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Shein

Shein sera-t-il suspendu en France ?

La justice rendra le 19 décembre sa décision sur la demande de l’État visant une suspension de trois mois de la plateforme française du géant asiatique du commerce en ligne Shein, en raison de la commercialisation de produits illicites, a décidé vendredi le tribunal judiciaire de Paris.

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Photo: YUICHI YAMAZAKI/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

Si le blocage total du site apparaît disproportionné aux yeux du parquet, l’avocat de l’État a proposé de maintenir la suspension de la « marketplace » de Shein jusqu’à la mise en place d’un certain nombre de mesures destinées à éviter la répétition des nuisances.

L’État ne souhaite pas « interdire » à Shein de « faire du commerce », mais réclame un « cadre contraignant » afin de s’assurer que l’on ne retrouvera plus « des poupées sexuelles d’1,20 m avec des visages de fillette de 10 ans et des orifices sexuels » ou encore « des machettes à double lame », a notamment plaidé l’avocat de l’État, Renaud Le Gunehec.

La vente de « dizaines » de poupées (quatre, selon Shein) en forme de « gamines ultra-réalistes », parfois accompagnées « d’un nounours », n’était « pas un accident » mais « une offre massive ouvertement pédophile », a estimé l’avocat de l’État lors de cette audience, initialement prévue le 26 novembre mais renvoyée à la demande des pouvoirs publics.

Le gouvernement fonde sa demande sur la loi sur la confiance dans l’économie numérique, qui permet de faire cesser un dommage causé par un contenu en ligne, tandis que l’entreprise, fondée en Chine en 2012 et désormais basée à Singapour, conteste la pertinence de ce fondement juridique par la voix de ses avocats Julia Bombardier et Kami Haeri.

Une plateforme sous pression réglementaire

Représentée en Europe par la société irlandaise ISSL (Infinite Styles Services Co. Limited), la marque de mode ultra-éphémère affirme renforcer ses contrôles « en continu », a expliqué Me Bombardier.

Après la découverte des produits incriminés, Shein les a retirés et a suspendu toutes les ventes réalisées sur son site français par des vendeurs tiers, ainsi que celles des produits hors habillement ; une « mesure responsable », selon Me Haeri, qui estime que « le dommage a disparu ».

Un bras de fer politique et judiciaire appelé à durer

Pointant notamment les difficultés techniques liées à la mise en place de filtres d’âge pour les contenus à caractère pornographique, les avocats de Shein disent ne pas être « en mesure » de donner un délai pour la réouverture de la marketplace.

Le 5 novembre, le gouvernement avait donné 48 heures à Shein pour se mettre en conformité avec la loi, après la découverte sur son site de poupées sexuelles d’apparence enfantine ; le Premier ministre Sébastien Lecornu avait ensuite constaté le retrait de ces produits illicites, tout en confirmant le même jour « le maintien des procédures judiciaires aux fins d’obtenir la suspension de la plateforme ».

Fournisseurs d’accès et militants en première ligne

Si le blocage total du site n’était pas retenu, l’État se satisferait d’un statu quo, avec le maintien du site tel qu’il fonctionne depuis début novembre en France, limité aux articles d’habillement, et conditionnerait la levée de la suspension à la mise en œuvre d’un ensemble de mesures et de contrôles.

Les fournisseurs d’accès à internet (Bouygues, Free, Orange, SFR) étaient également assignés afin de garantir, le cas échéant, le blocage de Shein ; ils ont relevé le manque de précision de l’État quant aux noms de domaines à cibler et souligné leur incompétence à bloquer l’application mobile de la plateforme.

Lors de l’audience, une dizaine de militants de l’association Mouv’Enfants, qui lutte contre les violences faites aux enfants, s’étaient rassemblés devant le tribunal, brandissant des pancartes portant des messages tels que « Les poupées sexuelles alimentent le fantasme pédocriminel ».