Fin de vie: l’évêque de Reims et l’ancien député Jean Leonetti ont exprimé leur hostilité à la future loi

L’ancien député Jean Leonetti a donné son nom aux lois de 2005 et de 2016 sur les droits des malades en fin de vie.
Photo: Christophe ARCHAMBAULT / AFP
Évêque de Reims et président de la Conférence des évêques de France (CEF), Éric de Moulins-Beaufort a redit dans le Journal du dimanche son hostilité à la future loi sur la fin de vie. L’ancien député Jean Leonetti s’est quant à lui exprimé dans le Figaro.
« Tromperie »
« Jusqu’ici, la fraternité consistait à retenir quelqu’un qui voudrait se suicider, (…) à l’accompagner jusqu’au bout. Cela deviendrait-il désormais de regarder la personne se suicider ou de l’aider à le faire ? » s’est interrogé Éric de Moulins-Beaufort. Alors qu’Emmanuel Macron a décrit comme une « loi de fraternité » ce texte qui sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 17 mai, le président de la CEF a réitéré sa critique de « tromperie ». « Très directement, elle transformera notre système de santé », a-t-il averti.
Dans une interview au Figaro samedi, l’ancien député LR Jean Leonetti considère que « les orientations proposées privilégient la liberté individuelle à la fraternité collective puisqu’on permet de donner la mort à des personnes vulnérables au nom de leur liberté de choix ». Jean Leonetti, maire d’Antibes et cardiologue de profession, a donné son nom aux lois de 2005 et de 2016 sur les droits des malades en fin de vie.
Interrogé sur les « critères stricts » posés pour avoir accès à l’aide à mourir (être majeur, lucide, et condamné à court ou moyen terme avec des souffrances réfractaires), Éric de Moulins-Beaufort a estimé que « le drame de ces critères stricts est qu’ils indiquent de manière précise à certains les verrous à faire sauter ».
Et « l’exemple des pays qui ont franchi le pas de l’euthanasie ou du suicide assisté montre le caractère inéluctable du glissement », a averti l’évêque de Reims.
Éric de Moulins-Beaufort s’était lui aussi inquiété sur l’évolution possible du texte, en avertissant que dans tous les pays ayant autorisé un « droit à la mort volontaire », les conditions restrictives initiales « se sont assouplies petit à petit ». Il cite notamment la Belgique où « le dispositif s’est étendu aux enfants et aux malades psychiatriques ».
« On n’utilise pas le terme d’euthanasie » et « on élimine le mot “suicide” » mais « en réalité le projet autorisera les deux », a déploré M. Leonetti.
« Des manœuvres de certaines forces économiques »
Éric de Moulins-Beaufort s’est aussi inquiété « des manœuvres de certaines forces économiques, comme cette mutuelle qui a envoyé aux parlementaires un témoignage émouvant dans le sens du suicide et de l’euthanasie » – une référence à la MGEN qui s’est engagée pour « une fin de vie digne et choisie ».
Dans ce contexte, il a estimé que « les parlementaires auront à cœur de comprendre le sujet » et de mesurer « l’enjeu » pour « le pacte social », tout en estimant que « le combat sera rude ».
Le maire d’Antibes appelle à prendre « le parti de la fraternité » et faire des soins palliatifs « un véritable enjeu national ». Alors, il se peut que les personnes « réclament plus et mieux de vie, plutôt que d’appeler la mort pour les délivrer de la souffrance, la solitude et l’abandon. » Sinon, on risque de s’engager dans une voie « où la mort sera possible partout alors que l’accompagnement ne sera possible que dans certains territoires ».
En fin d’interview, il évoque le principe de « toute société humaine évoluée » : « Tu ne tueras point. » Et de citer l’ancien ministre de la Justice Robert Badinter qui avait exprimé au cours d’une audition sur la fin de vie, que « nul ne peut retirer la vie à autrui dans une démocratie ».
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