Le plus haut gradé de tous les transfuges qui a révélé la désinformation

Ion Mihai Pacepa : le plus important espion du bloc soviétique à avoir fait défection en Occident est décédé à 92 ans

Par Ronald J. Rychlak
15 février 2021 20:03 Mis à jour: 15 février 2021 21:18

En 2017, Christopher Monckton, troisième vicomte Monckton de Brenchley et ancien conseiller du Premier ministre britannique Margaret Thatcher, a qualifié le lieutenant-général roumain Ion Mihai Pacepa « d’homme le plus influent du XXe siècle et, vraisemblablement, du début du XXIe siècle ».

C’est lui qui a révélé la désinformation fabriquée dans le bloc soviétique pour être propagée en Occident et dans le reste du monde. Malheureusement, la plupart des gens ne connaissaient pas Pacepa et ses ouvrages.

Le matin du 14 février 2021, le Covid-19 a accompli ce que deux groupes d’assassins parrainés par l’ancien régime communiste roumain et une prime de 2 millions de dollars promise pour sa mort n’ont pas pu faire. Ion Mihai Pacepa, « Mike » pour ceux qui le connaissaient, a quitté ce monde.

Pacepa est né à Bucarest en 1928. Il a étudié la chimie industrielle à l’université Politehnica de Bucarest mais, avant d’obtenir son diplôme, il a été recruté par la Securitate – la police secrète de la république socialiste de Roumanie. Au début, il a été affecté au département de contre-sabotage de la Securitate. En 1955, il a été transféré au service de renseignement extérieur.

En 1957, Pacepa est devenu chef de la cellule de renseignement roumaine à Francfort, en Allemagne de l’Ouest. Deux ans plus tard, il a été nommé à la tête du nouveau département d’espionnage industriel de Roumanie, poste qu’il a occupé jusqu’à sa défection en Occident. À partir de 1972, il a également été chef adjoint des services de renseignement roumains à l’étranger, conseiller pour le développement industriel et technologique, et bras droit du dictateur communiste roumain Nicolae Ceaușescu.

Dans son nouveau rôle, Pacepa se trouvait au sommet du système de l’ordre mondial communiste. Il a parcouru le monde entier. Il a connu et fréquenté Nikita Khrouchtchev, Mao Zedong, Fidel Castro et, bien sûr, Ceaușescu. Il a également rencontré des dirigeants occidentaux, dont le président américain Jimmy Carter.

Cependant, en 1978, il a risqué sa vie pour quitter sa position au sommet du monde communiste et venir aux États-Unis. Il s’est donné pour mission de mettre en garde l’Occident contre l’oppression qui suit nécessairement le socialisme et le communisme. Il a été et reste le plus haut gradé du bloc soviétique à n’avoir jamais fait défection en Occident.

Au début, le président Carter n’a pas cru Pacepa et a voulu renvoyer le transfuge en Roumanie – une certaine condamnation à mort. La désinformation créée par Pacepa lui-même avait fait croire au président américain que Ceaușescu était un allié digne de confiance – et, tout à coup, Pacepa lui présentait une image bien différente.

La CIA a fini par convaincre Carter de la bonne foi de Pacepa, ce qui a permis aux agences de renseignement occidentales d’utiliser les précieuses informations qu’il a fournies. Le plus important était son explication de la façon dont les agents du bloc soviétique ont propagé la désinformation pour tromper et saper la foi dans les gouvernements, les dirigeants, l’histoire et les institutions de l’Occident – en particulier les églises. Lorsque Pacepa a plus tard obtenu la citoyenneté américaine, la CIA lui a remis une lettre le remerciant pour sa « contribution importante et unique aux États-Unis ».

En Roumanie, Ceaușescu a créé une unité spéciale de la Securitate chargée d’une seule et unique mission – assassiner Pacepa. Le dictateur a également mis deux primes distinctes d’un million de dollars pour sa tête et a envoyé le tristement célèbre tueur Carlos le Chacal et son groupe pour mener à bien cette tâche, en créant en même temps un deuxième commando d’assassins. Bien qu’ils aient été proches de leur but, les assassins n’ont pas réussi. À deux occasions, l’identité secrète de Pacepa a été révélée – il a dû subir une chirurgie plastique et reconstruire sa vie avec sa femme américaine.

Pacepa a finalement publié ses informations dans le livre Horizons rouges qui a révélé la corruption et la brutalité du gouvernement Ceaușescu et du monde soviétique et communiste. (Le président américain Ronald Reagan a appelé ce livre sa « bible pour traiter avec les dictateurs ».) Le livre a été traduit et transféré clandestinement en Roumanie où il est devenu un catalyseur motivant le peuple à renverser le régime totalitaire. Nicolae Ceaușescu et sa femme, Elena, ont été arrêtés, jugés, condamnés et exécutés sur la base de preuves dont la plupart provenaient directement de ce livre.

Bien que Pacepa et sa femme aient vécu sous de fausses identités après leur arrivée aux États-Unis, il a continué à écrire des livres et des articles sous son vrai nom, y compris le livre paru en 2013 et dont j’étais coauteur. Il est intitulé Disinformation: Former Spy Chief Reveals Secret Strategies for Undermining Freedom, Attacking Religion, and Promoting Terrorism. Ion Mihai Pacepa voulait corriger les fausses informations qu’il avait lui-même contribué à créer lorsqu’il était une personne influente dans le monde du renseignement du bloc soviétique.

Parmi les éléments de désinformation les plus importants qu’il voulait corriger, il y avait le mensonge que la CIA était derrière l’assassinat du président John Kennedy, que le pape Pie XII était pro-nazi pendant la Seconde Guerre mondiale et que le terrorisme au Moyen-Orient s’est développé naturellement (plutôt que d’être fomenté par le Kremlin). La machine du renseignement du bloc soviétique avait propagé toutes ces fausses histoires lorsque Pacepa travaillait dans son cadre. Son dernier livre, Operation Dragon: Inside the Kremlin’s Secret War on America (coécrit avec R. James Woolsey) vient de sortir chez l’éditeur Encounter Books.

Le récent flirt de l’Amérique avec le socialisme a beaucoup préoccupé Pacepa. En tant que chef des services de renseignement étrangers dans la Roumanie communiste, il a travaillé avec des agents secrets, avec des moyens de corrompre ou de soumettre au chantage et avec des « idiots utiles » dans le but de semer la méfiance dans les esprits des Américains par rapport à l’implication de leur gouvernement dans la guerre du Vietnam. Il a constaté que le même type de désinformation se reproduisait aujourd’hui par le biais des « fake news » (fausses nouvelles) et de toutes sortes d’histoires et reportages (parfois rétractés par la suite) qui, par exemple, dépeignaient les États-Unis sous le pire jour possible.

M. Pacepa a souvent parlé des médias – plus précisément de l’argent qui se cache derrière les médias d’information et qui alimente les fausses histoires. Il s’est spécialisé dans la publication d’articles de cette manière lorsqu’il était au sommet du système du renseignement du bloc soviétique. Toutefois, plus tard, il a contribué à changer l’attitude des Américains sur plusieurs questions concernant les années 1960 et 1970. En même temps, il a reconnu que les mêmes techniques sont utilisées aujourd’hui, de sorte que de nombreux Occidentaux ont une vision très négative de leur gouvernement et une opinion positive sur le socialisme.

Ion Mihai Pacepa laisse derrière lui sa femme qui l’a accompagné pendant plus de 40 ans et une fille adulte.

Ronald J. Rychlak est titulaire de la chaire Jamie L. Whitten en droit et administration à l’Université du Mississippi. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Hitler, the War, and the Pope ; Disinformation (coécrit avec Ion Mihai Pacepa) et The Persecution and Genocide of Christians in the Middle East (coédité avec Jane Adolphe).

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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