Des liens profonds font surface dans un cas de corruption en Chine

21 novembre 2015 14:24 Mis à jour: 21 novembre 2015 19:46

Le 17 novembre dernier, une courte annonce de 120 caractères chinois, publiée par l’Agence anti-corruption du Hunan, semblait bien banale. Une phrase mentionnait que Cheng Danfeng, adjoint au maire de la ville provinciale de Zhangjiajie, avait été placé sous enquête pour violation grave de la discipline du Parti. Les trois lignes qui suivaient résumaient la carrière de  Cheng Danfeng en tant que cadre du Parti communiste chinois (PCC).

Mais si on retrace l’ascension de Cheng Danfeng par favoritisme politique, sa mise hors-jeu d’apparence banale porte un message bien clair : Cheng Danfeng est le dernier rouage de la machine politique méthodiquement démantelée, depuis les trois dernières années, par la campagne anti-corruption de Xi Jinping, actuel dirigeant du PCC.

Ce réseau de pouvoir profondément enraciné en Chine était contrôlé par l’ancien dirigeant du PCC Jiang Zemin, qui a détenu le pouvoir officiellement jusqu’en 2002 mais a préservé son influence bien plus lontemps lors du règne de son successeur Hu Jintao.

Cheng Danfeng est le beau-fils de Su Rong, le plus haut fonctionnaire purgé alors qu’il était encore en fonction lors de la campagne anti-corruption de Xi Jinping.

L’ouverture d’une enquête sur Su Rong par les autorités anti-corruption, le 14 juin 2014, avait surpris à l’époque de nombreux observateurs car il était apparu en public seulement quatre jours auparavant.

Su Rong, l’anciennement numéro 2 de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC), une organisation du PCC qui intègre les groupes sociaux non communistes, a été par la suite expulsé du Parti le 16 février 2015. La Commission centrale d’inspection de la discipline (CCCD) a également annoncé que Su Rong était en instance de procès pour vente de postes officiels et autres violations de la discipline, mais la date d’audience n’a pas encore été fixée.

Su Rong est connu pour être un proche collaborateur de Jiang Jiemin (à ne pas confondre avec Jiang Zemin) et Zhou Yongkang, deux hauts responsables du PCC condamnés cette année à de longues peines de prison – respectivement 16 ans et perpétuité – après avoir été reconnus coupables de corruption à grande échelle.

Jiang Jiemin dirigeait auparavant l’agence du Parti qui supervise les entreprise d’État et avant cela, il avait fait fortune en tant que magnat du secteur pétrolier et gazier géré par l’État. Entre 2007 et 2012, Zhou Yongkang avait aussi un immense pouvoir en tant que patron de la sécurité et de l’appareil judiciaire du régime chinois.

Une allusion à la connexion entre ces 3 hommes a été obliquement faite dans un rapport posté en juin 2014 sur Sohu, un portail Internet populaire chinois. Su Rong avait apparemment rejoint Jiang Jiemin et son « patron » en inspectant diverses villes chinoises en 2005 et 2009. Plus tard, Su Rong et le  « patron » de Jiang Jiemin se sont rencontrés lors de la Cinquième session plénière de l’Assemblée nationale populaire (ANP) en mars 2012. Les médias chinois ont souvent recours à des épithètes pour désigner les personnalités politiques sensibles, comme Zhou Yongkang, dont la mention dans la presse est strictement circonscrite.

Zhou Yongkang était le supérieur de Jiang Jiemin alors que les deux hommes travaillaient dans le secteur énergétique lucratif de l’État et Zhou Yongkang et Su Rong étaient présents à la session plénière de l’ANP en mars 2012.

Su Rong a également servi comme assistant principal de Zeng Qinghong, ancien vice-président de Chine et le plus important acolyte de l’ancien dirigeant du Parti Jiang Zemin. De 2006 à 2007, Su Rong était directeur adjoint de l’École centrale du Parti à Pékin, l’institut central du PCC où les cadres reçoivent un endoctrinement politique et idéologique. Zeng Qinghong était à l’époque directeur de cette école.

L’année suivante, Su Rong a été promu au poste du secrétaire du Parti dans le Jiangxi, la province natale de Zeng Qinghong au sud-est de la Chine. Dans le contexte politique chinois, cette nomination a probablement suivi la recommandation de son ancien mentor.

Toutefois Zeng Qinghong n’est pas le plus haut responsable de PCC à offrir ses faveurs à Su Rong. Pendant de nombreuses années, Zeng Qinghong a servi comme homme de main au « parrain » du PCC, Jiang Zemin. Et Su Rong était aussi dans ses bonnes grâces en jouant un rôle clé dans le projet chéri de l’ancien dirigeant communiste : la persécution du Falun Gong.

Lorsque Su Rong était secrétaire adjoint du Comité du Parti de la province du Jilin entre 1999 et 2001, il a également dirigé le Bureau 610 de cette province.

Le Bureau 610 est une agence de police secrète de type Gestapo, mise en place pour superviser la persécution du Falun Gong, une discipline spirituelle traditionnelle chinoise dont les pratiquants font cinq séries d’exercices lents et paisibles et suivent dans leur vie quotidienne les principes de l’authenticité, bienveillance et tolérance. Le 20 juillet 1999, Jiang Zemin avait ordonné d’« éliminer » le Falun Gong et a mobilisé dans ce but tout l’appareil de sécurité du régime chinois.

Au moins 23 pratiquants de Falun Gong ont été tués – la plupart torturés à mort – dans le Jilin quand Su Rong y était en charge selon Organisation mondiale d’enquête sur la persécution du Falun Gong, une ONG qui mène une enquête sur la répression du Falun Gong par le régime chinois et identifie les auteurs des crimes de cette persécution. À ce jour, le centre d’information sur la persécution Minghui.org dispose de preuves que plus de 3 900 pratiquants ont perdu la vie en Chine suite aux tortures et mauvais traitements. Toutefois, selon les estimations, le chiffre réel est beaucoup plus élevé.

En 2001, lorsque Su Rong avait été promu au poste de secrétaire du Comité du Parti de la province du Gansu dans le nord-ouest de la Chine, il a  continué à persécuter les pratiquants de Falun Gong. Trois ans plus tard, lors de sa visite officielle en Zambie, Su Rong a été cité à comparaître dans un procès civil pour accusation de torture, meurtre et diffamation des pratiquants de Falun Gong. Il a dû fuir le pays à travers une nation africaine frontalière avec l’assistance du consulat chinois.

Avec la mise hors-jeu de Su Rong et de son beau-fils, ainsi que les responsables comme Jiang Jiemin et Zhou Yongkang, le dirigeant chinois Xi Jinping élargit la portée de sa purge du Parti communiste. Les mesures récentes entreprises contre Jiang Zemin indiquent qu’en nettoyant les échelons inférieurs de ce réseau politique, Xi Jinping pourrait éventuellement cibler les cadres du niveau bien supérieur.

Version anglaise : Deep Ties Lurk Beneath Surface in China Corruption Case

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