La Chine mise sur le « zéro émission nette » pour se prémunir contre d’éventuels blocus d’approvisionnement en combustibles

Les voitures électriques destinées à l'exportation sont empilées au terminal international de conteneurs du port de Taicang à Suzhou, province chinoise du Jiangsu, le 16 avril 2024.
Photo: STR/AFP via Getty Images
Un expert et partisan de l’énergie nucléaire a averti que la fabrication massive des voitures électriques et d’équipement pour les énergies renouvelables par Pékin n’est pas tant une croisade pour l’environnement qu’une tentative de se protéger contre de possibles pénuries de pétrole en cas d’éventuel conflit international.
S’exprimant lors du récent forum Diggers and Dealers 2025 à Kalgoorlie, en Australie, Chris Keefer, président de Canadians for Nuclear Energy, a évoqué l’engagement de Pékin à atteindre un pic d’émissions de dioxyde de carbone en Chine d’ici la fin de la décennie (2030) et la neutralité carbone (zéro net) d’ici 2060.
M. Keefer a déclaré que la Chine est actuellement le plus grand importateur mondial de pétrole, dont 80 % transitent par le détroit de Malacca, entre la Malaisie et l’Indonésie.
Si la « guerre froide » actuelle entre les gouvernements démocratiques et les régimes autoritaires devait dégénérer en un conflit réel, il y aurait un risque que l’approvisionnement en pétrole et en carburant de la Chine soit bloqué.
« Pourquoi construisent-ils autant de voitures électriques permettant de ne pas devoir utiliser autant de pétrole ? Parce qu’il s’agit de la vulnérabilité géopolitique majeure pour eux », a expliqué M. Keefer.
Il a également noté que les dirigeants de l’État-parti chinois intensifiaient le développement des énergies renouvelables en même temps que la production de charbon dans différentes régions du pays. « C’est pragmatique pour eux, et cela est peu coûteux », a-t-il fait remarquer.
Ses commentaires interviennent alors que Pékin tente de déverser ses exportations « vertes » bon marché à l’échelle mondiale, ce qui suscite des réactions négatives dans le monde entier.
Un chercheur en énergie constate que la Chine brûle du charbon « sans aucun remords »
Les arguments de M. Keefer ont été repris par Aidan Morrison, directeur de la recherche énergétique au Centre for Independent Studies australien, qui a rejeté les propos admettant que la Chine était en tête de la course mondiale à la décarbonisation.
Il a indiqué que la Chine, le premier pollueur mondial, était capable de produire de grandes quantités d’éoliennes, de panneaux solaires et de véhicules électriques à faible coût. Toutefois, ceci est attribuable au fait que les dirigeants du Parti communiste chinois (PCC) peuvent brûler du charbon « sans aucun remords » pour la fabrication de ces produits – une option qui n’est pas accessible aux pays qui respectent vraiment leurs engagements en matière de zéro émission nette.
« Ils brûlent une quantité énorme de charbon », a-t-il constaté.
« Une grande partie est du charbon [australien] que nous leur fournissons. »
En 2024, la Chine a importé d’Australie 83,24 millions de tonnes de charbon, soit une augmentation de 59 % par rapport à l’année précédente.

Un cargo charbonnier est amarré au port charbonnier d’Abbot Point à Bowen, en Australie, le 25 avril 2019. (Lisa Maree Williams/Getty Images)
M. Morrison a également souligné que si de nombreuses personnes en Occident s’intéressent aux quantités de voitures électriques et de systèmes d’énergie renouvelable produits en Chine, elles ignorent le fait que la production du charbon du pays est également en expansion.
« Chaque année, ils ajoutent une certaine quantité d’énergie éolienne et solaire à leur réseau. Je suppose que cela laisse les écologistes occidentaux empreints d’admiration », a-t-il laissé entendre.
« Mais ils ajoutent également une quantité équivalente de capacité charbonnière, ainsi qu’un peu d’énergie nucléaire. »

Des navires transportent du charbon pour le décharger devant une centrale à charbon à Hanchuan, en Chine, le 11 novembre 2021. (Getty Images)
Selon un rapport du Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur, basé en Finlande, la construction de très polluantes centrales à charbon en Chine a atteint un niveau record en 2024.
Au cours de l’année, le pays a lancé la construction de centrales à charbon de 94,5 gigawatts, le niveau le plus élevé depuis 2015.
Cela malgré l’engagement pris en 2021 par le chef du PCC, Xi Jinping, de réduire la consommation de charbon d’ici 2026-2030.
Un autre rapport de l’Agence internationale de l’énergie a également révélé que les centrales électriques chinoises consomment un tiers de la consommation mondiale de charbon.
« Ils ne s’orientent pas vraiment vers la domination du secteur d’énergies renouvelables », a souligné M. Morrison.
« Ils se contentent simplement d’ajouter un tas de choses à une base massive de charbon. »

Alfred Bui est un reporter australien de Melbourne. Il est spécialisé dans les nouvelles locales et économiques. Il était autrefois le propriétaire d'une petite entreprise et est titulaire de deux maîtrises en commerce et en droit des affaires.
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