Canada: une étudiante demande la libération de sa mère emprisonnée en Chine

"Il est triste que le fait de vouloir préserver ses croyances spirituelles soit devenu le 'crime le plus grave et le plus dangereux' dans la Chine d'aujourd'hui"

Par Michael Wing
4 février 2022 13:38 Mis à jour: 5 février 2022 07:33

C’est en aout 2020 qu’une jeune étudiante en animation numérique est arrivée au Canada afin d’échapper au harcèlement du régime chinois et assurer son avenir. Sa famille était persécutée pour ses croyances depuis longtemps. Mais, un an à peine après son départ, la jeune femme a appris que sa mère était à nouveau emprisonnée. Voici son histoire.

Cette talentueuse étudiante de 24 ans du Sheridan College, en Ontario s’exprime aujourd’hui pour demander la libération immédiate de sa mère, persécutée pour sa croyance spirituelle. Alors qu’elle n’avait que 4 ans, elle‑même a été prise en otage par la police chinoise qui tentait d’arrêter ses parents.

Lucy Mingyuan Liu, dont le père est artiste et la mère, l’ancienne doyenne d’une université chinoise, a toujours été douée pour la peinture traditionnelle. Elle s’est récemment lancée dans l’animation numérique en 3D. Dès sa première année, elle a eu beaucoup de succès à Sheridan, un campus où Disney et Pixar repèrent les meilleurs talents pour remplir leurs rangs.

En mai 2021, le collège Sheridan a organisé une conférence sur Zoom pour décerner le prix Tibor Madjar de la meilleure animation globale et c’est Lucy qui a gagné. Son animation de danse classique, d’une grande beauté, a envoûté les juges.

L’animation démo de Lucy Mingyuan Liu, une danseuse animée en 3D. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Dans une interview pour Epoch Times, Lucy explique que, dans le monde de l’image de synthèse (CGI), animer des personnages de manière réaliste est un défi des plus difficiles.

Sa danseuse, dont l’anatomie était parfaite, avec une chorégraphie gracieuse, était le fruit d’un esprit débordant d’inspiration, ce que les juges n’ont pas manqué de percevoir.

Les danseurs de Shen Yun Performing Arts comme modèle

La danseuse en image de synthèse de Lucy n’est pas sortie de sa seule imagination. Le personnage a été inspiré par Shen Yun Performing Arts, la première compagnie mondiale de danse et de musique classiques chinoises, qui se consacre à faire revivre la culture traditionnelle chinoise d’inspiration divine, vieille de 5 000 ans.

Lucy, qui pratique le Falun Gong, une discipline spirituelle qui fait l’objet de persécutions, a grandi au milieu de personnes tranquilles travaillant sur elles‑mêmes, adonnées à la méditation, au qigong et vivant selon les vertus de l’authenticité, la bienveillance et la tolérance. Ses parents, comme d’innombrables autres pratiquants de Falun Gong, sont persécutés pour leur croyance par le Parti communiste chinois (PCC).

« Il est triste que le fait de vouloir préserver ses croyances spirituelles soit devenu le ‘crime le plus grave et le plus dangereux’ dans la Chine d’aujourd’hui », déclare‑t‑elle. « Les pratiquants de Falun Gong sont confrontés à la discrimination et à l’aliénation au quotidien, car ils s’efforcent d’être de bonnes personnes. »

Le Falun Gong (ou Falun Dafa) est une discipline spirituelle devenue populaire en Chine à partir des années 1990 en raison de ses enseignements moraux et de ses bienfaits pour la santé. Le Falun Gong s’est attiré les foudres du PCC, considérant l’implantation croissante de cette pratique pacifique dans la société chinoise comme une menace pour ses idéologies marxistes et son pouvoir. L’ancien dirigeant du PCC, Jiang Zemin, a alors lancé une campagne de persécution en juillet 1999 dans l’idée d’éradiquer le Falun Gong et ses pratiquants. Plus d’une vingtaine d’années ont passé et la persécution est toujours en cours.

Lucy Mingyuan Liu avec son père, Yong Liu, et sa mère, Yan Liu. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Comme beaucoup d’autres, les parents de Lucy, lorsqu’elle était au lycée, ont perdu leur emploi et ont été condamnés à des peines de prison de plusieurs années, car ils pratiquaient le Falun Gong. Après quoi, elle s’est mise à avoir peur et pleurait quotidiennement jusqu’à leur retour à la maison.

Face à la persécution nationale, les parents de Lucy craignaient pour elle.

« Mes parents ont dit que ce n’était pas sûr pour moi de rester en Chine, alors ils ont voulu que j’aille à l’étranger », raconte Lucy. « Ils ont décidé de m’envoyer au Canada pour que l’ombre de la persécution ne puisse plus peser sur ma carrière et ma vie future. Je sais que le gouvernement canadien est le plus gentil, ou très solidaire du Falun Gong, donc j’ai une bonne impression de ce pays. »

« Et je sais que le Sheridan College au Canada est le meilleur, c’est pourquoi j’ai choisi l’animation. »

Un nouveau départ et une mission

Lucy a atterri au Canada à l’été 2020. Maintenant, dans son deuxième programme, elle a de grands espoirs de travailler un jour pour un studio important.

« Une entreprise comme Disney, ce serait l’emploi de rêve », dit‑elle. « Depuis mon dernier programme, je sais qu’il n’y a qu’un ou deux étudiants qui finissent par y travailler. »

Quelques dessins de Lucy Liu. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Après avoir terminé son premier programme d’animation numérique, elle a entamé à l’automne dernier un deuxième programme, plus avancé, sur les créatures numériques, afin d’explorer plus avant le monde de la 3D, la texture, le détail, le réalisme. C’est comme passer d’un dessin animé pour enfants de qualité télévisuelle à un long‑métrage de qualité cinématographique, dit‑elle.

Chaque morceau de fourrure, plume et écaille est minutieusement rendu et animé en 3D. Elle est actuellement en train de créer un triton pour son prochain projet important. Mais en septembre 2021, le PCC a entravé son élan et sa confiance en elle.

Mon père m’a appelée et m’a dit : « Ta mère a encore été arrêtée », se souvient‑elle.

La mère de Lucy, Yan Liu, a été emmenée au centre de détention de Kunming, dans la province chinoise du Yunan, où seul son avocat a été autorisé à lui rendre visite deux fois, mais pas son mari. « Maintenant, même l’avocat n’est plus autorisé à rencontrer ma mère », explique‑t‑elle. « Les personnes qui y sont allées m’ont dit que l’environnement à l’intérieur du centre de détention est vraiment terrifiant. »

« La police a envoyé le dossier de ma mère au parquet une deuxième fois vers le 30 décembre 2021. Le parquet prépare maintenant son procès, et pour autant que je sache, ces procès contre les pratiquants de Falun Gong se déroulent en secret. Ils ne préviennent pas les membres de la famille ni l’avocat. »

C’est particulièrement inquiétant, car les pratiquants de Falun Gong en prison ou dans des camps de travail, outre la torture et la mort, risquent de voir leurs organes prélevés – cœurs, reins, poumons, foies et autres – et vendus en générant d’énormes profits dans une industrie de transplantation forcée d’organes approuvée par le gouvernement chinois. Le marché pèse des milliards de dollars.

Une photo d’enfance de Lucy avec sa mère. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Ces espoirs réduits, la confiance initiale de Lucy dans la possibilité de remporter le prix Tibor Madjar a été balayée par les craintes qu’elle éprouvait pour sa famille, ce qui a nui à sa concentration. Mais en persévérant, avec l’aide de pratiquants canadiens de Falun Gong, elle a réussi à faire entendre sa voix et à faire connaître au monde entier le sort de sa mère.

Une voix pour ceux qui n’en ont pas

Bravant les températures glaciales de Toronto le 18 novembre 2021, Lucy s’est tenue debout, épaule contre épaule avec d’autres pratiquants de Falun Gong, devant le consulat de Chine, le long de la rue St George. Microphone à la main, elle a prié les autorités chinoises et canadiennes d’agir au nom de sa mère.

« J’espère que mon histoire touchera ceux qui travaillent dans le domaine de l’application de la loi en Chine, afin qu’ils se demandent s’ils appliquent la justice ou s’ils y font obstacle », a‑t‑elle dit.

Parler haut et fort, comme Lucy l’a fait, a déjà poussé des députés canadiens à téléphoner aux prisons chinoises pour aider les pratiquants, comme ce fut le cas pour Yinghua Chen, maintenant en sécurité au Canada, brutalisée dans une prison pour femmes de la province du Hebei pendant quatre ans. Les appels de l’étranger ont forcé les geôliers, qui craignaient d’embarrasser le PCC au niveau international, à ménager Chen, à ne pas la torturer à la libérer finalement.

Dans l’espoir de protéger sa mère emprisonnée, Lucy a lancé une pétition auprès du premier ministre canadien le 1er décembre 2021.

« Les tragédies et les traumatismes que j’ai vécus en tant qu’enfant en raison de la persécution dépassent les mots », a‑t‑elle indiqué dans sa lettre de pétition. « Je me lève (…) pour demander à tous les Canadiens vertueux, aux parlementaires et à notre gouvernement de m’aider et de demander au régime communiste chinois de libérer immédiatement ma mère et de mettre fin à la persécution du Falun Gong. »

Lucy Liu prend la parole devant le consulat de Chine à Toronto. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Maintenir le rêve en vie

Avant le début de la persécution en Chine, les membres de la famille de Lucy étaient plutôt aisés et menaient une vie idéale, jusqu’à ce que le régime communiste bouleverse leur « belle existence » du jour au lendemain.

Son père, Yong Liu, était un des plus grands artistes du pays et un professeur d’art respecté. La mère de Lucy était un professeur d’anglais estimé à l’université Jilin‑Lambton College de Changchun, un partenariat entre l’université Jilin et l’université Memorial de Terre‑Neuve, au Canada. Mais le fait de voir la répression s’intensifier à Changchun les a poussés à faire leurs valises, à laisser derrière eux des carrières réussies pour déménager à 5 000 km de là, dans la lointaine province du Yunnan, où ils ne connaissaient personne. Avec de la chance, le couple plein de ressources a trouvé du travail. Ses deux parents sont devenus professeurs à l’université avant de démissionner et de faire profil bas, craignant le PCC.

Mais la persécution, déployée à l’échelle nationale, les a rattrapés.

« Un jour d’hiver en 2001, plus de 20 policiers se sont présentés à l’université, essayant d’attraper ma mère dans sa classe », raconte Lucy. « Une femme de ménage a discrètement laissé ma mère sortir par la porte latérale de la sortie de secours. Ma mère a quitté le site de l’école et est allée se cacher dans un endroit sûr. »

La famille a été contrainte à l’exil et à la clandestinité. En 2012, son père a été arrêté et condamné à quatre ans de prison. Alors que son père faisait face à des persécutions en détention, Lucy, qui était alors en terminale, a appris que sa mère avait été renvoyée de son poste de conférencière à l’université. En 2015, alors que Lucy se préparait à être admise dans une des meilleures universités d’art, sa mère a été condamnée à trois ans de prison.

Lucy a déclaré que ses parents ont subi des tortures, des lavages de cerveau et des travaux forcés. En 2018, ses deux parents ont été libérés des prisons, et la famille a réussi à rassembler sa vie dispersée avec résilience et courage. Aujourd’hui, avec sa mère détenue en prison, Lucy ne peut pas croire que cela se reproduise.

« Pendant des années, mes parents ont été mes refuges et mes boucliers, me protégeant des tempêtes et du tonnerre au milieu de la persécution », explique Lucy. « Aujourd’hui, je voudrais être le bouclier de mes parents et des valeurs auxquelles ils tiennent dans leur cœur et dans leur vie. »

Les parents de Lucy, le père Long Liu et la mère Yan Liu. (Avec l’aimable autorisation de Lucy Mingyuan Liu)

Lucy s’est récemment exprimée dans une vidéo, demandant du soutien pour la libération rapide de sa mère et pour aider à mettre fin à la persécution de sa croyance spirituelle par le PCC, qui dure depuis trop longtemps.

En plus de travailler pour Disney ou Pixar, Lucy aspire à utiliser un jour l’animation numérique pour amplifier sa voix et mettre en lumière les atrocités commises en Chine. Elle envisage également d’utiliser l’image de synthèse pour montrer aux gens « le bon côté du Falun Gong », la beauté de ses trois vertus fondamentales que sont la vérité, la compassion et la tolérance, comme sa danseuse 3D avait si magiquement impressionné ses juges.

« Je sais que la persécution, toutes ces choses, se produisent à cause des médias, de la propagande », poursuit‑elle. « Je veux utiliser cette méthode d’animation pour créer un film sur la vérité de la persécution. Un film est un très bon moyen d’exercer de l’influence. »

« Je veux faire un film sur l’histoire de ma famille, montrer comment nos croyances nous ont offert une belle vie et aussi faire voir aux gens la persécution de la foi par le PCC. »

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