du conglomérat Fiba, font figure d’exception. L’Ukrainien Dmytro Kuleba est aussi attendu, bien qu’il ait quitté ses fonctions de ministre des Affaires étrangères en 2024. La liste publiée n’est toutefois pas exhaustive, et il est possible que d’autres invités participent sans être mentionnés.

Les participants attendus cette année

Le vice-chancelier allemand, Lars Klingbeil, et la présidente du Bundestag, Julia Klöckner, sont attendus ainsi que l’ancien Premier ministre français Gabriel Attal, selon le site bilderbergmeetings.org. Parmi les figures de premier plan figurent également le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, son prédécesseur Jens Stoltenberg, et le général américain Christopher Donahue. Également présents : le ministre polonais des Affaires étrangères, Radosław Sikorski, le Premier ministre canadien Mark Carney et le PDG de Pfizer Albert Bourla.

Il n’est pas surprenant de voir figurer également le PDG de Palantir, Alex Karp, l’investisseur Peter Thiel, le PDG du groupe Axel Springer Mathias Döpfner, ou encore Christian Sewing de la Deutsche Bank. Tous siègent au comité directeur de 30 membres qui décide chaque année de la politique d’invitation. Ce comité est coprésidé par la directrice de musée Marie-Josée Kravis et Henri de Castries, du think tank français Institut Montaigne.

Une pluralité limitée et sélective

Le comité de direction, composé de 30 à 35 membres, élit son président et deux secrétaires généraux bénévoles. Les critères de sélection des invités reposent sur l’influence, la compétence, la réputation et les connexions internationales.

La conférence vise à un équilibre politique et une diversité de profils professionnels. Cependant, la composition des invités suggère que les rapports de force politiques actuels et un certain consensus idéologique proche de celui de la fondation de la conférence servent de fil conducteur.

Ainsi, certaines figures perçues comme controversées, telles que Donald Trump, Javier Milei, Viktor Orbán, Robert Fico ou Sebastian Kurz, ont certes été invitées au FEM, mais jamais à Bilderberg – malgré les déclarations de recherche de pluralité des organisateurs.

Le manque de transparence concernant les participants et les sujets débattus a souvent favorisé des spéculations, voire des récits conspirationnistes. Le communiqué de presse de cette année a également contribué à ces interrogations.

La « dépopulation » à l’ordre du jour : une traduction malheureuse ?

Parmi les sujets figurent, sans surprise, les relations transatlantiques, la situation en Ukraine, l’économie américaine ou encore le Moyen-Orient. Des questions militaires, la prolifération d’armes de destruction massive, ainsi que la politique énergétique et ses implications géopolitiques sont aussi abordées.

Il est également prévu de discuter du déclin démographique, particulièrement marqué en Europe, et des effets des migrations. Pour parler de cette baisse de la population, l’intitulé retenu a été « Depopulation ». Ce terme a fait réagir certains commentateurs, dont Jon Fleetwood, car le terme est historiquement associé à des programmes coercitifs de contrôle des naissances. Les documents de l’ONU emploient en revanche les termes de « déclin démographique » ou « changement démographique » pour décrire la baisse des naissances constatée depuis le milieu des années 1980.

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