« Je n’ai droit à aucune pitié » : une patiente en chimio se fait verbaliser par la SNCF pour avoir acheté son billet dans le train

Par Emmanuelle Bourdy
24 juin 2025 12:36 Mis à jour: 24 juin 2025 15:49

Ludivine ne décolère pas. Vendredi dernier, elle a été verbalisée par la SNCF alors qu’elle se rendait l’hôpital pour son traitement de chimiothérapie. Elle estimait pourtant être en règle, ayant acheté son billet dès sa montée dans le train.

Suivie à l’Institut Curie à Paris depuis six mois en raison de son cancer rare, Ludivine à l’habitude d’effectuer le trajet Compiègne-Paris. Ce vendredi matin, elle s’apprêtait à prendre son TER en gare de Compiègne (Oise) lorsqu’elle s’est rendue compte qu’il avait 15 minutes de retard. Craignant de ne pas arriver à l’heure à l’hôpital, elle a décidé de prendre le précédent, qui lui aussi avait du retard. Bien mal lui en a pris, elle a été verbalisée par un contrôleur quelques minutes avant l’entrée en gare, comme le relate Le Parisien.

« J’ai trouvé ça très injuste, très inhumain »

Dès sa montée dans le train, la jeune femme de 39 ans a essayé de chercher le contrôleur pour lui expliquer sa situation, en vain. Elle a donc décidé d’acheter son billet en ligne, via son appli mobile, afin d’être en règle. Depuis six mois, elle est suivie à l’institut Curie à Paris et non plus à l’hôpital de Compiègne et ce matin-là, elle avait donc rendez-vous à 9 h 30 dans le centre hospitalier parisien.

Peu de temps avant l’arrivée en gare du Nord, un contrôleur a pris son billet, pointant le fait qu’elle l’avait acheté après le départ du train, ce qu’elle a reconnu. Il lui a alors dressé une contravention d’un montant de 50 euros. « Je n’ai pas essayé de frauder, ni d’arnaquer qui que ce soit », s’est-elle défendue auprès du quotidien francilien, ajoutant : « J’ai un billet, une carte TER Hauts-de-France, je me suis mise à pleurer parce que je suis fatiguée, je suis en chimio, je suis à bout. » « J’ai trouvé ça très injuste, très inhumain », a-t-elle renchéri.

« Il m’a dit que ça ne le regardait pas. Il n’en avait rien à faire »

La trentenaire a expliqué au contrôleur l’avoir cherché dans les wagons alentour dès qu’elle est montée dans le TER. N’étant pas « dans une forme olympique », elle lui a précisé qu’elle ne pouvait pas « traverser tout le train à sa recherche ». Mais son interlocuteur est resté de marbre, affichant à son encontre la plus totale indifférence et lui signifiant que cela « ne le regardait pas ». « Il n’en avait rien à faire, j’avais l’impression qu’il se foutait de ma gu***e », s’est agacée Ludivine avant de préciser : « Je suis très vulnérable, j’ai pleuré jusqu’à l’arrivée du train. Toute la journée, j’ai eu mal à la tête. […] Si les gens avaient la moindre idée de l’état dans lequel on est quand on suit un traitement lourd comme une chimiothérapie… Déjà que physiquement c’est très dur, il faut qu’on suive psychologiquement. »

La jeune femme, qui espérait obtenir un peu de « pitié » de la part de la SNCF, n’a finalement rien reçu, malgré le dépôt d’un recours accompagné de toutes les pièces justificatives attestant de sa bonne foi. « Tout voyageur doit être porteur d’un billet valable et être en capacité de justifier de sa réduction. Nos chefs de bord ont pour mission d’appliquer un cadre clair et égal pour tous », a indiqué la compagnie ferroviaire au Parisien, se disant néanmoins compatissante avec la voyageuse.

« 50 euros, c’est cinq jours d’indemnité »

Bien que sa situation financière soit modeste, elle a réglé l’amende directement auprès du contrôleur. « Je suis travailleuse indépendante, je ne touche que 12 euros par jour d’indemnités de la Sécurité sociale, une amende à 50 euros, c’est cinq jours d’indemnité », a-t-elle mentionné, dépitée.

Elle a également précisé qu’elle préférait se rendre à ses rendez-vous médicaux en train plutôt qu’en VSL (véhicule sanitaire léger), et ce pour plusieurs raisons. En effet, bien que ces derniers soient remboursés par la Sécurité sociale, ils ne sont pas à l’abri des embouteillages, sans compter qu’il n’est « pas si facile » d’obtenir ce type de transport.

Dans sa mésaventure, un seul point positif : Ludivine a reçu de nombreux messages bienveillants après la publication de son histoire sur son compte Facebook. Parmi eux, celui d’une contrôleuse, qui a assuré ne pas cautionner « le comportement de [son] collègue », affirmant au passage que les contrôleurs ne sont pas tous ainsi.

La voyageuse finalement remboursée

Si Ludivine reconnaît que ces messages lui ont fait du bien, elle souligne néanmoins être restée « dubitative » face à l’absence de réaction des passagers dans le wagon et à leur manque d’empathie. « Parmi tous les gens qui étaient autour de moi dans le train, personne n’a rien dit. Je suis sûre qu’ils ont entendu : je parlais fort pour couvrir mes sanglots, et le train était plein », a-t-elle enfin clarifié pour exprimer son sentiment de gratitude mêlé de perplexité.

Auprès de 20 Minutes, la passagère a indiqué être « hyper déçue » de la réponse donnée par la SNCF au Parisien. « J’espérais que ce soit un cas isolé », a-t-elle confié. « Le méchant monsieur, il aura gagné 10% de mon amende (d’après mes recherches) car j’ai eu la bêtise et l’honnêteté de payer », a-t-elle écrit sur son compte Facebook le 20 juin dernier, ajoutant : « C’est pas joli ce que vous faites, la SNCF : En rémunérant vos agents sur les amendes qu’ils mettent, vous contribuez à faire de ce monde un lieu d’indifférence et de cruauté. »

Mais le fin mot de cette histoire est tombé ce lundi 23 juin : la compagnie ferroviaire a finalement fait marche arrière. Le directeur des relations médias de l’entreprise, qui s’est dit « très sensible au témoignage de cette voyageuse », a décidé de lui rembourser les 50 euros, comme le rapporte encore 20 Minutes.

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