Opinion
Donald Trump refuse de céder sur la question de Taïwan

L’armée taïwanaise organise une séance de tir réel avec le premier lot de chars américains M1A2T Abrams, séparée des exercices annuels Han Kuang, à Hsinchu, Taïwan, le 10 juillet 2025.
Photo: I-Hwa Cheng/AFP via Getty Images
Le régime chinois est rusé. Il cherche toujours à saisir la moindre occasion pour faire avancer ses intérêts, qu’il défend ensuite comme s’il s’agissait d’une question de vie ou de mort. C’est ce qu’on appelle l’incrémentalisme ou la technique du salami. Pékin vole une fine tranche de salami à la fois, et si vous ne l’en empêchez pas, vous vous retrouverez bientôt sans salami.
Par exemple, Pékin tente récemment de pousser l’administration Trump à s’opposer publiquement à l’indépendance de Taïwan, révèlent des sources au Wall Street Journal. Cela constituerait un recul par rapport à la langue soigneusement élaborée qui consiste à s’opposer aux changements unilatéraux ou forcés du statu quo, tout en maintenant une ambiguïté stratégique quant à la défense militaire de Taïwan par les États-Unis. Si cette stratégie semble floue, c’est que c’est précisément sa fonction.
Pour simplifier, la stratégie américaine est de faire croire à la Chine qu’elle défendra Taïwan, et à Taïwan qu’elle ne le fera pas. Cette dissuasion réciproque est maximisée, mais difficile à maintenir, Pékin et Taipei écoutant attentivement les déclarations de Washington et surveillant les actes du Pentagone dans la région.
Heureusement, la puissance militaire américaine y est bien présente, même si elle demeure insuffisante. L’atout fondamental pour défendre Taïwan reste la propre armée taïwanaise, qui dépend des exportations d’armement américain.
Si Washington se soumettait à la rhétorique privilégiée par le Parti communiste chinois (PCC), cela pourrait freiner de futures exportations d’armes américaines vers Taïwan. Ce renoncement nuirait à l’économie américaine, affaiblirait l’industrie de défense nationale, amoindrirait la dissuasion et augmenterait le risque de conflit entre la Chine et Taïwan.
Aujourd’hui, l’équilibre sur le détroit de Taïwan repose avant tout sur le volume d’armes américaines vendues à Taïwan, ce qui dissuade idéalement Pékin de toute conquête. Cette stratégie est renforcée par l’ambiguïté : Taipei ne saura jamais avec certitude si Washington prendra le risque d’une guerre avec la Chine pour protéger l’île.
Après la prise de Pékin par le PCC en 1949, les nationalistes réfugiés à Taïwan rêvaient de reprendre le continent. Mais à mesure que la puissance économique et militaire du PCC s’accroissait grâce au commerce international, cet objectif est devenu irréalisable ; Taïwan s’est alors tourné vers la paix, puis l’indépendance.
La démocratisation de Taïwan à la fin des années 1980 a facilité le soutien américain à l’île, tout en transformant l’espoir – pour le moins hypothétique – de reconquête du continent en un enjeu majeur. Si la Chine continentale devenait démocratique, nombre de problèmes mondiaux seraient résolus, notamment le soutien de Pékin aux régimes autoritaires tels que la Russie, l’Iran, le Venezuela et la Corée du Nord.
Certains analystes soutiennent qu’une déclaration formelle d’indépendance de Taïwan « provoquerait » une invasion du PCC, donc la guerre. Cela conduit, dans le sillage du PCC, à blâmer les politiciens taïwanais qui évoquent l’indépendance. Une façon d’agir consiste à déclarer que Taïwan est déjà indépendant, rendant inutile une proclamation officielle. Cette approche est logique ; de nombreux pays (mais leur nombre décroît) reconnaissent la souveraineté de Taïwan. Revendiquer l’indépendance existante et obtenir un siège à l’ONU irait dans le sens d’une réponse à l’agression chinoise ; tout recul encouragerait Pékin à persévérer.
L’indépendance vis-à-vis du PCC est un droit, et peut-être même un devoir. Le PCC orchestre au moins un génocide, ce qui représente le summum du mal. Par conséquent, résister au mal impose non seulement de proclamer son indépendance du PCC, mais aussi d’agir. Blâmer les dirigeants taïwanais pour leur aspiration – voire leur déclaration – d’indépendance, c’est blâmer la victime, voire être complice du crime.
Le président Donald Trump ne le fera pas. Il défend l’économie et la sécurité nationales américaines, qui bénéficient d’un traitement de Taïwan comme pays pleinement indépendant, notamment par la vente d’armes nécessaires à sa défense. Sans ces armes, le régime chinois pourrait attaquer et l’emporter plus facilement, ce qui amènerait Washington à envisager une intervention militaire, conduisant à une guerre directe entre deux puissances nucléaires, scénario à proscrire.
Mais il serait tout aussi dangereux de laisser le PCC gagner en puissance en annexant Taïwan et ses usines de semi-conducteurs. Tant que nous continuerons à contenir les manipulations lexicales du PCC, nous pourrons éviter de graves difficultés à l’avenir.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Anders Corr est titulaire d'un BA/MA en sciences politiques de l'université de Yale (2001) et d'un doctorat en administration de l'université de Harvard (2008). Il est directeur de Corr Analytics Inc. et éditeur du Journal of Political Risk, et a mené des recherches approfondies en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Il est l'auteur de "The Concentration of Power" (à paraître en 2021) et de "No Trespassing", et a édité "Great Powers, Grand Strategies".
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